Portraits
- Léon TREMBLE, la mosaïste de passage à Séné
- Les Légionnaires Sinagots
- Auguste JANVIER, soldat de 14-18, Légion d'Honneur
- LE MOUSSU, Communard natif de Séné
- LE MEUT Emile, Général sinagot 1874-1949
- LE LAYEC, fils du boulanger devient Gouverneur
- LE ROY Roger 1925-2020
- Marguerite LAYEC, institutrice dévouée
- Ernestine MORICE, parcours de vie [1909-1999]
- Aimé CAPPE, instituteur libre...à bicyclette
- ALLANIOUX marin de dirigeable, 1887-1984
- François QUESTER : 1er Centenaire de Séné 1919
- Marie BENOIT, la boulangère résistante
3. DU MOYEN-ÂGE A LA REVOLUTION
LES SALINES DE SENE, PROPRIETE DU CHAPITRE CATHEDRAL DE VANNES
de 1721 à 1791
S1 l'on admet que les nombreux fours et ce pots d'augets, dont nous avons parlé dans un précédent article et qui ont été découverts à partir de 1902 sur les rivages de SENE, étaient destinés à la fabrication du sel marin, il faut dire que cette industrie remontait à une haute antiquité dans le pays ... Ces salines rudimentaires et miniatures (plutôt salières que salines; durent être abandonnées vers l'an -56, lors de l 'occupation romaine, à moins que ce ne soit plus tardivement, si elles ont continué à être exploitées par les Gallo-Romains.
Dans ce cas, elles furent délaissées lors des invasions barbares au début du Vème siècle. On sait qu'à cette époque, des hordes venues de l'Ouest et du Nord déferlèrent sur le pays, dévastant tout, semant la panique, le pillage et la désolation, l'incendie et la mort sur leur passage. Les lieux habités furent changés en déserts et toute vie cessa.
L'industrie du sel ne fut reprise semble-t-il dans le pays , du moins sur une grande échelle, que longtemps plus tard et sous une forme, suivant un procédé totalement différent. Les godets utilisés primitivement pour l'évaporation de l'eau et la cristallisation du sel disparurent ; les salines se modernisèrent et se transformèrent en marais salants. Le sel s'obtint alors sur de vastes surfaces: offrant au phénomène de l'évaporation de l'eau de mer une plus grande étendue. Il fut également transporté dans des récipients plus importants que les centaines de petits godets d'argile d'autrefois.
Il est difficile, écrit Amédée de Francheville, d'assigner une date certaine à l'origine des nombreuses salines qui ont fait jadis la richesse de notre contrée. Et l'auteur laisse entendre que l'industrie du sel a pu être implantée au pourtour du golfe du Morbihan, à SENE, et sur le littoral de Rhuys comme dans la baie de CARNAC, par une colonie de Saxons, de même que dans la presqu'île de GUERANDE et du CROISIC, à SAILLE.
On sait comment se fabriquait le sel, il n'y a pas si longtemps. La saline qui etait un relai de mer disposé pour la cristallisation du sel, avait pour accessoires la vasière ou réservoir d'eau de mer et le gobier qui servait à préparer cette eau avant de la faire entrer dans la saline. Celle-ci se subdivisait elle-même en oeillets, fares, adernes et appartenances. Ces divers compartiments, séparés par de petites digues hautes de
30 cm, étaient fermés au moyen de petites planches verticalement placées ; elles servaient aux paludiers à retenir les eaux nourricières et à les répandre dans les oeillets ou bassins d'évagoration. Les oeillets occupaient le milieu de la saline ; ils étaient rangés sur deux lignes parallèles et séparés par un étroit canal profond au plus de 15 cm. Les servitudes occupaient le reste de la saline. L'eau de mer, chauffée et préparée par l'action du vent et du soleil, en parcourant les sinuosités des canaux nourriciers, des fares, des adernes, des appartenances, était introduite dans l'oeillet à la hauteur de 7 cm. Le sel blanc, semblable à une glace, se formait à la surface. Le sel gris ou gros sel se déposait dans le fond de l'oeillet et se recueillait sur de petits plateaux ménagés au centre et nommés bordures. Il y restait jusqu'à ce qu'il soit ramassé en tas (mulon) ou amulonné. Une planche nommée laz, longue de 50 cm, servait à le recueillir. Une lousse ou pelle en bois, une baguette ou pelle concave également en bois, étaient les seuls outils. employés par les cultivateurs des marais ou paludiers.
Les chanoines du chapitre de VANNES viennent "se saler" ou plus exactement "se sucrer" à SENE.
