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Mémoires du Sel

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Yvon Dufrêne - Sept.1996

Histoire des marais salants de Séné

 

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1-POURQUOI DES MARAIS SALANTS A SENE ?
Si de nos jours, le sel ne joue dans l'économie mondiale qu'un rôle mineur, son importance autrefois peut se comparer à celle du pétrole aujourd'hui.
Depuis le XIX° siècle, dans les pays développés, avec l'avènement de la civilisation industrielle, les besoins en énergie forment la préoccupation majeure. Dans les siècles précédents, il s'agissait avant tout de se nourrir, de manger à sa faim.
Il y eut naguère des "guerres du sel" comme à notre époque des "guerres du pétrole". Posséder du sel, en contrôler la vente, la taxer, était source de richesse. Les pouvoirs l'ont vite compris. L'impôt sur le sel n'a été supprimé en France qu'en 1945.

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Du saloir à l'usine
Denrée de première nécessité : substance vitale, condiment par excellence, agent conservateur, l'importance du sel dans la vie domestique fut primordiale pendant des siècles.
Au XVIII° siècle, période de création des marais salants de Séné, et jusqu'au milieu du XX° siècle, son rôle était irremplaçable dans la conservation des aliments.
Depuis l'antiquité, on avait pressenti les vertus antiseptiques du sel et son pouvoir déshydratant et on les utilisa pour la conservation des viandes, des poissons, et des produits laitiers.
" Gant halen e vez kasset blas ar goular...
Avec le sel on retire le goût du fade "
La Bretagne était sous l'Ancien Régime, pays de franc-salé, c'est à dire ne payant pas la gabelle, cet impôt sur le sel particulièrement haï partout ailleurs en France. Aussi notre région fut elle logiquement célèbre pour ses salaisons.

Salaison des viandes
Dans beaucoup de foyers, on possède encore ces charniers de terre cuite où l'on conservait la viande de porc salée et qui ne furent détrônés par le congélateur que dans les années 1960-1970.
En plus du porc on salait aussi la viande de bœuf. "'Dès la fin du moyen-âge, les salaisons de viandes de bœuf entrent dans t'avitaillement des navires bretons et européens, autorisant des pérégrinations sur mer sans qu’il ne soit nécessaire de toucher terre. Les grands ports, Brest, Lorient, siège de La Compagnie des Indes, et Nantes, point de départ du Commerce triangulaire en sont demandeurs pour leur vaisseaux de commerce ou de guerre (1) "
(1) Gildas Buron dans "Quand les Bretons passent à table"

Salaison des poissons
Outre les viandes on salait aussi les poissons
" Dans les limites du domaine breton, on inventorie une infinité d'espèces qui ont fait l'objet de préparation à sec ou de techniques spécifiques de saumurage ... Les pêcheurs, fournissant en période de Carême à l'arrière-pays et aux villes de Bretagne, toutes espèces de poissons salés susceptibles de figurer aux, menus des tables des élites et des classes populaires, faisaient intervenir [e salage à un stade ou à un autre des procédés de conservation. (1)


Le long des côtes morbihannaises existaient de nombreuses presses à sardines dans lesquelles les poissons étaient salés et disposés dans des barils percés pour y être pressés. Voilà comment Le Masson du Parc décrit, dans son rapport sur les pêches, les presses à sardines à Belle-Ile en 1728:

"Les presses à sardines sont des espèces de petits magasins à rez-de-chaussée sans aucun étage. A la hauteur de trois pieds et demi à pieds sont des trous dans la muraille d'environ un pied en quarré et de profondeur pour y pouvoir placer le bout de l'anspect ou petit soliveau qui forme le levier de fa presse. On place le baril à distance proportionnée de la muraille. Le fond qui est percé est sur un conduit ou petit égout le long duquel coulent l’huile et l’eau qui sortent des barils et qui tombent dans une espèce de cuve qui sert de réservoir pour recevoir tout ce qui sort des barils ou des presses ...
On place sur le bout du haut du baril qui est ouvert un faux-fond de bois de l'épaisseur de 7 à 8 pouces et ensuite quelques petites traverses de bois qu'on multiplie à mesure que les sardines s'affaissent, et au-dessus, on met le levier au bout duquel on place une planche suspendue avec de petites cordes, comme un des fonds d'une balance, que l’on charge de pierres et d'autres poids pour faire un poids convenable et suffisant sur les sardines du baril, et on augmente ce poids à mesure qu'elles se pressent, en remplissant: de tems à autre le haut du baril jusqu’à ce que la presse soit achevée et le baril rempli comme il doit être. (2)
(2) ADM (9 B 257)

Le paludier de Séné, quant à lui, salait les anguilles qu'il pêchait lors du rayage des vasières (opération qui consistait à assécher les vasières pour enlever la vase molle et les végétaux qui s'y étaient accumulés).

Les anguilles pêchées dans les vasières étaient pour partie conservées dans le sel et pour partie vendues au bourg de Séné.

" On commençait par les trier. 'Elles étaient salles et mises dans un charnier comme le cochon. Les plus belles anguilles, on mettait ça dans un fût de bois : une demi-barrique, en couches, bien salées.
'Et en hiver on les griffait sur le feu de bois et on tes mangeait avec des pommes de terre chaudes Le soir. On les mettait un peu à dessaler avant, parce que le sel s'était tellement imprégné qu'on aurait eu du mal à les manger. "
" On attelait le cheval au char à banc et on allait tes vendre au bourg de Séné et dans le Grand Village tous les jeudis soirs. Comme vendredi, en ce temps-là c'était le jour du poisson, on n'avait pas de mai à les vendre. C'était commandé à l’avance. La grosse partie était pesée à la maison, par deux, ou trois kilos pour les familles qu'on connaissait. "
(Témoignage de Ferdinand Quester)

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Les tanneurs employaient le sel pour le traitement et la conservation des peaux.
Requête des bouchers de Pluvigner présentée par le maire en 1807 au Préfet du Morbihan.

Salaison des produits laitiers
Sur tout le littoral atlantique, on sale le beurre, autrefois pour le conserver, aujourd'hui pour satisfaire le goût du consommateur. Le beurre salé amanenn sall est toujours préféré, en Bretagne au beurre doux amanenn douss
"La crème était battue dans des barattes verticales, le plus souvent en bois cerclé, parfois en terre dont on laissait retomber en cadence le bâton de baratte, ar vazh – ribot. Par la suite, vinrent différents modèles en bois plus aisés à utiliser: parfois toute fa baratte tournait sur son axe....
Les mottes étaient ensuite mises en forme et décorées à la cuillère de bois ou avec des marques en buis,"
(3) Boued, expressions culinaires - Patrick Hervé

Le sel n'a pas seulement été utilisé dans l'alimentation humaine ou animale. Au Moyen Age dans certaines régions on plongeait les bois de charpente dans de la saumure pour favoriser leur conservation.
En médecine, il servait aussi dans la préparation de potions.
Pline dit que le sel guérit des morsures de serpent, des piqûres de scorpion, les ulcères et les verrues.

Conservation et traitement des peaux
Les tanneurs employaient le sel pour le traitement et la conservation des peaux
En août 1807, le maire de Pluvigner écrit au Préfet du Morbihan pour lui présenter la requête des bouchers de sa commune qui souhaitent pour le salage des peaux "être autorisés à acheter avec les fabricants de sardine les sels qui sont jetés à la mer à la sortie des presses.
Ces sels sont meilleurs pour la conservation des cuirs et la régie des Douanes ne peut avoir la crainte qu'ils soient employés à une autre destination. "
A.D.M ( P 207)

Fabrique de produits chimiques
A partir du XIXème siècle, l'industrie chimique sera grande consommatrice de sel.
En 1852 Mrs La Gillardaie, frères et Cie, négociants à Vannes souhaitent établir une fabrique de produits chimiques à Séné. Ils obtiennent en avril 1853 "L'autorisation d'établir au lieu-dit La Garenne près du village de Montsarrac en la commune de Séné, une fabrique de produits chimiques, tels que sulfate de potasse, chlorure de potassium cristallisé, alun, nitrate de potasse, iode, brome, iodures, bromure."
A.D.M ( 5M 223 )

Le besoin d'argent des chanoines du chapitre de Vannes

En 1720 les Chanoines du Chapitre de Vannes avaient perdu beaucoup d'argent dans la banqueroute de la banque Law. De nombreux capitaux leur avaient été remboursés en billets de banque et ces billets perdirent en très peu de temps leur valeur.
D'autre part, le bas chœur de la cathédrale avait besoin de travaux urgents.
Ils pensent trouver une solution à leurs ennuis financiers en créant des salines à Séné sur des terres bordant la rivière de Noyalo et faisant partie du domaine maritime royal.
Au nom du Chapitre, Mgr Antoine FAGON [1665 Paris – 16/2/1742 Plescop], évêque de Vannes (1719-1742), fils du premier médecin de Louis XIV, sollicite du roi Louis XV la concession de ces terres.

En Conseil d'Etat, le 7 février 1 721, le roi accède à cette requête et "accorde aux doyen, chanoines au chapitre de la cathédrale de 'Vannes la jouissance à titre d'inféodation, d'un terrain inculte que la mer couvre de son reflux chaque jour, situé clans la paroisse de Séné. . . terrain accordé pour soulager une pauvre cathédrale. "
A.D.M(69 G 1)
L'annonce en est faite "aux prônes des églises des paroisses voisines dudit terrain" trois dimanches consécutifs afin de permettre à ceux qui s'y opposeraient: riverains et autres voisins, de faire appel de cette décision.
Ces "bannies" eurent lieu à Séné, ainsi qu'à Saint Patern et Noyalo, "les dimanches 18 et 25 mai et 1er juin 1721"
Voir A.D.M (69 G 1)


Un milieu favorable
Le choix des Chanoines s'expliquent aisément. Dans la presqu'île de Guérande, depuis le IXe siècle, l'industrie du sel était florissante.
En 854, le Comte de Vannes, Paskweten avait fait don aux religieux de Redon de terrains sis à Guérande pour y établir des salines.
Les moines de l'abbaye de Saint Sauveur de Redon et de l'abbaye de Prières exploitaient eux aussi depuis longtemps des salines en presqu'île de Rhuys et à Billiers
Le 4 novembre 1 725, cinq paludiers: Jullien Jaunais, Jacques Richard, Jan Le Heudé, Pierre Briant et Louis Landay venus de Saillé et de Batz sur mer, après "avoir vus et visités ledit terrain ", déclarent : "unaniment qu'il est propre pour faire des maraix salans et que les dits sieurs au chapitre ne peuvent faire une chose plus utile et plus avantageuse pour eux que de faire travailler incessamment à la construction des dits marais "
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Procès verbal fut rédigé en l'étude de Maitre Le Dréan, notaire royal à Vannes.Les paludiers déclarant" ne savoir signer" donnèrent procuration de signature à cinq vannetais présents. A.D.M ( 69G 1)

2 CONSTRUCTION DES SALINES

L'arpentage du terrain
Le 21 juillet 1723 la Chambre des Comptes de Bretagne désigne Maître Couradin pour procéder avec un arpenteur au mesurage des terrains sur lesquels seront construites les salines
Le 2 mai 1724, Messire François Bachelier chevalier, Seigneur de Bercy, Conseiller du Roi et les autres membres de la commission constituée à cette fin: Olivier de Kermasson, conseiller du Roi, substitut du procureur du Roy et maître Julien Le Simple, huissier ordinaire de la Chambre des Comptes de Bretagne, quittent Rennes pour Vannes. Ils y arrivent le 3 mai sur les sept heures du soir. A une distance d'une demi lieue de la ville ils sont accueillis par "les nobles et discrets messires Pierre Dondel et Hyacinthe Huchet chanoines " venus faire de la part du chapitre "les compliments de bienséance". Ceux-ci les engagent "à prendre place avec eux dans un carrosse venu à cet effet". Ils les conduisent rue Notre Dame paroisse du Méné où un logement a été préparé et où d'autres chanoines ":Messires Augustin de Langle, Joachim Eugène de Trevelec et Jean Baptiste Maurice "les attendaient pour leur présenter, eux aussi leurs civilités.
Le lendemain le 4 mai, Maitre Julien Le Ray greffier des juridictions des réguaires de Vannes, chargé de rédiger le procès verbal et Maitre Pierre Julien Moreau priseur et arpenteur au présidial de Vannes prêtent serment de "bien et fidèlement se comporter" dans leur mission et vers 8 heures, ils partent tous, accompagnés par l'un des chanoines Messire Jean Baptiste Maurice.

L'arpentage dura deux jours. Procès verbal de mesurage et de débomement de salines 3 et 4 may 1724
A.D.M ( 69 G 1 )

La construction proprement dite de 1 725 à 1742
La construction des salines ne commença pas immédiatement après l'ar¬pentage à cause de divergences de points de vue entre les chanoines. Certains étant semble-t-Il sceptiques quant au résultat de l'entreprise
En 1725, les notaires royaux à la demande de Mgr Fagon mettent en de¬meure le Chapitre de commencer les travaux.

Le 4 novembre 1725, afin sans doute de prévenir toute contestation ultérieure, les paludiers qu'on a fait venir de Batz sur mer et de Saillé déclarent le terrain propre à édifier des marais salants et procès verbal est dressé (voir plus haut).
Dès le 25 mai 1725 Julien Jaunais, Jacques Richard et Pierre Brian avaient été embauchés comme paludiers entrepreneurs pour un salaire mensuel de 25 livres chacun. En octobre 1725, ils furent rejoints par Gui¬gnolet Guénésan à qui on versa 2 livres pour le voyage de Guérande à Séné.
Ces entrepreneurs de marais étaient des paludiers chevronnés qui quittaient provisoirement leur exploitation pour aller ailleurs construire des salines.
Véritables architectes, ils devaient créer et modeler l'espace en fonction de l'état des marais préexistants et de nombreux paramètres: niveau des marées qui conditionne l'alimentation en eau de mer, orientation des œillets pour tenir compte de l'ensoleillement et des vents dominants, calcul de la capacité des réservoirs en fonction du nombre d'œillets prévus.
La quantité de sel produite sur une saline dépend de l'exactitude des observations faites sur les lieux : certaines salines seront plus productives que d'autres.
"Professionnel de fa saunaison, observateur méthodique, créateur et modeleur d'un espace nouveau, le paludier entrepreneur est à la fois technicien et artiste. Il doit également être un chef capable de diriger un grand nombre d'ouvriers."
Pierre Dalido (Cahiers d'Histoire Maritime du Morbihan N°23) :

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Un vaste chantier
De nombreux comptes tenus avec soin nous livrent une foule de renseignements et nous donnent ainsi une idée de l'importance du chantier.
"Compte que rend Monsieur Nebout tant en charge qu'en décharge des sommes qu’il a touchées par ordre de monseigneur l’Evesque de Vannes pour faire construire des salines dans le terrain que sa Majesté a accordé au chapitre dans la paroisse de Séné 1725 "
"Compte que rend Monsieur Nebout Chanoine des sommes qu’il a touchées du clergé par ordre de Monseigneur l'Evesque de Vannes pour la continuation des ouvrages des salines dans ce terrain que sa majesté a accordé au chapitre et ce depuis le compte qu’il a rendu au chapitre le 28 février 1727 "
"Registre des marchés fait pour la continuation des salines et payemens janvier 17 30 "

Pour débarrasser les marais de toute leur végétation, pour creuser les réservoirs (vasières et cobiers) pour "lever les fossés" (édifier les talus) et" les ponts " (petites diguettes -cloisonnant les salines et séparant les œillets, bassins où le sel se cristallise) , une main d'œuvre considérable a été employée, constituée de " journaliers " recrutés à Séné et dans les paroisses voisines.
Les appels d'offre étaient, sans doute, faits aux prônes du dimanche dans les églises et les chapelles.
Monsieur Julien Cougan, le curé de Séné, * est appointé par le chapitre et" reçoit 15 livres par mois pour veiller sur les ouvriers.
Le salaire des journaliers était de 8 sols pour la journée pour les hommes et de 5 sols seulement pour les femmes l**
* *En Bretagne, le curé est en fait le vicaire. Le recteur est Pierre Le Neveu
** Une bouteille de vin rouge coûte 10 sols, un bouteille de vin blanc 5 sols, un pain 5 sols ("Compte du vin que jay fait donner aux paludiers par ordre de monsieur l’Abbé Morice juillet 1731 "A.D.M 69 G 3
Sur une autre note: ''payé k 2 mais de bouteilles de vint blan et un costellest de larre 1 livre 5 sols 1730 "A.D.M ( 69 G 2)

Le salaire journalier sera porté à 10 sols en 1 738 (Compte de réparations faites aux salines 1738 A.D.M. (69 G 2 )

Le 23 juin 1725, pour une semaine, 934 livres furent payés pour" travaux de journaliers"
En comptant six jours de travail par semaine à 8 sols la journée, on peut estimer à 390 à 400 le nombre de journaliers travaillant certains jours sur les marais. •

Après les gros travaux de terrassement, on peut passer à la réalisation beaucoup plus technique et délicate des salines.
Cela se fait sous la direction des entrepreneurs de marais et de paludiers venus de Batz sur mer pour la plupart. Ces paludiers prirent ensuite en char¬ge l'exploitation des marais salants pour le compte du Chapitre.
D'autres corps de métiers intervinrent aussi: bûcherons et charpentiers:
Les réservoirs (vasières et cobiers) sont séparés de la saline proprement dite avec ses bassins de concentration (fares et adernes) et ses œillets par un talus que l'eau de mer franchit à travers un conduit souterrain.

