Histoire Tome 1
- Histoire des bouchers & charcutiers à Séné
- Le moulin de Cantizac
- Séné et ses moulins
- De la vigne à Séné ?
- Histoire de boulangers au bourg
- Histoires de boulangers à Cariel
- Histoire de boulangers à Cadouarn
- Histoire de boulangers à Kerarden
- Histoire de boulangers au Poulfanc
- Le choux de Séné...et de Lorient
- Les salines de Séné
Il faut être passionné d'histoire locale pour s'intéresser aux bouchers de sa commune et savoir oublier d'éventuels préjugés sur ces métiers. L'histoire des bouchers et des charcutiers à Séné est un bon exemple pour retracer les évolutions de cette profession. Dans le cas de Séné, elle permet de préciser l'histoire de certaines constructions du bourg.
La plus vieille trace de la présence d'un boucher à Séné retrouvée à ce jour, nous est fournie par le dénombrement de 1841. Mme Suzanne PICAU ou PICAUD ou PIQUOT [ca 1780 Locminé - 18/01/852 Séné], est la veuve du préposé aux douanes de Kerbiscon, LE BOHELLEC Armel [ca 1778 - 28/8/1826 Séné]. Elle déclare la profession de bouchère au bourg de Séné. Pendant combien de temps a-t-elle exercé le métier de bouchère à Séné.?
Dans une société rurale composée de paysans, de pêcheurs et de paludiers, l'abattage des animaux est assuré à la maison pour tout ce qui est des volailles (poulets, lapins), du cochon que l'on sait préparer à la ferme. Le boucher est requis pour tuer le veau, le taurillon ou le boeuf. On devait faire passer dans les villages le maître chevillard qui tuaient les bêtes ou bien le maquignon qui emportait les animaux vers l'abattoir de Vannes...
Pour en savoir plus sur l'abattoir de Vannes : http://patrimoine.bzh/gertrude-diffusion/dossier/abattoir/a3dacbcf-4cc8-44d1-a2fa-b8ca2e404f09
L'abattoir de Vannes voit le jour en 1838. Il sera démoli en 1972 pour laisser place à l'actuel Palais des Arts. Les bouchers de Séné devaient aller chercher à Vannes les carcasses de boeuf et le rapporter dans leur boucherie.
Le dénombrement de 1886 nous indique la présence de deux bouchers, la famille Allano et la famille Sandenis.
Yves SANDENIS (ca 1860) a épousé Marie Françoise LE DIGABEL (ca 1855). Ils sont établis à Séné comme bouchers avec leurs 2 enfants non natifs de Séné. On les retrouve également en 1891 toujours bouchers lors du nouveau dénombrement. Ils quiteront Séné quelques années plus tard.
En 1886, Jean Michel ALLANO, déclare la profession de boucher au bourg de Séné. Il est veuf de Anne LE CAM et père de Mathurin marié à Marie-Anne NORMAND. Déjà son père, Joseph ALLANO, natif de Grand Champ, était boucher de son métier comme nous l'atteste son décès à Séné en 1853.
Son frère Joseph Marie Anne naît à Elven (il mourra lors de la campagne d'Italie menée par Napoléon III en 1859, lire article). Son autre frère, Jean Marie nait aussi à Elven. La famille Allano est donc arrivée sur Séné, entre 1838 et 1853, pour prendre sans doute la suite de la boucherie de Mme Picau/Rohellec décédée en 1852.
En 1887, Jean Michel ALLANO, boucher à Séné se remarie avec Anne Marie TILLEUL dont il aura plusieurs enfants, parmi lesquels Honoré Louis ALLANO [1893-1915], soldat tombé à Verdun, Mort pour la France.
Le dénombrement de 1891 nous montre que la boucherie ne permet pas de faire vivre les deux familles. Mathurin et sa femme ont loué des terres et sont cultivateurs avec leur enfants en bas âge.
En 1901, c'est Mathurin ALLANO et son épouse Marie Anne NORMAND qui ont pris la succession de la boucherie. Son père, Jean-Michel ALLANO vit sur Cariel et déclare la profession de voiturier. En 1904, pour autant il y décèdera. Son fils Honoré sera placé chez les Laurent à Kernipitur comme berger avant d'être mobilisé en août 1914...[lire son récit sur les pages du Centenaire]
Les Sandenis ne sont plus à Séné. Mme Marie Ange LE RAY épouse du maçon Humery déclare être bouchère. A la naissance de son fils Joseph en 1899, elle déclare aussi le métier de bouchère.