Les revenus du chapitre cathédral n'avaient jamais été très importants ni les chanoines très riches. A diverses reprises, l'Evêque fut obligé de leur trouver des sources de revenus pour vivre honorablement. La plus ancienne dîme ou contribution attribuée au chapitre paraît avoir été celle provenant de Saint Patern de VANNES. L'Evêque Maengui donna vers 1080, la moitié de cette paroisse au chapitre et en 1177, son successeur, l'évêque Rotald, lui céda l'autre moitié. Devenu ainsi recteur primitif de Saint Patern, le chapitre perçut naturellement les dîmes de la paroisse ; elles se percevaient en nature sur les villages d'Arcal, le Versa et autres. Mais, en 1790, ce reste de dîme ne donnait plus que 4 perrées et demie de froment valant 121 livres 10 sols.
A cette époque reculée (XIe - XIIe siècles), SENE était¬elle déjà paroisse indépendante de Saint Patern? ... Nous l'ignorons, mais il semble bien qu'elle en ait été détachée au XIe siècle, après l'expulsion des pirates normands, lors de la restauration religieuse de la Bretagne.
Par une bulle du 23 septembre 1451, le Pape Nicolas V, pour venir en aide au chapitre, autorisa l'évêque de VANNES, Yves de Pontsal qui s'était adressé à lui au nom des chanoines, à unir six paroisses au chapitre, dont SENE. Les deux tiers des revenus de la paroisse appartiendraient au chapitre et l'autre tiers au recteur du lieu. Cette fois, l'appoint était sérieux. Les dîmes de SENE ou redevances écclésiastiques revenant au chapitre étaient affermées en 1521 pour 80 perrées de froment ; en 1790, elles rapportaient 47 perrées de froment et 30 perrées de seigle qui valaient alors environ 1,779 livres.
En 1720, la chute du système financier "Lavo" avait causé partout en France d 'effroyables ruines. De nombreux capitaux avaient été remboursés au chapitre cathédral de VANNES en billets de banque et ces
billets perdirent aussitôt leur valeur. Le chapitre, pour relever ses finances, sollicita du roi, par l'intermédiaire de l'évêque, la concession des terres vagues situées le long de la côte méridionale de SENE pour y établir des salines. Louis XV accorda au chapitre sa demande par un acte passé en conseil d'Etat le 7 février 1721, confirmé par lettres patentes du mois d'avril suivant, à la condition de payer une redevance annuelle de 30 livres au Domaine,
Dès 1725, le chapitre se mit à l'oeuvre et employa à l'établissement de nombreux marais salants, des capitaux considérables qui lui furent peu à peu remboursés par le clergé du diocèse. Ces salines avaient été installées à Kerbiscon, Dolan, Bindre, Falguerec, Broël, Micbsot et Kérarden. Elles furent par la suite, partagées entre les 14 chanoines qui formaient le chapitre, en réservant 491 oeillets pour la mense ou la table capitulaire et
54 pour le recteur de SENE. La part de la mense fut louée en 1740 pour 9 ans à raison de 4. 173 livres 10 sols par an. C'était comme on le voit, un joli denier.
Ces marais prirent bientôt de nouveaux développements, si bien que les salines qui rapportaient 3. 185 livres au chapitre en 1730, lui donnaient un revenu net de 15.556 livres en 1765. Trois ans plus tôt, on avait procédé, le 26 février 1762, en assemblée capitulaire à un partage définitif qui fut approuvé par l'Evêque et sanctionné par lettres patentes du roi. Dans ce partage, sur 2.511 oeillets, 1679 furent attribués aux chanoines et partagés entre eux et 832 furent réservés à la maison capitulaire pour payer ses charges. Le tout avait une valeur brute de 21 .408 livres par an, mais on déduisait les bénéfices des paludiers et la part du recteur. Il ne restait plus que 15.556 livres, dont 12.308 livres 10 sols pour les chanoines et 3.247 livres 10 sols pour leur maison,
Mais bientôt, la concurrence des sels étrangers vint arrêter la prospérité des salines de SENE; et, aux approches de la Révolution, il fallut aux chanoines faire de nouvelles économies.
Un état des biens et des charges du chapitre, fourni à 1l'administration civile en 1790, déclare qu'il avait trois sources de revenus dont la principale était l'industrie du sel de SENE :"les gros fruits comprenaient
les salines de SENE". La part réservée aux chanoines était alors de 1.662 oeillets qui produisaient à peine 10.000 livres au total.
La valeur relative de la livre changea beaucoup avec le temps : en 1275, la livre valait 113 Fr de notre monnaie de 1900 ; en 1325, elle valait 82 Fr et en 1375 seulement 55 Fr, tandis qu'en 1425, elle ne valait plus que.