Ces buses, qu'à Séné on appelait des tuits ou thuys (cui à Guérande), étaient:
-ou deux demi troncs d'arbres creusés à l'herminette et assemblés l'un sur l'autre et calfatés: "alloué de la somme de cent lires payée au sieur Danet suivant la quittance du 27 avril 1727 pour un tronc d'arbre de quarante pieds de longueur et de onze de grosseur pour faire deux tuits de vasière" *
A.D.M (69 G 2)

Pour les fabriquer, on alla chercher des bois jusqu'à Auray : "alloué de la somme de soixante quatorze livres payée le 30 avril à Jean ROZO et consorts charpentiers pour avoir exploité ledit arbre et amené d’Auray aux salines " A.D.M (69 G 2)
- ou des tuyaux de bois de section carrée et formés de 4 planches clouées les unes sur les autres
"alloué de la somme de cinquante deux livres seize sols pour huict planches de bordage de 2 pousses d'épaisseur et de 22 pieds de longueur pour faire 2 tuits pour la saline à six sols le pieds le 22e mars 172 7 "*
"alloué de la somme de huict livres payée à Danet le 5° avril 1727 pour la façon des dits tuits et avoir fourny les clouds,"
Dans les planches de l'extrémité des tuits des trous étaient percés et selon le débit d'eau souhaité, on obturait plus ou moins de trous avec des chevilles de bois
* un pied = 0, 325 m un pouce = 0,027 m 40 pieds = 13 m ; 11 pieds = 3,575m
22 pieds= 7, 15 m; 2 pouces= 5,4 cm

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Les tuits ou thuys (XVIII°siècle) (cui à Guérande)
Ce sont des buses de bois permettant le franchissement des talus qu’on appelle fossés à Séné.
A l’extrémité des tuits des chevilles de bois obturant les trous pratiqués dans les planches fermant le conduit permettent de régler le débit de l’eau.

f 21bSaline du Grand Daulan

3-PRODUCTION DU SEL

Comment produit-on le sel ?

" Pour mettre en réserve l'eau de mer qui est la matière première des marais salants que l'on appelle aussi saline, les paludiers ne la puisaient pas dans la mer. Ils profitaient des grandes marées. Quand la marée monte au plus haut, elle pénètre dans un long canal: l'étier, puis dans un grand bassin : la vasière. Une trappe, empêche ensuite l'eau de quitter la vasière pour redescendre dans la mer.
L'eau de la vasière n'est pas utilisée immédiatement. On la laisse décanter (les vases et les sables qu'elle contient se déposent au fond). L'eau passe ensuite dans les bassins plus petits: les gobiers, avec des petits murs en chicane, où les vases finissent par se déposer.
En ouvrant ou en fermant la porte de sortie des gobiers, les paludiers règlent l'entrée de l'eau de mer dans la saline quand ils en ont besoin. Une seule vasière peut alimenter en eau de mer plusieurs salines voisines.
Chaque partie de la saline est légèrement en contrebas de la précédente et l'eau s'y écoule sous l'effet de la pente. Mais de nombreuses chicanes ralentissent son écoulement.
L'eau parcourt un véritable labyrinthe aux parois d'argile, faisant le tour de la saline dans des bassins appelés fares.

Sous l’effet du soleil, la température s’élève et à cause de l’évaporation la concentration en sel augmente peu à peu.
Quand l'eau a parcouru tout le circuit des fares, elle est admise dans les adernes, réserves d'eau très salée, où elle se décante encore avant d'entrer dans des bassins plus petits: les œillets où le sel cristallise et est récolté. Sur chacune des séparations d'argile entre les œillets est ménagée une petite plate-forme d'argile. La ladure sur laquelle le paludier dépose le sel qu'il vient de récolter.
* un œillet mesure environ 6 mètres sur 9

La récolte du sel
La récolte du sel se fait en été, de juin à septembre suivant le temps qu'il fait.
Le soleil et le vent étant les forces nécessaires pour l'évaporation de l'eau, plus l'été est chaud, ensoleillé avec du vent, plus la récolte est abondante.
Le paludier fait le tour de l'œillet en poussant l'eau avec le las, le sel qui s'est cristallisé s'amasse devant son outil.
Le sel est ramené au bord de la ladure puis remonté. Il formera un petit tas que le paludier laissera égoutter avant de le transporter sur un gros tas, le mulon.
A la surface de l'eau, se forme une mince couche de sel blanc, plus fin que l'on appelle fleur de sel. Ce sel est cueilli à l'aide d'un autre outil, la lousse. Il est récolté à part.
Les marais salants bretons Bibliothèque de travail N° 944 Publications Ecole Moderne Française

Les outils du paludier à Batz-sur Mer :
Les noms de ces outils sont ceux employés à Batz-sur-Mer. Dans l'état actuel de nos re¬cherches, rien ne prouve que ces termes soient les mêmes que ceux utilisés à Séné.

Le paludier possède différents outils auxquels il donne des noms particuliers

Le las est l'outil le plus utilisé. Sa planchette présente un bord biseauté pour pousser le sel. Le paludier se sert de l'autre bord quand il tire le las au fond de l'œillet

1- la lousse à sel fin qui sert à cueillir la fleur de sel à la surface de l'œillet.

2- la cesse, écope à main utilisée pour vider l'eau des salines.

3- la lousse à ponter pour relever la va¬se et refaire la bordure des œillets.
4- le boutoué pour pousser la vase.

5- le las (rable ou rouable à Séné) au manche très long (5 m) qui permet de pousser ou de retirer le sel de l'œillet.

6- les salgaies, planchettes qui servent à ramasser le sel sur la ladure.

7- le batoué qui servait autrefois à tasser et lisser l'argile dont on recouvrait les mulons: les tas de sel, pour les protéger des intempéries.

Une production aléatoire :

Les paludiers récoltaient deux sortes de sel : La fleur de sel appelée aussi sel blanc, sel menu ou sel fin formée de cristaux légers et très fins flottant en larges plaques à la surface de l'eau et récoltée à l'aide d'une lousse à sel fin. Le sel gris ou gros sel se formant au fond de l'œillet remonté sur la ladure avec le las.

La production de sel est tributaire des caprices de la nature. La culture du sel ne durant au mieux que trois mois environ, quelques jours de pluie suffisent pour tout compromettre.
"Il y a des années où on ne faisait pas 50 kilos de sel. C'était très rare mais c'est arrivé. Ou en mi-saison après avoir fait 20 tonnes de sel tout d'un coup, un orage et le temps devient pluvieux et la saison s'arrête là parce qu'il y a trop d'eau douce qui vient avec l'eau salée donc ça ne donne plus de sel."
Témoignage de Ferdinand Quester
"Il a des années où il n’y a pas du tout de sel. S'il y a un brouillard, même le soir: j'ai vu des marais salants plein de sel: le brouillard est venu vers cinq heures. En une heure tout a été fondu. Il n’y avait plus rien
"Cinq années de rang, mes parents n'ont pas fait de sel à cause de la pluie"
Mme Le Goueff (Pénestin) recueilli par D Quéval et M Chouzier.

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Production de sel au XVIIIe siècle
Les quatorze chanoines du chapitre: MM Le Govello, du Bois, Boutouillic, Mercier, Maurice, Dondel, de Langle, Nebout, Ragot, Le Vallois, Huchet, Verdoye, du Clos Bossard, de Coëtlogon se partagèrent une partie des œillets des salines, chacun recevant en partage un nombre à peu près égal d'œillets. La récolte du sel en était à leur disposition.
Une autre partie des salines était réservée à la" mense capitulaire". La men¬se était le patrimoine collectif du chapitre dont les revenus lui permettaient de faire face à ses obligations : entretien de la cathédrale, frais d'ornements, de cérémonies etc ...
Les chanoines embauchèrent des paludiers pour exploiter leurs œillets. En 1 728 sur les salines déjà réalisées, Pierre Lino, Yves Le Calo, Jean Chapon, Loiseau, Louis Landet commençaient à tirer le sel.


En 1749 ils étaient 24 : Guillaume Uzel, François Mouilleron,  Mathurin Loiseau, Jan Landais , René Calo, François Régent, René Cadro, Nicolas Thomer,  Jan Chapon, Yvon Calo, Pierre Lino, Silvestre Le Duc, Aubin Richard, Yves Bourdic, Pierre Lacroix, Nicolas Laurent, Yves Landais, Jacques Calo, Paul Calo, Jacques Le Gars, Nicolas Chelet, François Le Duc, Thomas Clevet, Jan Le Cocq. Et près d'une quarantaine en 1 762.

Dès 1726 on se préoccupa d'être prêt à ramasser le sel comme le montre ce compte du chanoine Nebout.
"alloué de {a somme de six livres quinze sols pour quatre grandes gesdes et deux paniers pour porter le sel payée le 30 juillet 1726 "A.D.M 69 G 2
Il semble que c'est en 1726 qu'eut lieu la première récolte
Le" Mémoire Des Sels qui restent sur les fossés des salines de Messieurs du Chapitre de l'année 1728 suivant l'estimation qu'en ont faites les Paludiers " nous donne en mesure de Rhuys et en mesure du Croisic les quantités de sels récoltées. Au total 205,5 muids, mesure du Croisic, soit 616,5 tonnes.
un muid de Rhuys = 3 800 kilos ; un muid du Croisic = 3 000 kilos

Production de sel au XIXe siècle
Dans sa réponse à une enquête de la préfecture du Morbihan adressée le 20 octobre 1845, Mr Le Douarin, le maire de Séné signale que la quantité de sel existant sur les marais est de 197 muids dont 131 provenant de la récolte de 1845.
Le prix moyen auquel se vendaient les 1000 kilos de sel était de 50 francs. La même quantité était vendue 60 à 70 francs à Sarzeau et 80 francs à Carnac.

Au recensement de 1841 on dénombre 91 paludiers s'occupant de 10 à 56 œillets :
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Reconstitution d’un mouët, mesure à sel du XVIII° siècle
à partir d’un document graphique daté de 1767 et de textes de 1785 et 1798.

Le sel jusqu’à la fin du XIX° siècle se vendait non pas au poids, mais à la mesure. Le sel s’achetait au muid. Le muid était évalué grâce à une mesure de bois : le mouët. Le muid du Croisic valait 22 mouëts.
Le mouët était utilisé sur le marais salant. La mesure était sur « pieds » (pour la décoller plus facilement de l’aire de travail) ; le fond du cylindre était plus épais que les parois et il était soutenu par de solides longerons pour éviter qu’il ne ploie sous l’effet de la charge de sel (150 à 180 kg).

D’après Notes pour servir à la reconstitution d’un mouët » Gildas Buron.

Fin partie 1/2

 

 

Les registres de l'Etat Civil de Séné comportent des écritures "à portée historique" pour peu qu'on y prête attention. Ainsi, les actes de décès des Sinagots Jean Marie CORNOVincent BARRO et Alexis DANET retiennent l'attention de l'historien amateur. Le premier décède dans le port d'Oran alors qu'il était embarqué sur l'Edgar Quinet; Le second disparait en mer dans le Bosphore le 31/7/1922 toujours sur l'Edgar Quinet et le troisième à l'hopital Gulhané à Constantinople le 27 mars 1923. Leur proximité de date de décès et de naissance et leur localisation suggèrent des évènements en commun à la mort de ces trois soldats de Séné d'une même classe d'âge.

1922 CORNO disparu oran

 BARRO Vincent DECES

1923 DANET décès

Qui étaient-ils et dans quels évènements ont-ils perdu la vie ?

On va répondre à cette question en consultant les fiches d'inscrit martime au SHD de Lorient, les données du dénombrement de 1921, de vieilles coupures de presse et quelques documents ou illustrations trouvées sur Internet.

Un petit rappel historique s'impose pour comprendre ce qui amène la marine française près de Constantinople.

Turquie suite au traité de Sèvres 800

A la fin de la Première Guerre Mondiale, l'Empire Ottoman est défait. Le traité de Sèvres de 1920 redessine la possession des territoires en Anatolie et en Trace.

Cependant, ce traité n'est pas accepté par un général turc, Mustapha Kemal, dit Ataturk, le "Père de la Turquie"qui lève une armée et finit par imposer la nouvelle Turquie aux puissances alliées lors du traité de Lausanne en 1923.

Dans ce contexte, la France comme d'autres pays dépêche sur zone leur marine afin de mettre en sécurité leur ressortissants. L'Edgar Quinet est le navire-amiral de la 1ère division légère le 1er juillet 1920, formée avec le Waldeck Rousseau et l'Ernest Renan. Cette division est rattachée à l'escadre de la Méditerranée Orientale en 1921. Ces navires arriveront près des côtes d'Anatolie avec à leur bord deux de nos trois marins sinagots.

Jean Marie CORNO [17/09/1901 - 11/04/1922 ]

Vincent Louis Marie BARRO [24/09/1901 - 31/07/1922]

Alexis DANET [26/07/1901-27/03/1923]

 

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Jean Marie CORNO [17/09/1901 - 11/04/1922 ]

En effet, Jean Marie CORNO décède dans le port d'Oran, à bord de l'Edgar Quinet, quelques mois avant les évènements de Turquie. Que fait-il en Algérie au printemps 1922?