En 1906, lors du dénombrement; on constate de grands changements parmi les bouchers de Séné : Mme LE RAY n'est plus bouchère; Mathruin ALLANO a cédé son commerce aux ROBINO; Une autre famille ALLANO, déjà épicier au bourg, devient boucher.
Quand l'épicier du bourg ALLANO devient boucher :
En 1906, Mme LE RAY n'est plus bouchère. . Une autre famille ALLANO, de Plescop a repris une des 2 boucheries. Mais où se situait la boucherie Allano?
Pierre Marie ALLANO [21/10/1873 Plescop - ,] veuf d'Esther LE CROIX épousée en 1897, s'est remarié à Séné le 30/1/1900 avec une fille de Séné, Marie Louise SAVARY [19/10/1880 - ?]. En 1901 ils étaient épicier au bourg. Lui déclare la profession de charcutier lors du dénombrement de 1906 et elle celle de cabaretière.
Sa fiche de matricule militaire nous indique qu'à ses 20 ans Pierre Marie ALLANO est boucher au 60 rue de Levy à Paris et qu'il déclare sa nouvelle adresse aux autorités militaires en 1902 à Séné, où il est boucher et débitant de boissons. En 1911, à la veille de la guerre, l'activité et la composiiton de la famille Allano reste inchangée. Après-guerre, en 1921, Pierre Marie ALLANO est aidée de son épouse et de son cadet Félix Joseph ALLANO (28/2/1905).
Pendant le service militaire de Félix, son frère Pierre Patern ALLANO travaille à la boucherie familiale comme le relève le dénombrement de 1926. En 1931, Félix ALLANO et son épouse Amélie AUDO, ont repris la boucherie qu'ils conservent en 1936. Le couple semble ne pas avoir eu d'enfant, la boulangerie ne sera pas reprise. Son frère Louis ALLANO [10/2/1902 - ] tiendra le café de la mairie.
En 1937, après avoir vendu leur license de débit de boissons, M et Mme ALLANO mettent en vente leur fonds de comemrce à Séné comme nous l'indique cette annonce paru dans la presse. Les nouveaux propriétaires Amélie MOISAN et Georges COURTEL revendent la boucherie à Hubert GUILLONNET, qui après guerre la transformera en l'Hotel du Golfe.
Mathruin ALLANO cède sa boucherie à la famille ROBINO :
L'autre changement qui apparait au dénombrement de 1906 concerne la boucherie Place de l'Eglise. Mathruin ALLANO déclare être "garçon boucher" chez son patron Robino. En effet, le jeune Joseph Marie ROBINO, fils du boulanger Jean Auguste et de l'aubergiste Mathurine Le Digabel, a repris le fonds de commerce que la famille Robino-Le-Gallic conservera jusqu'aux années 1970, comme nous le résume cette généalogie de la grande famille Robino qui donnera à Séné des bouchers, des cabaretiers, des boulangers, des épciers et des aubergistes.
Joseph ROBINO, le jeune garçon boucher, emploiera Mathruin ALLANO jjusqu'à sa retraite et il sera aidé par son frère Jean Marie ROBINO jusqu'à son décès. Sa belle-soeur Joséphine LE DIGABEL se remarie avec Pierre HERVIO, ancien marin militaire engagé.
Dans les années trente, c'est Auguste ROBINO et sa femme Marie Anne DANET qui tiennent la boucherie. Dans l'entre-deux-guerres, il a du exister aussi ici ou là dans les épiceries et commerces de Séné , une fabrication de charcuteires "familiale" comme le montre cette photo de 1933, où on tue le cochon à l'épicerie Janvier du bourg.
Par la suite, Claire ROBINO et son mari Eugène LE GALLIC reprendront la boucherie Place de l'Eglise jusque dans les années 1970.
A chaque changement de propriétaire, la façade de la boucherie est remaniée.
Photo prise par un bataillon allemand pendant l'Occupation
Le dénombrement de 1962 nous enseigne que de nouvelles boucheries sont installées au bourg de Séné, dont la population s'est développée. La femme du gérant de l'Hotel du Golfe, Marie GUILLARD et sa fille Jeanine GUILLONNET sont bouchères. Hubert GUILLONNET avait acquis la boucherie en 1937.
Il approvisionne également une petite boucherie à Cadouarn (rue des Algues) chez Ange LE DORIDOUR, se souvient Jean RICHARD.
Au Purgatoire la famille de Pierre MONSARD tient une boucherie-charcuterie. L'ensemble de ces boucheries faient des tournées dans le svillages de Séné, se rappelle Jean RICHARD.