La fiche d'inscrit maritime de Jean Marie CORNO nous indique qu'il embarque le 6 mars 1922 à bord de l'Edgar Quinet, comme Vicnent BARRO. Ce fils de pêcheur de Cadouarn accompli sa conscription en 1922 comme ces deux camarades.

1921 CORNO Cadouarn famille

A partir des archives de l'Ouest Eclair on peut retracer la parcours du cuirassé Edgar Quinet. Le 1er avril, il est à Bordeaux où il embarque le Président de la République de 1920 à 1924, Alexandre Millerand [1859-1943] pour un voyage diplomatique au Maroc puis en Algérie.

1922 CRONO Edgar Quinet Millerand

C'est à l'arrivée dans le port d'Oran le 11 avril 1922, que le décès du marin Jean Marie CORNO est déclaré par les autorités militaires. Cette coupure de presse de La Dêpeche algérienner nous donne les circonstance du décès. O
1922 04 Oran Corno deces

Oran Hopital Baudens

 Vincent Louis Marie BARRO [24/09/1901 - 31/07/1922]

Vincent BARRO, quant à lui poursuit son périple sur l'Edgar Quinet. Ce natif du village du Gorneveze est bien recensé en 1921 avec sa famille nombreuse qui vit de la pêche.

1921 BARRO famille gorneveze

En juillet 1915, en pleine guerre, le jeune Vincent est mousse sur le canot Sire Le Roy et ensuite il devient novice sur Le Fête Dieu en 1917. Il y restera jusqu'à sa concription en 1921.

BARRO mousse novice

En septembre 1921, il gagne le 3° dépôt de Lorient avant de rejoindre Toulon où il embarque sur l'Edgar Quinet le 6 mars 1922.

1922 BARRO derniers jours

 edgard quinet

La presse d'époque rend compte de l'état de la flotte dans ces colonnes et permet de suivre indirectement les mouvements de l'Edgar Quinet.

Le 6/7/1922 : Il appareille de Toulon.

Le 9/07/1922 : Il se trouve à Constantinople.

Le 31/7/1922, Vincent Barro disparait en mer de Bosphore, sans aucun procès verbal n'ait été établi. Accident ou maladie?

Le 3/08/1922 : L'Edgar Quinet participe au sauvetage de la population d'un quartier de Constantinople, Kadikeui en proie à un incendie.

Le 4/9/1922 : Il appareille pour Smyrne.

Le 17/9/1922: l participe au sauvetage des réfugiés français avec le Jean Bart et le Trouville.

 Son jeune frère Jules BARRO {1912-1942], marin pêcheur, disparaitra en 1942 au large de Saint- Jean de Luz et sera déclaré "Mort pour la France".

Alexis DANET [26/07/1901-27/03/1923]

Le troisième de nos marins sinagots de la classe 1901, Alexis DANET nait au village de Canivarch. Au dénombrement de 1921, Mme Le Guillanton, est veuve et la famille vit de la pêche.

1921 DANET famille Canivarch

Comme de nombreux jeunes de la presqu'île, Alexis DANET devient mousse en février 1916 sur le canot Lion d'Or puis sur le Patern & Lucie. Avant sa conscription il est sur le Noëmie

DANET mousse novice

Il rejoint le 3° dépôt de Lorient en juillet 1921 et il embarque le 16 janvier 1922 sur l'Edgar Quinet. Le 6 mars 1922, il est rejoint par Vincent BARRO et jean Marie CORNO. Ce dernier décède dans le port d'Oran le 11 avril 1922 et Vincent Barro, le 31 juillet 1922, dans la mer de Bosp^hore. Alexis DANET demeure sur l'Edgar Quinet jusqu'au 23 novembre 1922, quand, dans le port de Constantinople, il rejoint le Wladek-Rousseau. 

1923 DANET derniers jours

 

DANET Rousseau Waldek 

Alexis DANET, sur l'Edgar Quinet participera au sauvetage des réfugiés de Smyrne les 13-14 septembre 1922.

https://www.youtube.com/watch?v=-6YYy9PAee8

Sur cette vidéo de Pathé on distingue les cheminées de l'Edgar Quinet aborant le drapeau français. Le navire, commandé par Eugène Marie Joseph MORRIS (1875 - 1947), accueille des ressortissants français établis à Smyrne et des réfugiés, surtout arméniens, fuyant la ville de Smyrne en proie aux flammes. Il fera deux voyages et débarquera les Arméniens à Marseille.

You tube Incendie Smyrne bateau FR

Sur cette photographie parue dans L'Illustration, on distingue au second plan l'Edgar Quinet qui va recueillir les malades et les soeur de La Charité fuyant Smyrne sur une chaloupe.

 

1922 Smyrne evacuation

 

 

fire103

Ces sites internet rassemblent plusieurs photographies de cet évènemlent tragique pour les populations.

http://www.levantineheritage.com/fire.htm

http://geckal.blogspot.com/2010/11/oncesi-sonrasyla-1922-izmir-yangn-ve.html

A bord du Waldek-Rousseau, Alexis DANET récupèrera les passagers du navire-hôpital Vinh Long évacués après l'incendie du 16/12/1922.

Au matin du 16 décembre 1922, Vinh-Long se trouve en mer de Marmara en route vers Constantinople. Il a à son bord 495 passagers civils et militaires. Brutalement, un incendie éclate à bord et s'étend rapidement à tout le navire, se transmettant de magasin en magasin.

Le 27 mars 1923, il décède à l'hôpital de Gulhané à Constantinople, sans que l'on sache ce qu'il advint de son corps, probablement enterré à Constantinople dans un carré militaire...

DANET Hopital Gulhané

 

 

 

 

Article du bulletin municipal décembre 2005, complété et illustré.

n68 2005 12 Port Anna 1947 peinture

A l'origine, une anse de vase et de rochers

Le lieu dit Port-Anna était auparavant une anse ouverte sur le goulet de Conleau et exposée aux vents d'ouest. Le sol, vaseux et sableux, était parsemé de quelques têtes de roches.

1844 Le port blanc

La cadastre de 1844, nomme cette anse en bas de la butte de Bellevue, "le Port Gwen". De vieilles cartes illustrations montrent l'anse à ses origines.

1923 Port Anna Frelaut

Anse de Barrarach, on devine le Corps de Garde des Douaniers

Jean FRELAUT 1923

1923 Frélaut Baie de Langle Port Anna

Anse de Port-Anna - Jean Frélaut 1923

Port Gwen archives

 

00 5331s

Anse Port Gwen

La DRAC de bretagne, rapport qu'en 1885, il n´existe au lieu-dit Port-Anna qu´une mauvaise chaussée en pierres sèches réalisée par les marins pour débarquer le bois et les denrées nécessaires aux habitants des écarts situés à l´extrémité occidentale de la presqu´île. Néanmoins, la pente abrupte qui y mène empêche l´accès aux charrettes et l´anse ne permet pas l´abri sécurisé de nombreuses barques. Les pêcheurs multiplient donc les pétitions pour que la commune améliore le site et, en 1946, le projet d´un port est lancé.

Cette vue aérienne du goulet de Conleau en 1952, nous montre le bout de la presqu'île dépourvu de construction et l'anse de Port Gwen encore intacte.

Port Gwen 1952

Port Gwen aérien

Rien à voir avec les sinagos

Dans un article de mai 2011, Jean Richard nous précise que Port-Anna est à dissocier le l'âge d'or des Sinagos.

"Contrairement à ce que beaucoup imaginent, Port-Anna n'est pas lié à l'histoire des sinagos. Son aménagement n'a été réalisé qu'en 1953, alors que ces voiliers traditionnels avaient quasiment déjà disparu. C'est le maire Alphonse LE DERF, qui travaillait aussi à l'Equipement, qui l'a voulu pour abriter les pinasses des pêcheurs", témoigne Jean RICHARD, ostréiculteurs en retraite, installé de longue date à deux pas du port. "Auparavant ce n'était qu'un mouillage naturel, un trou de vase entre des rochers, dans lequel venaient s'échouer quelques sinagos. Mais l'essentiel de la flottille des 847 sinagos construits depuis 1848 a toujours mouillé à l'abri, à Langle, Cadouarn, Moustérian et Montsarrac."

Port gwen cahute

L'article en vedette, paru dans le Ouest Eclair daté du 23 avril 1910, indique qu'avant la première guerre mondiale, les pêcheurs sinagots se lamentaient déjà du peu d'aménagements dont disposait leur littoral. Cependant, l'entreprise La Gilardaie, qui extrait des potasses à La Garenne a fait construire une cale autour des années 1860; à Montsarrac, la cale du passage daterait des années 1880 et près de Conleau, la cale de Barrarach est construite dans les années 1890. Cependant ces cales sont loin des zones d'échouage habituelles et des villages des pêcheurs et marins sinagots. La cale du Badel est réalisée entre 1905-1910. (Lire article sur le Petit Patrimoine).

C'est après la seconde guerre mondiale, avec l'avènement de plus gros bateaux à moteur que la nécessité de cales plus grandes devient criante. Après guerre, la partie la plus importante de cette flottille loge encore le long de la presqu'île de Langle, protégée des vents de Bellevue en remontant vers Moustérian et Montsarrac.. Elle regroupe les pêcheurs de Bellevue, le Meniech, Langle et Canivar'ch qui fréquentent les eaux du Golfe et de la baie de Quiberon. L'ensemble comprend, avec les petites embarcations, une cinquantaine de barques de pêche. Le problème crucial qui se pose est celui de l'inaccessibilité au littoral et les difficultés de déchargement des marchandises en "eaux profondes". D'où les doléances continuelles des pêcheurs auprès de la municipalité pour obtenir des installations portuaires convenables.

Les maires successifs à l'origine du projet

Sene Le Derf Euqipe

Le maire de l'époque, Eugène BENOIT, élu à la Libération (maire de 1945-1947), réunit son conseil municipal qui décide de demander aux Ponts et Chaussées, un projet de construction d'une cale. En septembre 1946, le député communiste de Lorient, Louis GUIGUEN écrit au Ministère pour obtenir la construction d'une cale à Port-Anna.

1946 09 Port anna

Ceux-ci étudient l'affaire, la trouvent justifiée, mais le coût atteindrait au moins 500.000 francs et ce projet, étant d'intérêt local, devrait être pris en charge en totalité par la municipalité. Le conseil conclut alors que la commune ne peut supporter une telle charge et le projet est donc abandonnée.

Les années passent, les mêmes problèmes demeurent, s'intensifient même, car le nombre de bateaux augmente et la motorisation se développe. Le projet refait surface en 1952-53, sous le mandat d'Olivier TAMAREILLE (maire de 1947-1953), mais ce n'est que le 27 juin 1954 que le conseil municipal, réuni sous la présidence d'Alphonse LE DERF (maire de 1953-1967) accepte de lancer les travaux qui sont estimés par les Ponts & Chaussées à 5.880.000 francs. L'ensemble comprend la construction d'un môle et d'une cale ainsi qu'un mur de soutènement bordant le port. Ces travaux seront accompagnés de l'aménagement du chemin d'accès et du terre-plein ainsi que la reconstruction du mur de la propriété de Mme Normand.

Cet article de La Liberté du Morbihan, datée de juillet 1955 annonce la construction par l'entreprise Grolleau de Vannes d'un quai et d'une jetée ainsi que d'un môle qui recevra ensuite la pompe à gasoil .

1955 07 26 1b

Le financement sera assuré de la façon suivante : Emprunt de 4.000.000 de francs par la commune...Subvention de 747.000 frs du département...Prélèvement de 830.000 frs sur le sfonds libres du budget communal de 1955. Le Préfet donne son autorisation. Onze entreprises sont pressenties; quatre seulement soumissonnent. Le conseil municipal, réuni en assemblée extraordinaire le 5 juin 1955, accepte la soumission de l'entreprise SAEG (Société Armoricaine d´Entreprises Générales) de Vannes pour la somme de 4.186.376 frs.

Objet de l'entreprise :

-construction d'un môle de 24,10 m de long et 2 m de large. Il protègera, côté du large, la cale prévue.

- une cale de 33,50 m de long et 3 m de large avec pente de 0.10m par mètre et un secteur en palier de 5 m à son extrémité.

- construction d'un mur de soutènement de 26,75 m, protégeant le terre-plein et la partie basse du chemin (accès côté mer); plus un mur de 8 m côté intérieur pour soutenir la cale.

Les travaux commencent immédiatement et seront terminés le 9 février 1956. Des travaux complémentaires, qui n'étaient pas préuvs, ont alourdi la note, qui s'élève définitivement à 6.132.184 frs. Mais le département accorde une subvention de 1.400.000 frs. Cet article de Ouest-France daté de juillet 1961, illustre les travaux de desenvasement du port et site l'aménagement de la partie centrale.

1961 07 Ouest France CP

Port Anna avant garage

Sur cete vue extraite d'une carte postale Lansol (Musée de Bretagne) on distingue la cahute des douaniers qui n'est pas enocre cachée dans les arbres qui vont grandir. Le môle de Port-Anna est construit mais aucun batiment n'est encore érigé sur la quai principal.

A cette même époque, le peintre américain Trafford Partridge KLOTS (1913-1976) vit à Rochefort en Terre et vient souvent sur le littoral de Séné poser son chevalet comme en témoigne cette toile intitulée Port Anna.


Klots vue Port Anna

Le garage du mécanicien de marine sera le premier, suivi par les box-garages pour les Ildarais, puis le bureau du port.

Vue ancienne de Port Anna à la fin des années 1950 2

1975 Port Anna Motul Peche

Débarquement de poisson près de la station de gasoil MOBIL (Bulletin paroissial)

On reconnait sur cette photo les garages réservés aux habitants de l'Île d'Arz et à leur droite les Etablissement Lucas, réparateur de moteurs de bateaux. A gauche la digue avec la station de gasoil. La cuve etant sous la construction sur le quai. Au second plan, le paysage n'était pas urbanisé...(lire aussi article Pascaline et les garages de Séné).

Port Anna avant 3

Sur cette carte postale ancienne, les arbres ne sont pas encore haut sur la butte

et la cale nord-est n'est pas élargie.

Suite des travaux d'aménagement :

Malgré ces travaux déjà entrepris, il est indéniable de devoir poursuivre l'émangement du port. Au cours du conseil municipal du 24 juin 1973, Albert GUYOMARD (maire de 1971-190) envisage de proceder en urgence au dragage du port, à la surélévation de la cale Nord Est et à la contruction d'un gril de carénage. Dès le 24 mars 1973, les travaux de dragage sont confiés à l'entreprise Voisin pour enlever 2300m3 de vase. Le devis s'élève à 41.745 frs.  La cale NE est un ouvrage conçu entre 1973 et 1975. Elle mesure 21,50 m de long et 8 m de large. Elle est appelée à supporter pratiquement tout le trafic pêche du port. Le gril de carénage est quant à lui réalisé par l'entreprise Evain pour un devis de 36.750 frs. Les travaux débutent le 17 mars 1977. Le gril aura une longueur de 15 m et une largeur de 22,50 m et sera accolé le long du môle.