Au bourg, la boucherie Le Gallic sera reprise par M. MOISSON. Ensuite, elle deviendra l'atelier du traiteur "Les Mets en Bouche Sarl" pour enfin être tranformée en crêperie, bar, salon de thé.
Dommage : la façade le reprend pas l'écusson des Robino, Hervio ou Le Gallic !
Le développement de la grande distribution va bouleverser le "petit commerce". Le supermarché COMOD s'installe place Penhouët au bourg. Il deviendra SHOPI puis Carrefour Market avec à chaque fois une boucherie dans les locaux.
Au Poulfanc, le tout premier Intermarché, rue du Verger, à la place actuelle du Netto, dispose d'une boucherie. L'Intermarché accueille également une boucherie-charcuterie en son sein.
Les nouvelles tendances de consommations trouve leur expression au travers de ces 3 créations de boucheries sur Séné.
Au Poulfanc, dans un quartier en croissance et sur un axe passant, un artisan boucher Michel JOSSIC a ouvert en juin 2005 une belle boucherie-charcuterie-traiteur.
Surfant sur l'engoument du bio, la Local BIO au Poulfanc dispose également d'un rayon boucherie et le circuit court trouve toute sa signification avec le commerce ouvert par l'éleveur M. Le Falher de Keravelo.
Les géographes en prenant des cotes et en établissant la cartographie d'un lieu, opèrent aussi un travail de mémoire.
L'histoire du moulin de Cantizac à Séné peut être retracée par les cartes disponibles.
La carte de Cassini, qui date du XVIII°siècle, montre que la vasière naturelle au fond du Golfe du Morbihan est déjà exploitée pour sa force marémotrice.
Selon Camille Rollando, (Séné d'Hier et d'Aujourd'hui) le moulin de Cantizac appartenait à Nicolas FOUQUET [1615-1680]. Le roi Louis XIV le lui confisque en 1664. Après sa mort, son épouse Marie Madeleine de CASTILLE [1635-12/12/1716] reprend la possession de ses terres de Cantizac.(sources wiki-pedia).
[Lire également l'histoire du Manoir de Cantizac qui dresse la genealogie des propriétaires du lieux]
Il faut distinguer le propriétaire, qui sous l'Ancien Régime est le plus souvent un noble ou une confrérie religieuse, de l'exploitant, le meunier, qui fort de sa technique fait tourner le moulin et moud le grain.
Ainsi, vers 1676, Yves Cormier et sa femme Jaquette Morice sont meuniers à Cantizac (Source Rollando).
Mme de Castillan va se séparer du moulin et des biens qui l'entourent qui échoient à la famille LE MEZEC d'Auray qui vendent à leur tour les biens en 1714 à la congrégation des Dames de la Visitation de Vannes (source infobretagne.com) :
Des familles de meuniers se succèdent à Cantizac pour faire tourner le moulin, créant souvent des "dynasties" de meuniers.
Louis SIMON [1670-11/01/1731 Séné-Cantizac] meunier à Elven à la date de son mariage (15/7/1698) avec Marguerite SEVENO [9/4/1684 - ] vient s'établir à Saint-Avé où nait son fils aîné André [15/6/1704]. Puis, il vient faire tourner le moulin de Cantizac où nait sa fille Catherine en 1708.
Son aîné André meurt en 1730 à Séné et la famille marit la cadette Catherine SIMON, le 24/4/1731 à Claude MORICE [1/9/1706-12/10/1739], fils d'un meunier de Locmariaquer. De cette union naitront plusieurs enfants dont Guillaume MORICE. Au décès de leur père Claude en 1739, Mme Simon-MORICE épouse le 2/8/1740 François LE MAGREIX dont elle aura une fille Jeanne [3/8/1743-4/1/1790] puis à nouveau veuve, elle prend pour mari Jean GUYOT le 20/4/1744. A l'âge adulte, Guillaume MORICE reprend les reines du moulin.
Cet extrait de naissance daté du 10 novembre 1764 nous relate que la garçon meunier Joseph NICOL employé par la famille MAURICE ou MORICE à Cantizac va "réparer sa faute" et épouser Marie Louise MORICE (née le 28/11/1737), soeur du meunier Guillaume MORICE, qui vient d'accoucher d'une petite fille nommée Anne.
En août 1762, Laurence GUIDINIAC mariée à Séné le 23/07/1754 avec Guillaume MORICE accouche d'une petite fille. Dernière trace sur les registre paroissiaux de leur présence à Cantizac.Il semble que des 5 enfants Morice, aucun n'ait repris le moulin, expliquant ainsi le changement de nom du meunier.
En épousant le 17/11/1767, Joseph BOUILLY, Jeanne LE MAGREIX, fille de Catherine SIMON et de son 2d mari, François LE MAGREIX, transmet le moulin de Cantizac à la famille BOUILLY. Le couple Bouilly x Le Magreix aura pas moins de 14 enfants, dont 2 jumelles, de 1768 à 1784. L'une des deux jumelles, Marie Jeanne BOUILLY [22/01/1776 - 7/07/1805] épousera Marc LETTY qui s'installe meunier à Cantizac.
Photo : Archives du Morbihan - Ancien moulin du Hézo. Peut-être que le moulin de Cantizac ressemblait à ce moulin avant la Révolution.
A la Révolution, le bien devient national. La terre de Cantizac et ses dépendances sont acquises, le 20 avril 1791, par M. Périer, Directeur de la Compagnie des Indes à Lorient, au prix de 85,000 livres.(Source infobretagne.com). Jacques Paul Augustin PERIER [26/05/1746-1793] s'était marié en 1777 à Marie-Charlotte CARIER. Issu d'une noblesse récente, Périer est inquiété pendant la Terreur. Il se suicide à Lorient en 1793, durant, ou juste après son incarcération. En 1794, son épouse et sa fille seront assassinées par les Chouans sur la route de Lorient en allant recueillir sa succession.
Cet extrait d'un livre atteste cette acquisition.
Dès lors le propriétaire du moulin de Cantizac sera aussi son exploitant. Ce capital sera transmis en héritage et une lignée familiale de meuniers voa faire tourner le moulin de Cantizac aux portes de Séné.
L'acte de naissance de Pierre Marie LETTY, né le 1er août 1796 ("vieux style" correspondant au 14 Thermidor de l'An IV) nous indique que ses parents, Marc LETTY [1771-26/07/1805] et Marie Jeanne BOUILLY [1776-7/07/1805], sont meuniers à Cantizac. Le père de Marc, Vincent Letty était déjà meunier à Treffléan. Les époux Letty décèdent en 1805 et il semble que de leurs nombreux enfants, sans doute trop jeunes, aucun n'ait pu reprendre le moulin.
La minoterie échoit au beau-frère de Marc Letty, Toussaint DALIDO [29/10/1780-27/05/1828], époux de Louise BOUILLY [2/09/1784-27/06/1823]. L'acte de naissance de sa fille en 1820 nous atteste l'activité de meunier des Toussaint DALIDO à Cantizac. Les DALIDO sont issus d'une famille de meuniers établis à Billiers. Une branche de la famille donnera Louis Jules DALIDO, patron du Moulin de l'Etang aux Ducs à Vannes, qui brûlera dans un terrible incendie en 1910.
La malchance règnerait-elle au sein des meuniers à Séné ? Toussaint DALIDO perd sa femme en 1823 et décède en 1828. Les sites de genealogie recensent plus de 8 enfants, dont deux jumeaux mais aucun n'arrive à l'âge adulte. A son décès en 1828, le moulin va changer de propriétaire.
Extrait du cadastre 1810 : le moulin est positionné sur la digue; la maison du moulin est quant à elle sise sur le chemin qui mène au manoir. La carte figure aussi le "gois" à Kerhuileu fait de pierres qui permet de gagner la pointe de Rosvellec.
Dans l´enquête industrielle de 1836, ce moulin est décrit comme un moulin à roue droite, avec une meule venant de Vannes et une qualité des moutures dite à la grosse (farine utilisée uniquement par le boulanger qui réalisait lui-même le tamisage) ou à la lyonnaise (son moulu une seconde fois).(Source Inventaire du Patrimoine de Bretagne).
Lors du dénombrement de 1841, Julien DENE déclare l'activité de meunier à Cantizac et emploie un garçon meunier. La consultation des tables décennales et des sites de genealogie permet de retrouver l'acte de décès de Julien DESNE à Séné Cantizac le 2/07/1855. Il a marié sa fille Mathurine Anne [19/08/1817 Plumelec - 2/03/1878 Le Hézo] à un meunier du Hézo en 1848. Il a enterré son fils Jean [28/11/1824 Plaudren - 8/07/1854 Limoges, transcrit à Séné] alors incorporé dans le 5° régiment des hussard à Limoges.