1977 Port Arradon

Vue de Por-Anna en 1977 (Poster-Ti-Anna)

Le port commence à prendre forme, mais la situation n'est pas encore satisfaisante, car la cale n'est pas accessible à marée basse. le 12 septembre 1980, le conseil municipal décide de réaliser des travaux d'aménagement, estimés à 900.000 frs. Le devis comprend l'amélioration des profondeurs du port aux abords de la cale par dragage et déroctage, diminution de la pente de la cale tout en surélevant et réalisation d'une chausée d'accès à la côte. Il faut donc remodeler les ouvrages existants et aménager une voie d'accès protégée côté port par un mur. Le conseil retient l'offre de l'entreprise Fougerolle et les travaux débutent en août 1952.

Port anna batreaux 8

1985 09 Bureau Port

En 1985, les bureaux du port son inauguré sous le mandat de Francis POULIGO.

Port Anna vue

Port Anna croquis

Port Anna 2014

Port Anna cale gasoil

Port Anna echouage quai

 D'autres travaux furent entrepris par la suite, tels des dragages et des installations de mouillages. C'est ainsi que le port est devenu ce qu'il est aujourd'hui. D'une anse sauvage et marine, les aménagements successifs ont permis la réalisation d'un port apte à accueillir les activités maritimes de Séné qui, comme nous le rappelle Jean Richard, ont fortement changé au cours des ans.

Longtemps Port-Anna n'a été que le seul point de ravitaillement en carburant pour les bateaux de travail. "On comptait une vingtaine de pinasses de Séné mais on y venait aussi de Sarzeau, l'Île aux Moines ou Arradon. Le samedi matin, il y avait souvent la queue pour les pêcheurs qui préparaient leurs chalutiers pour partir tôt le lundi matin. Il a fallu agrandir l'embout du tuyau pour accélérer le débit de distribution ! Ça rapportait une belle redevance à la commune" se souvient le retraité de 74 ans, écrivain à ses heures.
En 2011, Port-Anna abritait moins de dix bateaux qui pratiquent successivement la pêche à la morgate, au rouget, à la crevette, à la coquille Saint-Jacques et à la civelle. "Certains ne sont même plus basés à Séné car avec la hausse du carburant ils partent directement de Quiberon et Saint-Jacques, à Sarzeau, sur leurs lieux de pêche. En fait, selon Jean Richard, ce sont les ostréiculteurs qui sont devenus les utilisateurs les plus réguliers du port".
Hier, la commune en recensait près d'une centaine mais aujourd'hui, il ne reste plus qu'un ostréiculteur du cru. Une dizaine de Charentais a pris la relève. "Les concessions ont été rachetées par des professionnels de Marennes-Oléron. C'est là-bas qu'ont lieu les captages, les huîtres sont ensuite élevées dans le Golfe du Morbihan, avant de repartir en Charente-Maritime pour être affinées. Elles ne sont donc plus tirées sur la cale de Port-Anna dans les années soixante l'activité de transport y est importante."

En 2018, Port-Anna ne compte plus guère d'activité maritime. Les pontons abritent encore quelques bateaux pour la photo; Les quais accueillent la traditonnelle Fête des Voiles Rouges; Les ostréiculteurs fréquentent encore le lieu. La pêche à la morgate survit toujours; La cale est aussi un point d'accès au Golfe du Morbihan prisés par les plaisanciers, les nouveaux marins Sinagots.

Garages Bureau Port Anna

Demain, la création d'une "Maison du Port" en lieu et place des garages et du local du port, va consacrer l'usage touristique et patrimonial de ce lieu jadis tourné vers les activités maritimes.

SENE MAISON DU PORT Perspective 1web 960x638

Le projet au mois d'aout 2020 est très différent de celui envisagée. L'accès au toit a été supprimé et Ty Ana n'offre plus de terrasse sur le Golfe. Le restaurant géré mar Neo Restauration offre cependant une carte simple et de qualité ainsi que la dégustation d'huitres de Séné, avec une vue imprenable sur le goulet de Conleau.

2020 Aout Ty ANA

 

 

 

 

On le sait, l'île de Conleau, bien que située sur la commune de Vannes, séparée de la presqu'île de Langle par un goulet parcouru par de forts courants, n'en reste pas moins très familière aux Sinagots et un lieu intimement lié à leur histoire.

1883 Passage sur Conleau Passeurs

Le goulet de Conleau et la Baie de Séné.

Notez la pointe des Trois Sapins

Jadis, les passeurs de Conleau - en fait pour la plus part des marins et des pêcheuses de Séné - faisaient passer de la butte de Bellevue à la plage de la Grenouillère nombre de pêcheurs allant vendre leur poisson au marché de Vannes, nombre de promeneurs venant découvrir le littoral de Séné, et nombre de spectateurs qui accouraient voir les fêtes nautiques.

Régates de Vannes, régates de Conleau, régates de Boëdic, plusieurs courses nautiques furent organisées entre Conleau (Vannes), Roguédas (Arradon), Boëdic (Séné) et l'île d'Arz.

En plusieurs volets, nous essaierons de démêler et de parcourir plus de 150 ans d'histoire de yachting à Vannes et dans le Golfe du Morbihan.

1854-1857: Les premières Régates de Vannes; les toutes premières, le 20 août 1854

1865-1880:  La création de la Société des Régates de Vannes le 23 avril 1865; les 1ères Régates de Conleau, le 4 juillet 1878

1886-1914: L'Âge d'Or des Régates:  : de leur reconstitution le 4 février 1886 à la 1ère Guerre Mondiale

1919-1939: Les régates dans l'Entre-deux-Guerres: 

Depuis leur naissance, alors que des marins français se battent en Crimée, et jusqu'à la Libération, les régates à Vannes, vont s'interrompre à plusieurs reprises comme on va le découvrir. Entre 1857 et 1865, pendant la guerre contre la Prusse en 1870, entre 1880 et 1886, et pendant les deux guerres mondiales.

Les premières Régates de Vannes (Conleau-Boëdic)

On ne le redira pas assez, le travail de numérisation de la presse ancienne, réalisé par les Archives du Morbihan est d'un précieux recours pour l'historien local.

Les premières régates : 1854 à 1857 :

1854 08 Regates annonce

En ce temps-là, la France est un Empire dirigée par Napoléon III. Depuis octobre 1853, La France et l'Angleterre, alliées à la Turquie freinent en Crimée l'expansionisme russe. Napoléon III a développé sa marine qui amènent des fantassins et des marins en Bulgarie puis qui débarquent en Crimée. Une vingtaine de jeunes marins de Séné mourront du choléra sur leur bateau ou périront noyés dans le naufrage de la Sémillante le 16 février 1855 dans le détroit de Bonifacio. Quant à la Guerre de Crimée, elle finira en 1856.

Embarquement des troupes TOULON

En Europe, venant d'outre-Manche, le yachting se développe. La Société des Régates du Havre est crée en 1842 et les premières régates à la voile eurent lieu le 18 août 1840.

1841 Regate Le Havre CP

Régates au Havre
Antoine Léon Morel-Fatio [1810-1871]
1841-hst Musée des Beaux-Arts de Morlaix en dépot au Musée Natioanl de la Marine à Paris.

Ce nouveau sport va se répandre sur les côtes françaises et bretonnes. A l'orée des années 1850, plusieurs ports de Bretagne organisent des régates comme Brest, Saint-Malo, Morlaix, Lannion (1851), Cancale, Tréguier, Roscoff...Il faudra attendre 1854 pour des regates soient organisée à Vannes.

1853 Regate Morbihan

Les premières courses nautiques à Vannes datent du dimanche  20 aout 1854 et se compose de 4 courses plus une course dite des "vainqueurs". Elles sont annoncées dans la presse.


1854 08 Regates commissaires

L'article nous donne également le noms des commissaires qui les organisèrent. Il ne parle pas encore de la Société des Régates de Vannes qui sera fondée plus tard. Vannes compte déjà avec la Société Polymathique du Morbihan crée en 1826 et la Société des Courses (hippique)  fondée en 1843 s qui est à l'origine de l'hippodrome de Cano à Séné.

Les commissaires fondateurs : 

Président, M. le maire de Vannes : François Jollivet de Castelot [1/9/1821-6/6/1854] était maire de Vannes sans doute lors de la génèse du projet. Suite à son décès, son adjoint, Jean LALLEMENT [1802-1872] sera élu maire et assurera la présidence des commissaires.

Vice-Président, Louis Etienne LE CARPENTIER [18/12/1808 - ], Commissaire de Marine

Secrétaire, et trésorier, Jules AVROUIN-FOULON [5/2/1829-5/1/1908] jésuite, fils de Charles Gatien AVROUIN FOULON, [28/05/1790-22/08/1860] Receveur Général des Finances du Morbihan 

Marie Albin MAGNIER de MAISONNEUVE [28/8/1810 - Strasbourg - 13/8/1864 - Vichy], Inspecteur des Douanes

Paul Marie Thomas PELLE DE QUERAL [9/9/1805-13/5/1874], médecin à Vannes

GREGOIRE, à identifier,

MONTFORT, à identifer.

1854 Regate Arz Boedic DEBUT

Cet article du Courrier du Morbihan indique que ces régates du dimanche 20 août 1854 se déroulèrent sur la plan d'eau entre l'Île d'Arz et l'ïle de Boëdic. Le journaliste précise qu'il s'agit "d'un nouveau plaisir offert aux habitants de Vannes et qui leur est inconnu", soulignant qu'il s'agit bien des toutes premières régates organisées à Vannes.

1854 08 Regates Courrier 56

Cette première édition fut un succès : Ces régates, les premières qui aient été organisées à Vannes, ont eu lieu dans le Morbihan, en face Roguédas, et ont été inaugurées par un grand concours de bateaux qui s'y sont disputé les prix, et par une affluence très considérable de curieux, soit de la ville, soit des communes du littoral. Un temps superbe et la beauté du site où avaient lieu les courses ont fait de ces joutes un spectacle magnifique, dont tous les assistants ont été parfaitement satisfaits, et qui encouragera, nous n'en doutons pas, Messieurs les commissaires qui ont si bien réussi cette fois, à renouveller chaque année une fête aussi attrayante".

Ce premier compte rendu paru dans le Courrier du Morbihan en août 1854, indique que les courses se déroulent au large de Roguédas en Arradon, non loin du Manoir de Roguédas, propriété de Charles AVROUIN FOULON. Les régates de Vannes comportent une course à l'aviron et 4 courses à bateau à voile.

Dès la première édition, les marins de Séné disposent d'uné épreuve réservée aux bateaux aux voiles ocre. Le Franc, patron du Léopold, Rolland, patron du Requin, Doriol, patron de la Pérote, Danet, patron du Saint-Marc et Loiseau, patron du Saint-Joseph, remportent des prix. Il n'y a pas encore de courses à la rame où les pêcheuses et pêcheurs de Séné viendront rivaliser d'efforts.

Bien que cet Annuaire Français de 1899 précise que la Société des Régates de Vannes fut crée en 1855 et disparut quelques années plus tard avant d'être à nouveau reconstituée en 1886. En fait, il en fut autrement. Ces premières régates furent organisées par la mairie de Vannes avant que ne soit fondée la SRV.

1899 SRV création

Malgré leur très bon accueil à Vannes dès 1854, elles vont subir rapidement une première interuption.

1865 Regates Refondation

Cet article du Journal de Vannes, daté du 22 avril 1865, donne l'origine du premier arrêt des régates à Vannes, "la chute d'une famille qui en avait pris l'initiative". On pressent, la ruine ou la faillite d'un mécène fortuné, amateur de yachting à ses heures perdues et membre fondateur de la première organisation  des régates.

Mais qui était-il? Qui furent les initiateurs des toutes premières régats à Vannes?

1865 Société Regate refonder

Cet autre article situe l'arrêt des premières régates à la fin de la décennie 1850-1859. En recherchant sur le site des archives du Morbihan, et sur cette année 1858, on trouve un grand nombre de faillites d'entreprises dont celle de Charles Gatien AVROUIN FOULON, Receveur Général des Finances du Morbihan [28/05/1790-22/08/1860], banquier qui fit banqueroute peut-être suite à la crise financière américaine des années 1850...Plusieurs indices plaident en faveur de cette hypothèse.

Afin de rembourser ces dettes, ses biens furent vendus et aux côtés de sa propriété de Roguedas, là où étaient accueillis les officiels, figurait des embarcations comme nous le précise cet article de presse, notamment un bateau du nom de La Perle, qui barré par son autre fils Maurice Louis AVROUIN FOULON, gagnat des courses lors de ces premières régates à Vannes.

1859 Avrouin faillite bateaux

Jusqu'à la faillite de Avrouin, à 4 reprises, de 1854 à 1857, des courses nautiques à Vannes se déroulèrent au large de Conleau et Séné et en face Roguédas en Arradon, Le goulet de Conleau offrant un amphithéâtre maritime propice pour l'accueil des spectateurs.

Parmi les premiers adeptes du yachting à Vannes, on note les propriétaires de bateaux, Avrouin, De Quéral et Raison.

1855 Vannes Regates Roguedas

L'édition suivante, se tiendra le 9 septembre 1855 au large de la pointe de Roguédas. Le compte rendu de l'édition du dimanche 31 août 1856 offre plus d'informations. Plus d'une trentaine de marins sinagots participent à la 3° courses qui leur est réservée. Entre Vannes, Moréac-Roguédas, Barrarach et l'Île d'Arz, et bien que l'île de Conleau ne soit pas encore raccordée au continent [lire l'histoire des Passeurs de Conleau], il est fort à parier, que des marins de Séné assuraient pour ces régates, le passage des spectateurs venus en nombre assister aux courses nautiques.

1856 Regates Vannes Sinagot

Arradon Château Roguedas

La 4° édition des régates, le 30 aout 1857, sera tout aussi réussie, si on en croit l'article paru dans le Foyer breton :

"Ce jour-là Roguédas ouvre à la foule accourue de Vannes et de tous les points de la côte, son parc, ses jardins, sa chapelle et ses terrasses, d'où l'on domine la vaste nappe du Morbihan, que sillonne des centaines d'embarcations : canots, barques, sinagots, forbans, chaloupes, chasses-marées, sloops, etc..C'est un spectacle féérique, un point de vue que Meudon, Saint-Cloud, Versailles, ces royales demeures, paieraient fort cher et envieront toujours . "J'ai vu bien des régates; je n'ai jamais rencontré plus beau bassin". Et ces paroles étaient accueillies par un assentiment général. La foule courronnant la pelouse et les terrasses de Roguédas; bon nombre de spectareurs, demeurant sur leurs embarcations, afin de jouir de la fraîcheur d'une très légère brise de mer, étaient venus prendre place entre les terrases de laquelle M. Le Carpentier, commissaire de la marine, présidait à la joûte. A gauche, se dessinait la côte de Séné, l'île de Boëdic; à droite se montrait la côte d'Arradon et les hauteurs de l'ïle aux Moines; en face, dans le lointain, se confondaient avec l'eau les terres basses de l'ïle d'Arz; sur le tout s'étendait l'azur du ciel à demi-voilé par de legers nuages, semblables à une gaze semi-transparente, étendue pour préserver spectareurs et acteurs des rayons ardents du soleils d'août."

1857 Vannes Regates

GOLFE du MORBIHAN VANNES la CATHEDRALE PROMENADE 57

En décembre 1858, le banquier Charles AVROUIN FOULON, receveur général du Morbihan, sera jugé par le Tribunal de Vannes et la faillite personelle est prononcée. Durant toute l'année 1858, on réussira à masquer l'affaire d'autant que la Bretagne reçoit en août la visite de l'Empereur Napoléon III.