Carte postale : figurant en habit de garçon meunier coiffé de la calaboussen et chaussé de sabot. Roscoff
Toutefois sa fille, Louise Françoise DENE [29/09/1815 Plumelec] se marie en 1840 avec Pierre LE RIDANT, un gars de Séné, et déclare la profession de meunière. Pierre LE RIDANT adopte le métier de sa femme.
Extrait de cadastre 1844 :
L'étang de Cantizac reçoit les eaux du ruisseau éponyme en amont. la route principale qui relie Séné à Vannes enjambe le ruisseau au lieu-dit "Pont d'Argent". C'est l'axe principal pour aller à Vannes. En aval de l'étang, une digue, des vannes et le moulin bloquent à marée haute l'eau de mer qui a pénétré l'étang. La digue est étroite et incurvée. Un chemin poursuit, passe au plus près de la maison du meunier puis bifurque vers le manoir de Cantizac et vers Kerhuilieu. La digue sera élargie à la fin du XIX°siècle. Le tracé retenu sera droit, enlevant à la mer quelques m² d'estran.
En 1860, il l'exerce toujours lorsqu'il est témoin au mariage de Pierre Marie JOLAM, garçon meunier.
En 1845 le moulin est acheté par Charles AVROUIN FOULON qui fera faillite et vendra le moulin à Joseph Gachet. Cet annonce notariale de 1859, indique que le moulin de Cantizac, exploité par la veuve Desné est mis en vente.
La consultation fastidieuse des régistres d'état civil numérisés par les archvies du Morbihan permet de lire la profession des Sinagots qui déclarent par exemple la naissance d'un enfant. Il y a aussi le nom et la profession des témoins.
Sur cet extrait de naissance de Marie Le Viavant née à Cantinzac le 6 mars 1863, on peut lire que Pierre GACHET, meunier à Cantizac a été témoin. Pierre GACHET [2/09/1798 St Nolff - 23/12/1872 Sulniac] était déjà meunier au moulin de Caradec à Saint Nolff.
Cependant l'acte de vente de 1928 issu du Conservatoire des Hypothèques (voir plus bas) retrace l'histoire de la vente. Il apparait que le fils de Pierre GACHET, Jean Marie, acquiert en aout 1859, à l'âge de 23 ans, le moulin de Cantizac au sieur Charles Gratien FOULON, ex receveur du Morbihan qui a fait faillite. Depuis quand M. FOULON était propriétaire du moulin ? Pierre GACHET était probablement l'employé meunier de FOULON..
Jean Marie GACHET [7/05/1836-19/03/1901] se marie à Saint-Nolff le 4/11/1866 avec Marie Anne MARTIN. Ses enfants naitront à Séné. Jean Marie GACHET est un entrepreneur dynamique. Il reconstruit le moulin et l'équipe d'une chaudière pour s'affranchir des horaires des marées et de la capacité de l'étang de Cantizac qui sans doute s'est envasé avec le temps. Le moulin laisse place à une minoterie équipée de cylindres et de plansichter. le bâtiment s'élève sans doute sur au moins deux étages et les combles pour disposer les matériels de mouture.
L'abbé Louis Gachet livre dans le bulletin paroissial "le Sinagot" dans les années 1970, un souvenir d'enfance :
"Il était à un étage peut-être deux plus probablement, le 1er étage contenait surtout les cylindres – et aussi nécessairement les élévateurs qui dans toute minoterie se dressent et y fonctionnent de haut en bas et de bas en haut. Au 2ème étage, ou bien au grenier, il y avait les bluteries (plansichter) qui servent au tamisage ( ou blutage) des différentes moutures et séparent les farines et le son, jusqu’à ce que ayant monté et descendu – remonté et redescendu, tout ne tombe dans les chambres à farine pour attendre, ou dans des sacs prêts à être enlevés. Le moulin avait à son pignon Est, côté SENE, une lucarne d’où s’échappaient après un dépôt ( de grains cassés – ou de sable – ou d’autres grosses saletés), les poussières que, à tout le moins, on trouvait alors après vannage ou la battage dans les froments du pays. Pendant que le moulin tournait, l’éclairage électrique y était assuré – de même ailleurs qu’à la maison d’habitation du meunier assez proche. (Une merveille qu’un pareil éclairage en ces temps-là !!!)
Photo du chemin vicinal Source Emile Morin. Cette phto des années 30 permet de distinguer en second plan la hauteur du moulin..
Jean Marie GACHET, dont le frère Mathurin a été maire de Saint Nolff, se lancera aussi en politique et deviendra maire de Séné. Lire l'article dédié. Il donnera son accord à l'élargissement de la digue et à la création d'une voie directe vers Vannes qui changera la physionomie de Séné (lire digue et pont).
Lors du dénombrement de 1891, la famille GACHET emploie 5 domestiques et vit à Keravelo et non pas au moulin.
La carte 1887 montre également la présence du moulin et de la retenue. En face côté Vannes on reconnait les salines de Rosvellec dont il reste aujourd'hui des vestiges.
Après la mort de son père en 1901, le fils, Jean Marie Désiré GACHET [19/09/1867] reprend l'activité et apparait au dénombrement de 1901. Une certaine prospérité se dégage du foyer composé de deux ouvriers meuniers, de deux charetiers pour livrer la farine aux boulangers et de deux domestiques. Le temps où les paysans apportaient leur blé et repartaient avec leur farine semble révolu. D'autres difficultés apparaissent : se faire payer des boulangers !
Le 18 mars 1905, le Tribunal déclare en faillite la minoterie Gachet à Cantizac. Le moulin est vidé de sa machinerie et laissé à l'abandon.
Le beau-frère de Désiré GACHET, Jean Mathurin CAIJO et sa femme Née PERRTOIN, établis à Moustoirac, rachètent le moulin en 1907 pour le revendre en 1909 à M. EVENARD Mathurin sérurrier à Vannes. Après la mort de ce dernier en 1920, sa veuve et ses enfants cèdent le moulin en 1928 en indivision à M&Mme LE GOUGUEC, armateur à la Trinité sur Mer, M&Mme MAOUT et M&Mme TERIOUX. Ces trois propriétaires revendent en 1929 leur bien à Francis CHABREDIER et sa femme née FAUCONNET.
Source : Conservatoire des Hypothèques :
M&Me CHABREDIER décident dès 1930 de s'en défaire mais la vente est invalidée. En mai 1934, comme l'indique l'article de presse ci-dessus, le moulin est remis en vente mais tarde à trouver un acquéreur. On ne parle plus de moulin mais d'une maison d'habitation.
En avril 1940, les batiments sont détruits par un incendie comme le rapporte cet article de Ouest Eclair daté du 19/04/1940.
En octobre 1943, les ruines sont acquises par Eugène LE GUERNEVE de Vannes qui a dû remettre en état l'habitation. En novembre 1952, un certain Joseph Jean GUILLEVIC epoux CAUDAL acquiert l'habitation. En 1954, le moulin est acheté par la famille LE RAY et passera aux héritiers qui s'en déssaisissent 2014.
Photo aérienne www.remonter letemps (IGN) de 1952.
Le nouveau propriétaire du vieux moulin de Cantizac a complètement restauré les batiments pour en faire une habitation moderne avec une superbe vue sur la Golfe du Morbihan et la pointe de Rosvellec.
La maison du meunier existe toujours à quelques pas du vieux moulin rénové.