1858 08 Fete Venitienne Port

Le 15 août 1858, Napoléon et l'impératrice Eugénie arrivent à Vannes en provenance de la basilique d'Auray. On organise une Fête Vénitienne au port.1858 08 avrouin legion

Ironie de l'histoire, Charles AVROUIN-FOULON sera parmi les promus à la légion d'honneur à l'occasion de la venue de l'Empéreur à Vannes. Il quittera la ville et décède à Nantes le 28/8/1860. 

On ne retrouve pas d'article parlant de régates sur le site des Archvies du Morbihan pour cette année 1858 et les suivantes jusqu'à 1865. Après la visite de l'Empereur, parmi les notables vannetais, l'heure n'est plus à la dépense, d'autant que la ville de Vannes a perdu de l'argent dans la faillite du receveur général. L'émotion suscitée par cete faillite, au sein de la communauté de la belle plaisance de Vannes, mettra plusieurs années à se dissiper.

En 1865, une nouvelle équipe fera renaitre les régates organisée cette fois par la Société des Régates de Vannes.

 

 

 

 

 

 

 

 

HISTOIRE DES POMPISTES & GARAGISTES de SENE

1980 mai Garage Bourg Sene

1-AU BOURG, dans les années 1970, Pascaline était la seule "distributrice d'essence", comme l'indique l'officier du recensement.[lire l'article Pascaline nous a quitté] Après son décès vers 1978, M. Gilbert AMISSE, qui était garagiste "multimarques" au moulin de Cadouarn depuis une dizaine d'années, rachète la pompe de Pascaline au bourg qu'il gère avec sa femme. Au début des années 1980, il décide s'établir dans de nouveaux locaux près du cimetière. Il devient agent Renault et il y transfère la "pompe à essence". Il vend alors des carburants SHELL. 3-4 ans plus tard, son affaire est reprise en gérance par le concessionnaire Renault, la SVDA (Sté de Vente de Vehicule Automobiles). Après son décès en 1993, son épouse gardera un temps la vente de carburant, comme Pascaline !

Renault Mounier Chassagne

Renaul Elan Bourg

Paul MOUNIER se propose de reprendre le garage. Il reste 2-3 ans près du cimetière avant que cette parcelle ne laisse place à un nouvel lotissement. Il fait va alors établir son garage Renault à Kergrippe où il distribue des carburant ELF. Après que TOTAL ait fusionné avec le groupe ELF, il prend l'enseigne TOTAL. En 2006, à son départ en retraite, M. CHASSAGNE reprend le garage. Depuis 2009, le garage Renault est géré par Philippe GUEHO. Entre temps, Renault  n'entretient plus de lien avec les groupes pétroliers. TOTAL reconfigure son réseau de stations services ce qui conduit M. GUEHO à se rapprocher de l'autre enseigne du groupe TOTAL, la marque ELAN.

A l'automne 2021, le garage n'est plus un agent Renault mais il rejoint le réseau Eurorépar.

2021 11 garage Euroerepar

Garage AD Armor Auto

On peut citer également la garage Armor Auto, du réseau A.D. installé depuis 1999, au 181 rue Jean Jaurès à Vannes et bien connu des sinagots.

1962 BALACON garage mobylette

Jean Marc AMISSE se souvient : au bourg, à l'angle de la Place Coffornic, il existait un mécanicien M. BALACON qui vendait du mélange 2 temps à sa pompe et réparait les "Mobylettes" et cyclomoteurs. L'artisan mécanicien et sa famille sont pointés au recensement de 1962.

Avec l'engouement pour le vélo, un spécialiste de la bicyclette et des vléo s'est installé au Poulfanc.

SENE Velo Cycles Expert

2-SUR LA ROUTE DE NANTES, "côté impair"  il y avait un flux important de véhicules. On a compté depuis la limite de Vannes et jusqu'au carrefour du Poulfanc, pas moins de 7 emplacements pour des stations-services. Il y avait une station près de l'étang au Duc, la garage Poulichet à la marque SHELL; ensuite au n°56 avenue Herriot, il y avait une station FINA à Vannes. Plus loin, on trouvait en entrant à Séné, le garage ANTAR au n°15, puis la station ESSO au n°29, on arrivait au n°35 avec sa station SHELL et n°47 existait une dernière station TOTAL, dite "le petit TOTAL" avant celle plus récente au quartier Saint-Laurent.

1965 Station Grenouilleres

Vue aérienne Route de Nantes-1965 à sa jonction avec Vannes.

Dans le film de Bertrand Moisan, réalisé en 1964, le "Dernier Sinagot", on a quelques images de la portion sinagote de la Route de Nantes. On y distingue les deux stations services ANTAR et ESSO.

1964 Rte Nantes 2

Au n°15, la station service "Le Relais des Vénètes", était tenue par Claude HONNART [1928-1993] qui distribuait les carburants ANTAR.  Cette famille originaire des Ardennes avait fuit l'avancée allemande pour trouver refuge dans la Sarthe; Après guerre, le grand-père Jules HONNART était garagiste-pompiste près de la Flèche. L'un de ces enfants repris le garage sarthois et l'autre trouva une opportunité près de Vannes où il arrive avec sa femme en 1953.

1952 Garage ANTAR

Le 10 août 1953, ce souvient Mme Honnart. Cette première station-services avait les pompes à même la rue. Vers 1960-61, une deuxième station, LE RELAI DES VENETES, est établie en retrait de la route de Nantes. En 1962, la famille vit à côté du garage et elle emploie un mécanicien.

Antar Honnart Rte Nantes 2
1962 Honnart Landorny

1990 xxx Garage Honnart

1990x Garage Honnart

1990x Garage Honnart

1985 avril station

En 1985, comme le montre cet extrait du bulletin municipal, le Relais des Vénètes de M. Honnart, était toujours en concurrence avec la station FINA avenue Herriot à Vannes.  

1985 Garage Honnart

En 1993, lors du passage du Tour de France, les courreurs arrivent des Sables d'Olonnes part la Route de Nantes. En face le magasin de véhicule d'occasion Renault, l'ancienne station ANTAR est passée sous l'enseigne ELF.(Image Eurosport)

1993 TOUR séné 5 ELF Renault

Claude HONNART va prendre sa retraite et fait l'objet d'un article dans la Liberté du Morbihan, avec un sous-titre plein d'humour de la part du correspondant du journal. Toujours dynamique, il transfère son garage vers le centre commercial du Poulfanc, qui vient de se créer. Un couple de pompistes reprendra quelques temps la vente de carburant mais celle-ci s'arrêtera. La parcelle de terrain sera vendue, le garage démoli et on y contruira les lotissements Vent d'Ouest et Vent du Sud où assureurs, banques et cabinets médicaux se sont installés.


STE Generale Route Nantes

Près de l'Intermarché, son affaire sera reprise le 1 octobre 1992, par Michel GUYOT, fils d'un boulanger de Séné, et ouvrier chez Honnart. Sur ces deux annonces parues dans les bulletins municipaux, on lit le même numéro de téléphone.

1990 Honnart 1994 Guyot

Au n°29, la station-service "La Grenouillère" distribuait des carburants ESSO. Le dénombrement de 1962 nous précise qu'elle était tenue par Eliane LOISON et son mari Guillaume LE GLOUANNEC.

Esso 1964 Rte Nantes

ESSO Rte Nantes 1

1962 Grenouileere pompiste

ESSO Rte Nantes 2

Début des années 1970, Gilbert LE BOULAIRE et son épouse reprirent la garage et la station service. (Photo Esso collection Michel PENEL)Esso Le Boulaire Rte Nantes

1999 Esso Boulaire 1

La famille vivait derrière le garage dans une maison qui existe toujours. A l'emplacement du garage, on trouve aujourd'hui la boulangerie Lorant.

Au n°31, juste à côté de la station ESSO, Mme Jeanne LE ROCH épouse PENEL, tenait le bar-restaurant LA GRENOUILLERE [lire histoire des restaurants à Séné ] qui disposait également d'une pompe à carburant. 

31 Rte Nantes Grenouillere

En ce lieu, sa mère Marie Louise JOLIVET et son beau-père Edouard CORBEL avaient tenu un garage de mécanique générale.

31 Rte Nantes Resto

SHELL Rte Nantes

 Au N°35 de la route de Nantes, il y avait une station SHELL qui ferma vers 1976, au moment où le pétrolier SHELL en ouvrit une plus moderne à Theix, l'actuelle station AVIA.

1962 SHELL TOUR séné

Lors du Tour de France de 1962, le parcours de la 7° étape entre Lorient et Saint-Nazaire, passe par Vannes et emprunte le route de Nantes en Séné.. Sur la photo ci-dessus on reconnait la station service SHELL.Sur la photo ci-dessous, les pompes sont plus récentes et le magasin a été agrandit. On lit sur la vitre du magasin l'invitation à aller faire son plein à 4km... Sur la photo suivante, un camion citerne vient remplir les cuves. On reconnait la route de Nantes.Shell Rte Nantes 2

Shell Rte Nantes 3

Shell Rte Nantes 4

En 1976, le pétrolier vendit la terrain à la menuiserie de René RIGUIDEL qui était installé derrière [lire histoire des menuisier de Séné]. Son fils rasa la station-service et y construisit un nouveau bâtiment pour accueillir son enseigne de bricolage BATISERVICE. En 1992-1994, le groupe FOUCAUD remplaça le quincailler avec un garage spécialisé dans les pneumatiques, qui pris ensuite le nom d'une autre marque du même groupe, SIMON PNEUS. Le groupe SIMON ouvrit au Poulfanc l'enseigne PROFIL Plus et cet emplacement fut repris par BERGES Pneus, entreprise de José Bergès, avant de devenir un point de vente de la jeune entreprise  EASYROOL de Pascal Jacquelin. En décembre 2020, l'enseigne BOSCH Services reprend les locaux.

1994 04 FOUCAUD pneus

Berges pneus

EASY ROoL8LOGO

2020 Bosch Service

Easy Rool new logo

Au n°47, il y avait une autre station service de la marque AZUR du groupe pétrolier Desmaret.

1962 Lorheac pompiste Grenouillère

En 1962, elle a pour gérant Roger LOREAL, originaire d'Arcachon.  Elle était située aux côtés du transporteur Jean NIVES.SA. La marque AZUR fut acquise par le groupe TOTAL. Comme une autre station TOTAL avait été créée dans le quartier Saint-Laurent, on l'appellait celle-ci le "petit Total". Face à la concurrence, la station ferma et fut racheté par le transporteur Nives pour y étendre ses bureaux.

1965 Station Azur

 

azur logo

47 Rte Aniquaire Chevallay

Vers 1985, M. Nives céda lar parcelle qu'occupait la station à Serge CHEVALLEY, ancien marin, antiquaire qui pendant 5 ans a tenu son magasin d'antiquités en lieu et place du magasin de l'ancienne station service. M. CHEVALLEY procéda à la neutralisation des cuves à carburant, sous la supervision de la préfecture. Elles furent comblées de sable. Vers 1990, il vendit son terrain et le magasin à M. LE BRIS père qui ouvrit la boulangerie du Poulfanc [lire histoire des boulangers].

Un pétrolier gère un dépôt :

Avec autant de station service installées sur la Route de Nantes, on ne s'étonnera pas de trouver à leur côtés un dépôt de produits pétroliers. Il était situé à l'emplacement actuel de supermarché NETTO (qui a remplacé le tout premier supermarché Intermarché de Séné).

1965 Petrolier

Sur cette photo aérienne, on distingue la cuverie installée côté rue du Verger. Son gérant à l'époque était Gustave PEDRON qui logeait dans une maison de fonction donnant Route de Nantes. En 1962, le Tour de France passe route de Nantes. La maison qui logea également le 1er directeur de l'Intermarché, sera déconstruite pour laisser place à un agrandissement du supermarché NETTO.

1962 Pedron Gustave

1962 TOUR séné 3

Logement Fonction PEDRON Petrolier

3-SUR LA ROUTE DE NANTES, "côté pair" : le garage Renault Lambert & Dupré, installé depuis 1925 en haut de la rue du Mené à Vannes succédait au Garage Moderne. Au début des année 1970, il quitta le centre ville et alla s'installer sur la RN 165 à l'actuel N°95 Avenue Herriot à Vannes.

Vannes Garage Moderne Rue du Mené

1926 Lambert Dupré 2

Garage Lambert vannes

Garage Lambert Dupré

Renault Rte Nantes pompes

Vers 1980, la Station du Petit Beaupré et la concession Renault sont reprises par José ARDERIU [Nérac 1945-Vannes 2005] qui crée la Société Vannetaise de Diffusion Automobiles. Le concessionnaire distribua pendant quelques années les carburants BP.  Sur la photographie ci-après, prise depuis les Etablissements Lorcy, où un camion accidenté est garé, on distingue le logo BP de l'autre côté de la route. Plus tard, Renault se rapprochera du pétrolier ELF. BP est abandonnée au profit de ELF tout comme la station ANTAR au n°15 qui passera également sous l'enseigne ELF. 

Lorcy parking camion BP

Garage Renault Rte Nantes vue

Vue du garage Renault en 1989

Après l'arrêt de la station au n°15, en juillet 2003, le Pdg de la SVDA, José Anderiu, décide d'arrêter la vente de carburant devant le garage Renault. Vers 2012, la SDVA fut reprise par la société BORDEMER pour créer ensemble AUVENDIS [Auray Venetes Distribution] avant d'être finalement abosrbée par son nouvel actionnaire.

2003 ELF renaul FIN

Garage renault Herriot

1983 1991 Vannes Moto

Vers 1983, un distributeur de motocyclette, s'installa en face le garage ANTAR et était présent encore en 1991. Mais ce côté pair de la route de Nantes, était surtout connu entre 1960 et 2001, par la présence du  garage DUCLOS spécialisé dans les poids-lourds et autres camions.

4-ROUTE DU POULFANC vers le bourg :

Séné Kercourses

1992 06 Garage Provot Poulfanc SENE

Cette route reliait les quartiers de Bohalgo vers le Poulfanc et filait vers le bourg de Séné au travers de l'hippodrome...Avant le champ de course, Jacques PROVOT, ancien apprenti et ouvrier chez Honnart, établit son premier garage au n°4 rue du Poulfanc en septembre 1985. Le hangar, encore debout, est utilisé par l'AMISEP...

2002 01 Garage Citroen Pruvot

Après le percement de l'avenue Cousteau, en juin 1993, il transféra son garage près du quartier de la Poussinière. En avril 2018, il est parti en retraite. Courant 2019, sa parcelle de terrain a été vendue au groupe Nexity Promotions, qui va y construire le prgramme immobilier L'Alcyone.

Séné LAlcyone

5-AU QUARTIER SAINT-LAURENT, en allant vers Theix et au-delà de la scierie LEGAL, une station de carburant fut crée dans les années 1963-64, au niveau du quartier de Saint-Laurent.

1965 Station Rte Nantes

Vue de scierie Legal et de la station service de St-Laurent - sept-1965

1962 St Laurent Pompiste

Au dénombrement de 1962, Roger GUESNON et Suzanne LE PALLEC, son épouse, sont les pompistes et ils vivaient dans la petite maison accollée, aujourd'hui disparue, depuis la rénovation de cette station TOTAL. A cette époque, le citerniers LORCY ravitaille les stations services de la route de Nantes. Sur cette photo on peut lire en haut à gauche, sous la marque TOTAL, Laurent pour station service de Saint-Laurent; On distingue au fond, les tas de planches de la "Scirie LEGAL".