CHRONOLOGIE
1664 Confiscation des bien de Nicolas Fouquet
1673 Mme de Castille récupère ses biens dont le moulin de Cantizac
1676 Yves Cormier et Jaquette Morice meuniers à Cantizac
ca 1700 : la famille LE MEZEC d'Auray est propriétire du Moulin
ca 1708 famille SIMON meuniers à Cantizac
1714 ca Le moulin devient propriété des Dames de la Visitation
1735-1762 famille MORICE x Simon meuniers à Cantizac
ca 1771 : famille BOUILLY meuniers à Cantizac
1789 Révolution
1791 Le moulin devient bien national et M PERIER l'achète.
1793 A la mort de Périer la famille LETTY x Bouilly devient meunier à Cantizac
1805 Mort de Marc Letty, le moulin passe à son beau-frère Toussaint DALIDO
1828 Mort de Toussaint Dalido.
1841 La famille DENE est établie à Cantizac
1855 Julien DENE décède. Sa fille et son gendre LE RIDANT continuent l'activité
1860 LE RIDANT Pierre toujours meunier
1863 Pierre GACHET a repris le moulin
1866 Son fils Jean Marie GACHET modernise le moulin.
1901 Décès de jean Marie GACHET
1905 Faillite de Jean Marie Désiré GACHET
1907 Vente à M. CAIJO de Moustoirac
1909 Achat par M. EVENARD Mathurin sérurrier rue de l'abbatoir à Vannes
1914-18 1ère Guerre Mondiale
1928 Vente à M. LE GOUGUEC et consorts, armateurs à la Trinité sur Mer
1929 Vente à M; Francis CHABREDIER et sa femme née FAUCONNET
1930 Vente à Mr Tallusière Albert époux Hamon, invalidée pour non paiment
1934 Vente du moulin qui était une habitation par M. Chabedrier et Mme Fauconnet
1939-45 2° Guerre Mondiale
4/1940 : Incendie et destruction totale du moulin; Le moulin avait été transormé en logements saisonniers
10/1943 Vente à Eugène LE GUERNEVE époux Coquer, 9 rue de Conleau Vannes
11/1952 Vente à Joseph Jean GUILLEVIC epoux CAUDAL
03/1954 Vente à André LE RAY, charpentier de Locmaria Grand-Champ
01/1961 Vente à Mathurin Marie LE RAY
03/1970 Vente à Clément Louis Marie LE RAY époux Loyer
2007 Vente au propriéatire actuel.
Pendant de nombreuses années les Sinagots étaient pour beaucoup des paysans qui élevaient des animaux et cultivaient les champs. La production de céréales était nécessaire pour alimenter les bêtes et produire de la farine. Il fallait moudre ces céréales pour produire des aliments pour le bétail et des farines alimentaires comme la farine de blé, la farine de seigle ou de sarrasin (blé noir).
Pour moudre le grain il faut un moulin, une meule et une force motrice pour l'actionner. L'histoire montre que l'activité meunière s'est souvent développé le long des cours d'eau pour tirer avantage de la force du courant régulier.
Cet extrait du cadastre de 1844 montre qu'il existait le moulin du Prat sans doute situé sur la rivé gauche du Liziec à Vannes. Près de la chapelle de Saint Léonard à Theix, existait un autre moulin à vent sur la butte.
En France, les moulins sont le troisième patrimoine bati après les églises/chapelles et les châteaux.Notre commune atteste de la présence de 2 moulins à vent à Cadouarn et Cano dont aucune trace ne subsiste et de 2 moulins à marée, le moulin de Bilherbon aujourd'hui disparu et celui de Cantizac (lire article dédié)
Et peut-être un moulin bateau à Barrarach ?
Un internaute m'a fait remarqué que la carte de Cassini positionne le symbole d'un moulin en bas de la butte de Barrarach.
Sous l'ancien régime, il était fréquent que des meuniers installent un ponton ou une barque sur la rive d'une rivière pour tirer avantage de la force motrice du courant. Au goulet de Conleau, aux heures des marées, le Golfe du Morbihan développe un courant suffisamment puissant pour qu'un meunier ait installé une machine pour moudre le grain. Il faudrait trouver trace du-dit meunier dans les actes d'état civil d'avant la Réolution pour confirmer cette hypothèse.
Le meunier banal jusqu'à la Révolution
Les seigneurs exercent un véritable monopole en instaurant l'obligation d'utiliser le moulin banal pour toutes les personnes qui habitent dans l'aire du moulin. Fixée approximativement à une lieue.
Les paysans ont recours au moulin banal moyennant un prélèvement sur le grain appelé "émolument". Le meunier, lui, touche à titre de salaire, une rétribution en nature, "la mouture". Il travaille la plupart du temps avec un apprenti et quelquefois avec un chasse-pochée, qui va chercher le grain dans les fermes et livrer la mouture.
A partir du XIVè siècle, pour éviter au meunier de prendre trop d'importance dans la filière du pain, la profession de boulanger lui est interdite. Dès le XVIIè siècle, pour se diversifier, le meunier essaie d'assurer le transport de la marchandise de sa clientèle boulangère et de faire le commerce des grains et de la farine.
La prolifération des moulins en 1789
Au fil des siècles, le droit de moulin est de plus en plus remis en question. Le moulin du seigneur ne suffit pas toujours à la demande, les temps d'attente sont trop longs, et faute de concurrence, la qualité de la mouture s'en ressent.
Les révoltes des Moulinets se multiplient.
La Révolution met fin aux banalités en mars 1790, ce qui entraîne la multiplication des moulins qui deviennent alors des entreprises privées. Posséder un moulin est alors un signe d'indépendance, de richesse, et de symbole de prospérité.
Les grands changements dans la profession
Ces changements interviennent sous le Second Empire, vers le milieu du XIX ème siècle.
La meunerie traditionnelle laisse la place à la minoterie moderne avec l'arrivée des manufactures, et l'introduction des évolutions techniques. La machine à vapeur libère les usines des contraintes des énergies naturelles et les meules sont remplacées par des cribles cylindriques en "bluteau" , ce qui permet un meilleur nettoyage des grains.
Les moulins à vent et les petits moulins à eau sont les premiers à disparaître par milliers vers 1860.
Le moulin de Cadouarn...
Une vielle carte de Séné datant de la fin du XVIII siècle mentionne déjà le moulin de Cadouarn que l'on retrouve également sur plusieurs cartes le long du XIX°s.
Cet acte de naissance du 15/07/1774 nous indique que Guillaume ROGER, est meunier à Cadouarn au moins depuis 1770 date de la naissance de son fils Jean, dont la marraine n'est autre que Jeanne MAGRE, femme du meunier de Cantizac.
Une vieille coupure de presse permet d'attester son activité en 1851. Le récit de ce malheureux accident survenu en juin de 1851 quand le jeune Terrien âgé de 10 ans heurta les ailes du moulin..
Toutefois, si le dénombrement de 1841 indique le meunier présent à Cano, les dénombrement de 1841, 1886 et 1891 ne mentionnent pas un meunier à Cadouarn.
On retrouve pourtant au dénombrement de 1901 la famille Le Garec installée à Cadouarn et déclarant la profession de meunier. Claude Marie LE GAREC [23/10/1865 Sarzeau - 30/09/1949 Séné], dont le père était meunier à Sarzeau, s'est marié à l'ïle d'Arz le 6/11/1890 avec Pélagie Marie DALIDEC. Il déclare alors la profession de meunier.
Le lieu de naissance de ses enfants permet de dater sa venue à Cadouarn. Joseph Louis nait le 4/04/1897 à Séné et un témoin à sa naissance n'est autre que Jean Marie Gachet minotier à Cantizac ! preuve d'une bonne entente entre confrères meuniers.
NB : Un des enfants du meunier GAREC sera mobilisé pendant la Première Guerre Mondiale et décèdera des suites d'une maladie pulmonaire. Son nom figure au monument au morts de Séné. Jean Marie Joseph GAREC [11/06/1895-18/10/1917].
Au dénombrement de 1906 la famille est recomposée. Veuf le 8/08/1902, Claude LE GAREC épouse le 18/06/1905, Joséphine Marie CADERO, fille de pêcheur à Cadouarn et lavandière.
L'abbé Gachet Louis, fils de Jean Marie Gachet a livré au recteur de Séné ses souvenirs d'enfance dans le bulletin paroissial de 1975. Voir document pdf ci-joint.
"Les familles cultivaient du blé qui après moisson et battage était apporté au moulin pour en faire de la farine. Chacune reprenait sa farine qui était ensuite apportée au boulanger. La paille servait pour faire des matelas ou des couchettes sur les bateaux."
Que c'est-il passé ? Le moulin à vent de Cadouarn est-il toujours compétitif face à la nouvelle minoterie de Gachet ? Le moulin est mis en vente en octobre 1907. Il sera démolli en 1920 pour laisser aujourd'hui place plus tard à un transformateur EDF. La rue du Moulin près du Ranquin témoigne de son existence.
L'abbé Le Roch, dans le bulletin paroissial Le Sinagot, se risque à un croquis pour illustrer à quoi ressemblait le moulin à vent de Cadouarn. Etait-il construit de pierre comme ce moulin qui existait à Saint-Armel.
Le moulin de Cano...
L'autre moulin à vent en Séné était situé sur une butte à Cano comme nous l'indique ces extraits de vieilles cartes. Aujourd'hui, dans le quartier de Kercourse les rues Er meliner et le clos Melin rapellent son existence.
Carte d'Etat major 1820-1866 :
Sur l'Etat Nominatif des Habitant de 1841, on retrouve la trace de la famille Gicquello installée à Cano. Louis est veuf et s'active avec son fils Yves et ses deux filles.
Le moulin a marée de Bilherbon...
La force des courants des marées a été utilisé sur 2 sites de la commune : le moulin de Cantizac et le moulin de Bilherbon.
Il existait un étang à Auzon et comme le montre la carte de Cassini, une petite roue faisait actionner un moulin. Le cadastre napoléonien de 1810 montre que l'étang existe encore sans mentionner de moulin.
Le moulin est encore attesté dans la carte marine (Shom) de 1887 et disparait lors de l'assèchement de l'anse de Mancel.
Le site accueillera un casernement de douanier à situer sur l'île de Mancel au plus près des salines.
Avec la destruction de la digue en 1937, l'eau de mer reviendra toucher le bord de la digue de Bliherbon. Aujourd'hui le site est une propriété privée où des chevaux trottent près du ruisseau d'Auzon.
L'activité minotière a plus durée sur le site de Cantizac à l'entrée du bourg de Séné. (Lire article sur le sujet).