Total St Laurent Scierie LEGAL

De nombreux gérants se succédent à la tête de la station Saint-Laurent, WIOT, GROSEIL etc...

Total Rte Nantes maison

6 LE GARAGE CITROEN ROUTE DE NANTES :

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Dans les années 1920, Jules TOMINE [1869-1931], industriel parisien qui travaille avec André Citröen, revient en Bretagne et fonde un  garage.

tomine Rennes 1

Très rapidement, il installe une agence à Vannes rue du Roulage, aujourd'hui la rue du Maréchal Leclerc. Son fils Camille TOMINE [1896-1939] reprend l'affaire mais décède prématurément dans un accident en 1939.

1939 Tomine Camille accident

. Après guerre, la 3° génération en la personne de Jules Jean TOMINE [1924-1987] gère toujours la concession Citroen de Vannes.

Citroen Vannes tomine CP

Au milieu des années 1960, Pierre CORRE, directeur du garage Tomine,  à l'étroit en plein coeur de Vannes, reprend la concession et investit dans de nouveaux locaux au N°167, route de Nantes.

Vannes Rue du Roulage

Vannes Rue du Roulage HOY

A son départ en retraite, la  SAVVA, fut reprise par son fils, Michel CORRE qui gèrera la concession jusqu'en 1996. Ensuite elle fut rachetée par Bernard HORY, qui, avec le groupe MIDI AUTO, rassemble une trentaine de concessions Peugeot ou Citröen depuis sa base à Brive La Gaillarde.

1973 Citroen Rte Nantes

Citroen Rts nante

Citroen SAVVA 1

1983 12 Garage Citroen

Citroen SAVVA 2

Citroen SAVVA 3

2007 Garage Citroen

Garage Citroen Rte Nantes

7-VERS LA ZONE DU PRAT. Cet axe fut créé en continuité de l'avenue Cousteau pour permettre l'essor commercial de l'Est vannetais et sinagot.  Dès sa création, la ZAC du Poulfanc reçoit les enseigne Intermarché, Restaumarché et Station Marché. Le premier agrandissement voit l'arrivée du Vetimarché.

StaionMarché 1987 mai

A coup de remodelage et d'agrandissmeent, les bâtiment commerciaux sont réutilisés. Le Logimarché deviendra le garage ROADY. La station d'essence est retirer pour agrnadir le parking.

garage Roady Sene

Entre temps, le métier de garagiste mécanicien s'est spécialisé avec des garages pour les pneumatiques, mécaniciens généralistes et des distributeurs de carburants.

CONTROLE TECHNIQUE SENE

Il y avait un garage spécialisé dans le contrôle technique des véhicules, de l'enseigne SECURITEST (SA.A.C.O Sécurité) donnant rue du Verger, même si son adresse officielle était au n°49 de la Rte de Nantes.  Cet établissement ira s'installer dans la ZAC du Poulfanc non loin des Etablissment Josselin. Tandis qu'un autre Securistest ouvrira zone du Prat à quelques hectomètres de Séné.

Securitest Poulfanc

Avenue de Gelpolsheim, fleurirent les offres de services pour l'automobiles, et aujourd'hui la zone commerciale compte avec les enseignes PROFIL Plus (Groupe Simon Pneus) et VIANOR.

Garage Profil Vianor

Au n°4 de la rue Loraine un nouveau garagiste s'est installé au début de 2020.

REIVO auto 4 rue Loraine

Port Anna Station MOBIL

8 A PORT ANNA : Pour clore cet exposé des garages et des pompistes de Séné, on n'oubliera pas les activités maritimes. Avec la motorisation de la flotte de pêche, une station de gas-oil fut installée sur la quai "à babord" de Port-Anna, la cuve enterrée sur la construction "MOBIL" où l'on venait remplir ses bidons.... Plus tard une canalisation amena le carburant au bout du môle pour remplir directement les bâteaux.

Jean Richard se souvient : après la guerre, les sinagos ont monté un moteur tout en gardant les voiles. Un gars de chez nous, un certain LE BRAS qui était à Paris est revenu s'installer sur Mousterian avec un associé un certain DELALANDE, route du Bil, la première maison à gauche. Ils ont commencé à réparer les moteurs 5-10 cv des bateaux. Avec la création de Port-Anna, ils s'installent en bas de Bellevue mais désaccord entre eux...l'affaire est vendue. 

1950 garage LUCAS

Marcel LUCAS, mécanicien de voitures à Vannes, reprend ce premier garage de Port-Anna, établi sur un terrain de M. & Mme GIVET, et sous l'impulsion du maire de l'époque, Alphonse LE DERF, qui avec son équipe ont décidé de créer un nouveau port. [Lire Histoire de Port-Anna].L'atelier est à gauche des places de garage réservées aux habitants de l'Île d'Arz, comme le montre cet extrait de carte postale datée de 1950. Plus tard, M. LUCAS construisit une maison avec un large rez-de -haussée qui accueillait un garage plus grand. 

Port Anna garage Legal

En 1979, il vend le fond et les murs à Michel LE GAL. Celui-ci travaille alors un peu avec la plaisance, mais surtout avec les ostréiculteurs, les pêcheurs et il entretient aussi les navettes qui relient l'Île d'Arz, notamment les "Vedettes Vertes". L'entreprise a compté jusqu'à 5 personnes sur Séné et également. Il dispose également d'un atelier au port du Crouesty.

1989 12 Le Gal

Au début des années 200, il obtient la possibilité de monter un hangar à Barrarach comme deux autres entreprise, TUAL Marine et CN TALHOUET qui construit des bateaux.  

sene nautic

A son départ en retraite, Michel LEGAL cède son atelier à Emmanuel LE GREGAM, qui gère un temps avec un associé, avant de gérer seul en 2018, SENE NAUTIC, entreprise spécialisée dans les moteurs in-bord et hors-bord des derniers bateaux de pêches et ceux des plaisanciers.

Port Anna TUAL

De son côté TUAL MARINE, installé à Port Anna depuis 19xx,  est spécialisée dans les coques de bateaux et le polyesther. Enfin, Laurent GICQUEL a ouvert sur Barrarach un autre atelier de réparation de moteurs de bateaux.

 2016 12 Station EDF

Dans cette revue historique des garagistes et pômpistes de Séné, routiers ou maritimes, on n'oubliera pas la nouvelle "station service" distribuant du carburant "électrique", en fait une borne de recharge installée au bourg, place Floresti, en décembre 2016.

Avec le temps, le renchérissement de la main d'oeuvre, l'augmentation des taxes, les stations service se sont clairsemés dans nos communes et sont passées en self-service. On se sert à la pompe et on discute avec des automates parleurs. Ah! qu'il est loin le temps où on pouvait bavarder avec Pascaline!. En ce temps-là, les pompistes vous faisaient le plein, lavaient le pare-prise, vérifiaient la pression des pneus...Une autre époque!

 

 

 

SOCIETE POLYMATHIQUE DU MORBIHAN

ATELIER TOPOGRAPHIQUE HISTORIQUE

Château Gaillard – 2 rue Noé – VANNES

L’ANSE DU BIL DE SENE

Par Camille Rollando

AVANT PROPOS : wiki-sene présente ici un travail de Camille ROLLANDO complété d'apports photographique et cartographique.

PRÉFACE

A nos fidèles lecteurs des productions de l'Atelier topographique mis en place par la Société Polymathique du Morbihan je souhaite, pour leur plus grand profit, que la brochure n° 6 satisfasse a leur curiosité en apportant des réponses à des questions restées longtemps indécises. Tel est le cas, pour le moins, de l'un d'entre eux, en la personne de votre serviteur.

A l'époque des faits rapportés ici, les habitants de la presqu'île de Rhuys ne disposaient, pour rendre visite à la cité des Vénètes. que du joyeux « petit train du CM » et des services imprécis de quelques bus prives cahotant et ahanant dans les rares côtes les séparant du chef-lieu. Restait, bien entendu, l'initiative privée, fondée pour l'essentiel sur les vertus du char à banc et le succès, grandissant, de la bicyclette individuelle. En ce qui me concerne et compte tenu de mon très jeune âge dans le premier cours des années vingt, je bénéficiais des avantages d'une selle adaptée à ma taille et fixée sur le cadre de la bicyclette paternelle, complétée d une paire d'appuie-pieds montés sur la fourche de la roue avant. Nous utilisions couramment le « passage de Saint-Armel » où officiait Louis Le Gai à bord du « Séné » (5 sous pour la bicyclette, 2 sous par passager).

Dans l'insouciance et l'ignorance de mon âge je ne m'inquiétais guère des « contraintes de la marée » qui paraissaient beaucoup marquer les conversations des grandes personnes, déterminantes pour la fixation des heures de dépari et de retour! J'ignorais, bien entendu, l'importance de l'événement que décrit notre publication II me semblait étonnant, toutefois, qu 'en certaines circonstances nous avions, sur le trajet compris entre le carrefour du chemin d'Ozon et le pied de la colline de Montsarrac, à patauger dans l'eau. D un cote s- 'étendait un bois de pins complètement envahi par des eaux qui. dans le même temps, mondaient la cour de la ferme voisine De l'autre côté une bergerie juchée sur un monticule dominait curieusement un paysage maritimo-rural • les haies des anciens champs, encore plantées de leurs arbres et buissons émergeaient curieusement de la mer: à marée basse se distinguaient encore très nettement les sillons qui, peu a peu, se couvraient d'algues insolites. Rouler dans l'eau ne m'inquiétait guère mais lofait, malgré ma naturelle confiance en la sagesse des adultes, ne laissait pas de m'étonner quelque peu.

Le commandant Camille Rollando, aujourd'hui, répond à toutes les questions que je pus me poser dans les années qui suivirent. Son enquête exhaustive me révèle les raisons d'un phénomène qui marqua l 'étonnement mêlé d'une certaine inquiétude que je ressentais alors. L'anse de Bilherbon, extraite des eaux par la volonté des hommes, était retournée à ses destinées premières.

J'ai pris un plaisir particulier à découvrir le sujet qui fait la substance de notre publication de ce jour. Je souhaite qu 'il en aille de même pour tous.

Yves LE BŒUF.


L'ANSE DU BIL EN SENE

ENDIGAGE ET ASSÈCHEMENT

Si l'on remonte à des temps très anciens, la période préromaine par exemple, cette baie, sans doute, n'existait pas. La côte devait offrir une ligne continue et ne faire qu'un seul bloc avec les terres environnantes. Au cours des siècles, la mer a poursuivi son travail de sape et découpé le rivage en creusant cette petite rade artificielle.

Carte de Cassini : Les villages de Moustérian, Kerleguen, Kerarden, Motsarrac ou encore Cressignan et Michot sont figurés. La chapelle d'Auzon et le moulin de Bilherbon avec une roue sont précisés ainsi que les maisons au Passage. L'anse est ouverte sur le Golfe du Morbihan.

Mancel Cassini

Carte du XVIII°siècle (1771-1785) : On reconnait le cordon de terre que constitue la pointe du Bil avec à son extrémité une peit îlot. L'île de Mancel est figurée séparé par l'asne de Barbon avec au fond le moulin à marée de Bilherbon et derrière la digue l'étang d'Auzon. De l'autre rive de l'île Mancel le cartographe a figuré le "ruisseau" laissé à marée basse par la mer. Cet espace se couvre à marée haute et la mer vient entourer l'île de Mancel et mouiller la côte à Montsarrac. Au sud, un chapelet d'ilôts  est figuré dont le Pechit, Senague (la Villeneuve).

1771 1785 Séné anse Mancel Bil

D'après les croquis datés du début du XIXème siècle, voici comment devait se présenter l'anse du Bil avant que la main de l'homme intervienne.

Venant du golfe, la mer pénètre entre l'extrémité du Bil de Moustérian à gauche et un îlot appelé Bechic à droite. Celui-ci est séparé de l'île de Peschit ou Senage que nous appelons aujourd'hui le Trech. Bot-Spemen est lui-même un îlot qui, comme son nom l'indique, est couvert de landes et de ronces (en breton : bosquet d'épineux) ; plus tard un large muret en maçonnerie le reliera au village de Montsarrac. On ne sait pas très bien à quelle époque il a été édifié, mais nous avons connaissance d'un procès-verbal d'experts maritimes, en date du 24 novembre 1786, venus constater l'état de vétusté de l'embarcation du passeur de Saint-Armel et réclamant la construction d'une chaussée pour faciliter l'embarquement des bestiaux.

TOPOGRAPHIE DU SITE

L'anse du Bil est située entre le bourg de Séné et le passage de Saint-Armel. Reportons-nous à la reproduction partielle d'une carte levée en 1820 par l'ingénieur hydrographe Beautemps-Baupré. (Cf.- carte page 2).

On y voit la baie, avec l'îlot Mancel en son milieu, ceinturé par les villages de Moustérian, Auzon, 1       Kerleguen, Kerarden et Montsarrac. En en faisant le tour, dans le sens des aiguilles d'une montre à partir del'embouchure, on laisse à gauche les anciennes salines de Moustérian, Auzon avec sa petite chapelle... Pour la petite histoire, ce hameau était autrefois une métairie noble qui appartint successivement de 1530 à 1781 aux sieurs Garlot (ou Curso), du Fossé et de Francheville. La chapelle, dédiée à saint Sébastien, fut édifiée près de la ferme-manoir ; elle a dû disparaître vers 1840-1846 car une partie de ses matériaux servirent à la construction de la chapelle de Kerarden en 1846 et dans laquelle on a transféré les statues de saint Roch et saint Sébastien. Emest Rialan, de la Société Polymathique du Morbihan (S.P.M) y a vu ses ruines en 1856, dans lesquelles il a découvert de nombreuses tuiles à rebord (tegulae) ainsi que des pierres brûlées par le feu, ce qui laisse à penser qu'il y avait là auparavant une habitation romaine.

Au fond de la baie existait autrefois un moulin de mer dit moulin du Herbon avec sa digue de retenue qui, plus tard surélevée et renforcée, deviendra le chemin d'intérêt communal IC 99, appelé chemin de Vannes à Pencadénic. Ce moulin, qui fonctionnait au rythme des marées, est signalé vers 1780 sur les cartes de Cassini (géographe de Louis XV) mais on n'en trouve aucune trace dans les archives. On peut raisonnablement penser, qu'à l'instar de celui de Cantizac, il était une dépendance de la sieurie noble d'Auzon.

On longe ensuite la côte ouest de Montsarrac puis on arrive à Bot-Spemen où sera plus tard construit, par le comte de Castellan, un château, actuellement propriété d'un industriel parisien.

Nous arrivons enfin au Peschit pour fermer la boucle. Ce site, bien connu des archéologues de la S.P.M. a été prospecté entre autres, par le Dr Lejards, le Cdt Baudre, Y. Rollando et Y. Coppens qui y ont découvert de nombreux vestiges d'augets et fours à augets gallo-romains. Beaucoup de ces objets sont d'ailleurs entreposés dans notre Musée.

DES PROJETS AMBITIEUX

L'histoire de l'anse du Bil a ses origines dans la 2° moitié du XVIIIème siècle, vers la fin du règne de Louis XV. A cette époque, les finances de la France, conduites par le chancelier de Maupeou et l'abbé Terray n'étaient guère brillantes. Ils décidèrent de prendre un certain nombre de mesures et parmi celles-ci, la promotion des produits du sol. Encouragées, des sociétés d'agriculture virent le jour dans tout le pays. En 1770, Parmentier vulgarise la pomme de terre. Des économistes suggérèrent d'assécher des marais afin de gagner des terres agricoles et l'Etat proposa d'accorder une exemption de dîmes et d'impôts pendant 20 ans à ceux qui réaliseraient ces assèchements. C'est ainsi que le financier nantais Graslin procéda avec succès à cette opération sur les marais de Donges et de Savenay. L'idée était bonne, d'autres la reprirent, en particulier un autre nantais, Pierre Joseph Couillaud de la Pironnière.

Période ancien régime :

Ce financier conçut le projet ambitieux d'assécher une bande de 1 300 hectares sur le pourtour du Golfe du Morbihan, dont l'anse du Bil. Les terrains furent concédés par ordonnance royale le 1er mai 1770, sous condition que l'assèchement soit effectué dans un délai de 10 ans. Mais M. de la Pironnière dut capituler devant l'hostilité générale des paroisses riveraines et à l'expiration du délai, présenta un nouveau projet plus modeste. Cette nouvelle concession fut accordée par un arrêté du Conseil d'État en date du 12 décembre 1780, avec les mêmes conditions de délais d'assèchement. Mais les réactions furent aussi violentes et M. de la Pironnière, déjà valétudinaire, mourut vers 1785. Sa veuve, héritière des droits, n'eut pas le courage de poursuivre et, avec la période révolutionnaire, le projet demeura en sommeil durant une vingtaine d'années.

1700 Anse du Bil

Sous l'Empire :

Il refait surface sous l'Empire avec les sieurs Martin et Lorois de Nantes. Ce dernier avait jeté son dévolu sur les marais du Poul en Saint-Armel et surtout l'anse du Bil en Séné, qui nous intéresse ici. Il écrit donc une longue lettre, en date du 5 octobre 1821, au préfet, comte de Chazelles, pour demander l'acquisition d'une anse qu'il signale comme improductive et recouverte à chaque marée, et réaliser son assèchement.

Pour appuyer sa requête, il en montre les avantages :

1.- Augmentation de la matière imposable en rendant productif un terrain inutile : d'où avantage pour l'État.

2.- En livrant à la culture une quantité considérable de terrain (100 hectares).

3.- En employant pendant longtemps un grand nombre d'ouvriers.

Malgré les oppositions des riverains, le préfet émet un avis très favorable.

Cadastre napoléonnien : 

1810 Mancel

 

A la Restauration :

L'ENTENTE EST LOIN D'ÊTRE CORDIALE

-21 Janvier 1822 : Réaction du conseil municipal de Séné.

             ... Il fait valoir les préjudices que l'assèchement entraînerait... les marins riverains du village de Moustérian n'ont d'autres mouillages pour leurs chaloupes, par mauvais temps, que la lande du Bil... si l'entrepreneur ne leur fournit pas un autre port, 24 chefs de famille seront obligés de quitter leur village... les laboureurs du même village éprouveraient la perte d'un marécage qui s'étend jusqu'à la métairie d'Auzon et qui sert de pâturage à une centaine de bestiaux à marée basse... que les habitants de Kerleguen, Kerarden et Montsarrac seraient privés du « béhain » qui sert habituellement d'engrais pour amender les champs...

Le 24 juin 1824, le ministre des Finances demande au préfet de lui fournir un rapport détaillé sur cette affaire et lui donner son avis ainsi que celui des personnes compétentes.

-          7 Juillet 1824 : Ordonnance du roi Louis-Philippe.

... Vu la demande des sieurs Martin et Lorois de la concession de sept lais de mer faisant partie de celles concédées précédemment au sieur Couillaud de la Pironnière (qui n'a pas rempli les conditions de la concession).

...Vu les avis favorables du préfet du Morbihan, du directeur des Ponts et Chaussées, du directeur de l'administration des Domaines.

...Vu l'article 41 de la loi du 16 septembre 1807 qui laisse, en dernier ressort, au gouvernement le soin de concéder les marais, lais et relais de mer.

...Donne son accord et concède au sieur Edouard Lorois l'anse du Bil située sur la commune de Séné, contenant environ 100 hectares, sous certaines conditions rédigées en 10 articles... en particulier que le dessèchement et l'endigage devront être effectués en trois ans et que tous les frais de défrichement seront à sa charge.

Un procès-verbal de reconnaissance est délivré, signé par le maire et deux membres de son conseil, l'ingénieur des Ponts et Chaussées et le représentant du préfet.

L'ENDIGAGE, UN TRAVAIL DE TITAN

Les travaux commencent très rapidement pour se terminer vers 1827, mais en réalité, les finitions et l'assèchement se poursuivent jusqu'en 1830. L'ouvrage principal est une digue de 200 mètres de long, 15 à 20 mètres d'épaisseur et 5 à 6 mètres de haut au milieu du chenal.

Un système de vannage est installé, qui aura un double effet, soit laisser entrer une certaine quantité d'eau de mer pour alimenter les salines de Billorois situées dans les terres basses, soit au contraire pour évacuer les trop-pleins d'eau douée vers la mer. Cette digue barre le passage entre le Bil de Moustérian et l'îlot Bechic. Un remblai de maçonnerie appelé petite digue sera établi entre Bechic et le Peschit, passage relativement étroit et peu profond. Un certificat « ad hoc », en date du 31 juillet 1834, de l'ingénieur de l'arrondissement du Sud certifie que « les travaux fort difficiles ont été bien exécutés et n'ont été terminés qu'en 1830, date à laquelle l 'endigage et l'assèchement sont complets ». 

Cadastre 1844 : ainsi apparait le polder une fois construite la digue "Lorois". La caserne des douanier à Bilorois est figuré sur l'île de Mancel.

1844 Mancel

Foto Anse du BIL

 

LA VALSE DES PROPRIÉTAIRES

Edouard Lorois, né en 1792, mène parallèlement une carrière préfectorale. Sous-préfet de Châteaubriant en 1815, il est nommé préfet de Vannes en 1830, puis conseiller d'État de 1843 à 1848, date à laquelle il sera révoqué à l'avènement de la IIème République. Ce sont ces activités importantes qui vont l'amener, sans doute, à vendre ses biens quelques années plus tard ;

-Le 31 août 1833 : II cède les 2/3 de sa propriété au sieur Augustin Septiivres, c'est-à-dire la ferme de Bilherbon avec ses dépendances (66 hectares). L'ensemble comprend :

1.- Des biens immeubles dans la partie dite du « Bil Lorois », à l'exception des marais salants et de leurs dépendances ainsi que la caserne des Douanes en construction.

2.- Dans l'étang du Herbon, chaussées et dépendances achetées en 1822 à Louise Le Courvoisier, Vve Le Blanc Lacombe.

3.- Divers autres bâtiments construits par M. Lorois sur des parcelles achetées à des particuliers. -             Toute cette propriété passera par la suite entre les mains de MM. O'Murphy, de Castellan et de Bouan du ChefduBos.

- Le 5 Septembre 1835 : II vend le 1/3 restant à M. de Castellan qui le cède, à son tour, à M. de Bouan, son cousin (la mère de M. de Castellan était née Anne Sophie de Bouan) qui va exploiter la propriété jusqu'à la fin du siècle. Les cultures pratiquées seront celles classiques de la région : blé, avoine, pommes de terre, choux et même du jonc utilisé pour ligaturer les gerbes de blé. Bien entendu, herbages et pâturages pour les ovins et bovins. Plus tard on verra un élevage de chevaux de boucherie.

Les décennies suivantes seront une période faste pour cette partie de la commune. Outre l'exploitation intensive de ces nouvelles terres agricoles, une usine de produits chimiques vient s'implanter à la Garenne près de Montsarrac en 1853, à l'initiative des frères Lagillardaie, négociants à Vannes. Cette usine, destinée à transformer les goémons et varechs en sulfate de potasse, chlorure de potassium, iode, brome, alun, chlorure de sodium, etc., utilise une main-d'œuvre non négligeable.

Cadastre en 1866 : Le trait noir épais montre les chemins et la voirie. 

 

 1866 Mancel anse

LES ENNUIS VONT COMMENCER

- Le 8 Juin 1901 : M. de Bouan vend la ferme de Bilherbon avec ses dépendances (66 hectares) ainsi que charrettes, instruments aratoires, pailles, foins, bestiaux, etc. à Mme Rohiing née Anna Eugénie Jégo et à M.Rohiing son époux, banquier en Hollande. La digue est comprise dans l'acte de vente. Le tout pour la somme de 60 000 francs. Dans l'acte, une clause stipule que l'entretien de la digue est entièrement à la charge du propriétaire.

Une partie du reste (22 hectares) sera vendue plus tard à M. Brouard, marchand de bois à Saint-Brieuc qui la cédera ensuite à M. Fleury, boucher à Vannes, M. de Bouan se réservant 14 hectares

- Le 28 Juillet 1912 : Une pétition de plusieurs cultivateurs adressée à la préfecture, signale le mauvais état de la digue de Bilherbon qui menace de se rompre et pourrait submerger environ 200 hectares. Ils signalent aussi que M. Rohiing, banquier à Amsterdam, a été prévenu mais n'a rien fait

- Le 22 Septembre 1913 : Lettre du conseiller général M. Marchais au préfet.... Il signale une fois de plus les grands dangers que fait courir l'état actuel de la digue. Il est certain qu'elle cédera à la première tempête. Il en résultera une inondation considérable... Il serait souhaitable que l'administration intervienne et fasse exécuter, au frais de qui de droit, la réfection qui s'impose. 1914 c'est la guerre ! La préfecture estimant la propriété Rohiing délaissée et mal exploitée, la fait occuper par une escouade militaire.

- Le 18 Juin 1917 : Rapport du subdivisionnaire des Ponts et Chaussées

... Il y a urgence à procéder à la réparation de la digue, pour éviter un désastre avant la prochaine marée d'équinoxe. M. Rohiing, à qui incombe entièrement les réparations, n'a pas donné signe de vie depuis longtemps et ne répond à aucune lettre... En désespoir de cause et comme les ouvriers se font rares (c'est la guerre), l'autorité militaire qui exploite la ferme de Bilherbon pourrait envisager l'emploi de main-d'œuvre militaire. Le capitaine Ferron du 35cme régiment d'artillerie, qui dirige la ferme, a visité la digue accompagné de l'ingénieur des Ponts et Chaussées.

- Le 30 Décembre 1920 : Lettre du préfet à l'ingénieur des Ponts et Chaussées.

... Il signale que le rapport de son prédécesseur est toujours d'actualité, à ceci près que la ferme n'est plus exploitée par le 35emc régiment d'artillerie, mais par M. Théodore Laudrain, cultivateur à Kerleguen... Divers autres courriers insistent sur l'état critique de la digue et devant le silence de la propriétaire, Mme Rohiing, il est suggéré la création d'une association syndicale libre.

1912 Mancel plan cadastral

PREMIÈRE RUPTURE DE LA DIGUE

Les années suivantes l'état de la digue reste précaire et ce qui devait arriver arriva : la rupture depuis si longtemps annoncée.

- Le 22 Décembre 1925 : Une effroyable tempête ravagea les côtes morbihannaises causant d'immenses dégâts à terre comme en mer. A Bilherbon, une brèche de 20 mètres s'ouvrit dans la digue et la mer en furie s'engouffra, submergeant environ 130 hectares des terres basses cultivées appartenant pour la plus grande partie à Mme Rohiing et pour des moindres parts à Messieurs Fleury et Brouard.

MOBILISATION DES PROPRIÉTAIRES EXPLOITANTS

- Le 29 Mai 1926 : Un projet d'association syndicale est rédigé par M. Charles Pleyber, géomètre expert. II est equTyal27 hectares submergés contre 23 hectares émergés. Il évalue le montant des travaux à 122 825 francs.

Voici la liste des propriétaires (gros et petits) concernés :

Mancel propriétaires

- 10 Janvier 1928 : Première assemblée générale de l'association syndicale.

Les membres qui la constituent sont : Mme Rohiing (d'office), R. Fleury Dr. Bérard, E. Savaiy, Mme de Bouan Dr Canet.Melle Robino, F. Le Franc, J-F. Le Ray, Mme Vve Noblanc et la commune de Séné, propriétaire du chemin IC 99.

Quatre personnes refusent d'adhérer au syndicat : F. Le Franc, J-F. Le Ray, la veuve Noblanc et la commune de Séné qui demande à consulter au préalable le conseil municipal.

Peu de temps après, le conseil se réunit et décide, non seulement d'adhérer mais d'octroyé,^une ^et^^^^^^^ étaient prévus.

Les statuts sont déposés le 10 mars 1928 par le président R. Fleury. Tous les fonds ayant été recueillis, la digue sera réparée sous la direction de M. Charles Pleyber, maître d'œuvre et conseiller technique du syndicat.

1927 Digue Lorois breche

1927 Travaux Mancel prévus

INERTIE DES PROPRIÉTAIRES DE LA DIGUE

- 6 Août 1929 : Assemblée générale du syndicat en présence de M. Le Corvée, adjoint au maire et le Dr. Besse conseiller général, représentant le préfet. Le bilan financier à ce jour indique 164 410 francs de recettes et 150 885 francs de dépenses. Il reste donc un avoir en caisse de 13 525 francs.

L'assemblée demande au préfet de désigner un séquestre des biens de Mme Rohiing qui se dérobe à toute communication et ne règle pas ses contributions qui se montent à 20 000 francs.

- 1er Janvier 1932 : Lettre adressée par le syndicat au préfet, faisant un historique succinct des événements. Elle indique qu'en 1901, les propriétaires du lais de mer de 65 hectares, cédé à Mme Rohiing née Anna Jégo et mariée à un banquier hollandais, devaient par contrat se charger intégralement de l'entretien de la grande digue et de sa restauration pour deux tiers de la dépense en cas de dégradations par des événements de force majeure.

En 1911, l'ouvrage montra des signes de fatigue, Mme Rohiing fit faire (mal) quelques petites réparations, s'en désintéressa jusqu'en 1914, date à laquelle elle disparut de la circulation, à tel point que, pendant la guerre, la propriété fut occupée au titre des terres vacantes par la préfecture. La guerre terminée, elle revint à Vannes percevoir le montant de ses loyers, puis on n'eut plus de ses nouvelles que par la poste restante d'Orléans, La Rochelle et Besançon. Depuis 1928, plus rien...

L'ASSOCIATION SYNDICALE SE FÂCHE

- 6 Octobre 1934 : Procès-verbal déposé au Greffe du tribunal civil de Vannes par Me Camenen à la demande de M. Charles Pleyber, pour poursuites et saisie à l'encontre de M. et Mme Rohiing.

Objet concerné : vente sur saisie immobilière de la propriété de Bilherbon comprenant : bâtiments d'habitation et d'exploitation (cours, granges, écuries, courtils, aires, jardins, prés, pâturages, terres labourables, friches, landes, marais etc.).

Amende de 5 000 francs à payer à M. Pleyber.

La saisie immobilière est signifiée aux consorts Rohiing ayant demeuré à Bordeaux n° 3 rue Gobineau et actuellement sans domicile en France.

L'ensemble de la propriété est cadastrée du n° 184 au n° 313 et concerne Bilherbon, Billorois et le Bechic pour une superficie totale de 63 ha 65 a 83 ça.

Origine de la propriété : Melle Anne Eugénie Jégo, demeurant à Bordeaux, n° 3 rue Gobineau pour l'avoir acquise de M. Henri du Bouan du Chef du Bos et de Mme Anna du Gargouet, son épouse, demeurant ensemble au Val Bouan, commune de Planguenoual (Côtes du Nord).

La vente est faite pour payer les créanciers. - Art. 20.- la propriété est englobée dans le périmètre de l'association syndicale du lais de mer de Bilherbon, chargée de l'entretien des ouvrages de défense contre la mer. - Art. 21.- la mise à prix initiale sera de 35 000 francs en un seul lot.

- Novembre 1934 : Lettre de l'association syndicale au préfet.

Elle dit ceci : l'association a été créée par arrêté préfectoral du 10 mars 1928 pour la restauration de la digue détruite le 22 décembre 1925 et pour la défense contre la mer qui avait envahi 150 hectares. L'association comprenait 10 propriétaires (plus la commune), dont Mme Rohiing possédait la moitié du terrain. Elle avait totalement disparu depuis 1914 et n'a pas participé financièrement aux travaux. Les dernières réparations dataient de 1910 et c'est à cause d'elle que s'est produit le désastre. En conséquence, la propriété sera vendue le 18 décembre prochain.

La vente se fait à la bougie. A la première bougie l'enchère monte à 52 000 francs. Deux autres bougies sont brûlées sans succès. Finalement la propriété est adjugée pour la somme de 52 000 francs à M. Le Peivé Pierre, veuf de Marie Josèphe Périgault. La vente est enregistrée à Vannes, le 22 février 1935.

Vers la même époque, M. Le Boleis achète la ferme de la Villeneuve et ses dépendances à M. Fleury (32 ha 84). - 22 Novembre 1936 : Réunion du syndicat pour discuter d'une contribution extraordinaire de ses membres dans la perspective de travaux de maçonnerie au titre de l'année 1937.

Sont concernés :

Mancel vente rohling

À PEINE CICATRISÉES, LES PLAIES SONT ROUVERTES

 

DEUXIÈME RUPTURE DE LA DIGUE

Article de presse 20 mars 1937

1937 03 20 Séné TempeteLe 14 mars 1937, une violente tempête, conjuguée avec la marée de vives-eaux précédant la grande marée d'équinoxe, provoque une énorme brèche dans la grande digue. - 15 Mars 1937 : Rapport du maréchal des logis Le Diagon.

... Le 14 mars 1937, la digue de Montsarrac s'est rompue sur une longueur de 15 mètres environ. La ferme de Bilherbon a été mondée. Le propriétaire a pu évacuer à temps sa famille et ses bêtes. Les maisons du « Purgatoire » ont été mondées également à marée haute. Les villages de Montsarrac et Kerarden sont actuellement isolés. Les chemins V.O. n° 3 de Michotte et V.O. n° 4 du Purgatoire sont submergés... - 20 Mars 1937 : Rapport du président de l'association au préfet.

... La digue, d'une longueur de 200 mètres, a été recouverte le 14 mars 1937 par les vagues qui ont débordé sa crête et provoqué de nombreuses brèches dont la principale a 40 mètres de longueur au point le plus élevé.

...C'est là, d'ailleurs, que s'était produite la brèche de 1925. Elle s'est produite vers 06 h 30 du matin ; la mer s'est précipitée en torrent sur les terres basses où paissait un troupeau de moutons que le propriétaire eut du mal à sauver et dont il dut se défaire à bas prix dans la journée, faute de trouver des locaux pour les abriter. La marée a recouvert tout le terrain situé entre les digues et le chemin I.C. 99, puis entre celui-ci et le chemin vicinal de Kerarden. Les terres basses seraient laissées sous l'emprise de la mer (105 hectares), réparties entre 6 propriétaires dont Le Peivé 54 hectares et Le Boleis 25 hectares. Cette surface inondée pourrait être utilisée pour la pêche professionnelle à leur bénéfice, en attendant une autre solution... - 1er Juin 1937 : Lettre de l'association syndicale au préfet.

Si aucune mesure de protection n'est prise avant l'hiver, la transformation de la presqu'île de Montsarrac en plusieurs îles, entraînant la destruction de quantités de propriétés, est une chose à envisager, par le résultat de la jonction du lais de mer de Bilherbon avec la rivière de Noyalo... - 24 Novembre 1937 : Compte-rendu de l'assemblée générale du Syndicat.

On donne lecture d'une lettre du préfet relative à l'établissement d'une vanne automatique sur l'aqueduc du chemin I.C. 99. Cette vanne avait été demandée par le syndicat pour évacuer les eaux douées entre deux marées.

... Le syndicat maintient sa demande de reconstruction de la digue ; sinon, une juste rémunération en compensation de la perte de leurs terres inondées, dont le retour au domaine public maritime doit devenir, pour l'État, une source de bénéfices du fait de l'ostréiculture...

- 10 Juin 1938 : Lettre de l'ingénieur en chef des Ponts et Chaussées.

... La digue fut établie vers 1927 pour isoler environ 100 hectares concédés par une ordonnance royale de 1824. Entretenue jusqu'au début du XXème siècle par les propriétaires du lais de mer qui ne purent s'entendre sur la répartition des frais... la digue fut plus ou moins délaissée... la digue est rompue le 25 décembre 1925... le chemin I.C. 99 est submergé à chaque vive-eau et rehaussé en 1927... la digue fut reconstruite en 1928 grâce à une association syndicale.

La dépense s'éleva à 166 000 francs ; elle fut supportée par l'État (90 000 francs), le département (24 000 francs), la commune (12 000 francs) et les propriétaires (40 000 francs). Seule parmi les concessionnaires, Mme Rohiing, qui possédait la majeure partie des terrains, n'a pas participé aux frais. L'association prit les frais d'entretien à sa charge mais en 1933, elle déclara n'avoir plus de ressource et, de ce fait, délaissa le barrage qui fut rompu une deuxième fois en 1937. - 21 Août 1938 : Assemblée générale du syndicat, en présence de M. Ménard, maire de Séné.

- Membres présents : MM. Le Boleis, Laudrain, Le Peivé, Kerrand.

- Membres absents : Mme Vve Noblanc, Dr. Bérard, MM. Pleyber, Savary.

... On évoque la rupture de la digue, ce qui a eu pour conséquence que les terrains sont devenus à nouveau domaine maritime jusqu'au plus grand flot de mars... les dommages causés aux biens et aux récoltes... malgré les critiques concernant l'entretien de la digue, on s'accorde pour dire qu'il a fallu un cataclysme comme le raz de marée du 14 mars 1937 (jamais vu en Bretagne) pour provoquer la rupture...

Le maire indique que si les membres de l'association veulent entreprendre la reconstruction de la digue, l'administration est disposée à verser la somme de 300 000 francs. Les membres du syndicat déclarent être dans l'impossibilité de faire un effort pécuniaire supplémentaire... ils demandent l'exonération des taxes foncières sur les terres envahies et sur les immeubles maintenant improductifs.

Les choses restèrent en l'état. Un an plus tard éclatait la seconde guerre mondiale de 1939-1945. On peut imaginer l'amertume et la désillusion des principaux fermiers qui avaient tant oeuvré pour mettre ces terres en valeur. On réalise aussi combien l'Homme reste fragile face aux déchaînements des éléments, lorsqu'il se met en tête de contrarier la nature.

Ces dramatiques événements ont naturellement trouvé de larges échos dans la Presse de l'époque. Avant de clore cette petite histoire de l'Anse du Bil, voici un article paru en fin de 1926 dans un journal que je crois être le « Nouvelliste du Morbihan ». Il est écrit dans le style emphatique et alambiqué propre à cette époque, et est intitulé : « La Leçon du Passé ».

 

 

LA LEÇON DU PASSE

Vers 1830, un gentilhomme breton, M. de Castellan, dont la vigoureuse nature s'accommodait mal du régime romantique, alors en faveur à Paris, quittait la capitale pour venir accomplir chez nous une besogne de titan. Ses propriétés s'étendaient en bordure de vasières longeant la côte de Séné à Montsarrac. L'une d'elles, d'une superficie de plus de 300 hectares, s'ouvrait sur le golfe par un goulet large d'environ 200 mètres.

Tant de terrain perdu mettait la mort dans l'âme du gentilhomme campagnard, aussi résolut-il de le récupérer en fermant le goulet. Pendant plus de deux ans on y travailla ferme. La main-d'œuvre était réduite, les fonds très limités ; la besogne formidable, puisqu'il s'agissait d'opposer au flot un massif de maçonnerie de la longueur du goulet et large de plus de 30 pieds. Parfois la tempête et les fortes marées d'équinoxe anéantissaient en quelques heures le travail de plusieurs mois mais, grâce au courage indomptable des travailleurs, un jour vint où les lames impuissantes se brisèrent à la solide barrière et l'on put, dès lors, se livrer à l'aménagement du terrain conquis.

Plus de 300 hectares furent ainsi mis en culture, modifiant avantageusement ce quartier de la commune de Séné dont l'importance s'accrut, bientôt de quelques fermes et d'une agglomération : le village de Bilherbon. Les prairies furent bordées de pins, les champs plantés de pommiers ; la vasière drainée s'écoula par un charmant ruisseau. Bref, ce fut un Eden à la place du marais pestilentiel.

Cette victoire péniblement remportée sur les éléments - épisode héroïque de la lutte incessante des paysans morbihannais contre la mer envahissante - et qui paraissait devoir apporter aux habitants de Bilherbon une paix définitive, devait malheureusement, 100 ans après, être suivie d'un désastre retentissant.

Le 25 décembre 1925, une tempête formidable s'abattait sur nos côtes. Notre journal en rapporta les échos lamentables : toitures enlevées, arbres déracinés, etc. A Bilherbon, ce fut un cataclysme.

Dès les premières rafales, on s'était inquiété. La digue, qui, avouons-le, n 'avait pas eu les soins nécessaires de la part de ceux qui, pourtant, lui devaient leur aisance, reçut de rudes assauts.

La tempête redoublant d'intensité et la pression des eaux devenant irrésistible, une brèche se produisit. On essaya bien de la combler, mais les conditions de travail étaient telles que l'on dut abandonner tout espoir d'arrêter le flot mugissant qui, libéré, alla fouiller de son écume blanche son domaine d'autrefois.

Des arbres furent fauchés, des maisons s'écroulèrent; les habitants s'en échappèrent à grand'peine. Le lendemain, l'état des lieux était tel qu'avant la rude entreprise du comte de Castellan.

L'émotion fut énorme dans toute la région. On porta largement secours aux malheureux sinistrés - plus de 10 familles ruinées -puis les jours passèrent : on oublia. Les gens du pays n'approchèrent que le moins possible de la région dévastée et bientôt l'on n 'y vit plus que quelques touristes appelés là par le goût perverti du pittoresque macabre. Une année s'est écoulée. Où 'a-t-on fait pour Bilherbon ? Nous sommes allés nous en rendre compte.

Il pleut, il vente : hiver 1926. Là-bas, le spectacle est encore plus catastrophique qu'en 1925. Les maisons rendues squelettiques par les coups impitoyables des tempêtes successives évoquent les plus sinistres illustrations de la guerre. IL 'eau salée et corrosive a couvert d'une hideuse lèpre rougeâtre tout ce qu'elle a touché. Les algues desséchées, marquant l'étiage des fortes marées, pendent lamentablement sur les tiges des arbres morts. Au bruit que nous faisons pour sortir des fondrières de la route un maigre paysan sort de sa maison. A notre approche, il disparaît dans un chemin bourbeux, fuyant comme un pauvre.

Un passant nous renseigne. La route de Montsarrac et celle de Michotte qui traversent le quartier de Bilherbon, sont de véritables routes du front. Par fortes marées elles sont coupées par les eaux et leur emploi devient précaire et même dangereux. Les villages de Kerdren et Kerleguen plongent dans l'eau bourbeuse leurs silhouettes déchiquetées. Le mal est incalculable. Voyons la blessure ! 1

De la route de Montsarrac, éloignée d'environ 500 mètres - elle semble insignifiante -petite brèche dans la barre noire de la digue. Vu de près, elle n'apparaît guère formidable. Qu'est-elle, comparée à la trouée formidable à laquelle s'attaqua le vaillant Castellan ?... Tout au plus une vingtaine de mètres à combler et ce, cela avec les outils merveilleux que la science met, de nos jours, entre les mains des travailleurs.

Alors que penser ? La leçon du courageux ancêtre n'aura-t-elle donc point porté des fruits ? On nous dit bien : c 'est une question d'argent qui empêche que le malheur soit réparé tout de suite... Il faudrait plus de 100 000 francs pour remettre la digue en état. Mais qu'est-ce 100 000 francs en regard des 300 hectares perdus ? Le département ne peut-il desserrer les cordons de sa bourse et serait-ce là pour lui un mauvais placement ?

Du reste, les propriétaires sinistrés ne semblent pas vouloir bouder à la besogne. Ce qui les empêche de se mettre immédiatement à l'œuvre, c'est la lourde charge qu'ils ont à assumer. Alors venons-leur en aide. Que le département fasse un geste généreux ; la commune de Séné n'est pas riche, mais elle se saignera à blanc pour secourir ses enfants de Bilherbon. Les Ponts et Chaussées, qui sont toujours sur la brèche, ne pourront moins faire que d'apporter leur concours éclairé et, sous peu, si chacun y met du sien, les mânes du comte de Castellan, qui avaient frémi à l'heure du cataclysme, pourront reposer en paix. (1).- Le Nouvelliste du Morbihan ? ? fin 1926.

QUELQUES REMARQUES

Cet article qui relève d'un bon sentiment, puisqu'il appelle à ne pas oublier, comporte toutefois de grossières erreurs que je me dois de rectifier.

Il ressort de tous les documents que j'ai consultés que la concession a été accordée à Edouard Lorois à charge pour lui d'exécuter les clauses du contrat, ce qu'il a réalisé dans les délais.

Le comte de Castellan n'est donc pour rien dans la construction de la digue. D'ailleurs Louis Joseph de Castellan est né à Quintin dans les Côtes du Nord en 1815. Il avait donc neuf ans au moment où ont commencé les travaux d'endigage et douze ans quand ils ont été terminés. M. de Castellan est décédé le 11 août 1891, à l'âge de 76 ans, en son château de Bot Spemen. On peut voir sa tombe à l'entrée du cimetière de Séné.

Il est également exagéré de parler d'une propriété de 300 hectares dans l'anse du Bil. Les terrains concédés en 1824 à Edouard Lorois avaient une surface de 100 hectares. Ils passèrent ensuite entre les mains de Augustin Septiivres puis M. O'Murphy avant d'être cédés à M. de Castellan qui les cédera à son tour à son cousin M. de Bouan.

Camille ROLLANDO

oooOooo

Sources : Archives Départementales du Morbihan S 1568

VESTIGES DE LA DIGUE :

Vue aérienne à marée basse :

Mancel IGN

Carte postale :

Séné La Garenne La Villeneuve

Pilier sur l'île Pechit  

Digue Lorois pilier

Système de vannes : 

Digue Lorois vanne

Digue de pierre entre la Villeneuve et Pechit: 

Digue Lorois vestige 2

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