40 Fr et en 1475 : 35 Ff. La dévaluation des monnaies ne date pas d'aujourd'hui.
Mais, voici que la Révolution éclate et que l'Assemblée Nationale confisque tous les biens écclésiastiques. Les salines de SENE furent vendues à leur tour. Le 16 mars 1791, M. LE MAUFF achetait 75 oeillets à Michot pour 16.000 livres. Le 30 mars, M. GUILLEMOT acquit 103 oeillets à Dolan pour 5.425 Fr. Du 20 au 30 avril, M. PERIER de LORIENT se fit adjuger le plus gros lot, soit 2.333 oeillets à Kerbiscon, Bindre, Falguérec, Brouel et Kérarden pour 282.550 livres. Ainsi disparut, emportée par les acheteurs de biens nationaux, cette propriété écclésiatique : les salines de SENE, ayant appartenu au chapitre cathédral de VANNES pendant 70 ans.
Nous terminons cette étude sur les salines de SENE par une référence à la vie admirable du bon pasteur que fut M. Pierre LE NEVE, recteur de la paroisse de 1721 à 1749. Depuis plus de 15 ans (1705), il était vicaire à
Saint Patern, lorsque Monseigneur FACON, évêque de Vannes, le nonnna à la curé de SENE le 12 mars 1721. Prêtre mortifié, aimant la pauvreté et charitable à l'extrême, il conquit très tôt et d'emblée le coeur de ses paroissiens. Non seulement il s'occupait de leurs besoins spirituels, mais rien de ce qui regardait leurs intérêts temporels ne lui était étranger. Lorsqu'on établit les salines à SENE en 1725, il s'en affligeait à cause de l'embarras que devraient avoir les pauvres gens pour trouver à l'avenir un lieu propre à faire paître leurs bestiaux. Comme on voulut lui faire entendre que ces salines augmenteraienc les revenus du presbytJre : "Beau profit vraiment, répondit-il, on donne à ceux qui en ont et l'on ôte à ceux qui n'ont pas !" Tel était le détachement de ce bon recteur qu'il se refusait le nécessaire pour soulager les pauvres et qu'il n"estimait les biens de la terre qu'autant qu'ils lui fournissaient le moyen de taire des aumônes. Il en répondait d'abondantes jusque dans les faubourgs de Vannes. L'Evêque lui ayant demandé un jour quel était le revenu exact de son bénéfice : "Il vaut autant que votre évêché Monseigneur, répliqua-t-il, il vaut le paradis ou l'enfer !" Parole pleine de sens et qui montre combien était grande la vivacité de sa foi : il comprenait bien que son salut était attaché
à celui de son peuple.
2. L'ANTIQUITE
Sur la voie romaine Nantes-Vannes-l'Aberwrach, qui passait sur le territoire actuel de Séné, s'embranchent bon nombre de voies secondaires qui rejoignent toutes le Golfe: par exemple celle qui partait de Vannes, passait par Séné, desservait Gornevez, Moustérian, Auzon, quittait Séné à Montsarrac, rejoignait Le Hézo (le bras de mer était plus étroit que maintenant) : axe qu'on a continué à utiliser au Moyen-Age.
L'artisanat, sans doute établi plus tôt, reste actif pendant la période romaine poteries (trouvées en 1891 près de la Grotte de JeanII), morceaux de tuiles à rebord (à Montsarrac, Bellevue, Dolan, St Laurent, Moustérian, Michotte), carreaux de dallage (à Kerdavid), restes de murs romains (à Auzon), briques (à Méniec). Ces vestiges en constituent la preuve.
Dès le IVème siècle, et peut-être avant, existe le vocable SENAC, nom de la bourgade et des habitants, qui fait au pluriel SENAGO. Le suffixe vient bien du -ACUS latin, non de l'-ACOS celtique.
Existence de voies romaines vers le Golfe, vestiges d'habitations gallo-romaines aisées, vocable gallo-romain imposé : autant d'indices de l'existence d'une colonie d'estivants galle-romains assez nombreuse.
VESTIGES DE L'OCCUPATION ROMAINE A SENE
Quelques années après là démolition de l'ancienne église paroissiale, en 1885, Ernest RIALLAN parcourait le territoire de la connnune à la recherche des traces laissées par les Romains. Il a consigné ses découvertes dans une brochure imprimée en 1886 et que nous avons sous les yeux. Voici ce qu'il a trouvé :
a/ au BOURG
"L'ancienne église paroissiale de Séné, dont l'époque était conjecturale, a été démolie en 1877 et remplacée par une autre plus vaste. Le cimetière qui l'entourait a été reporté en dehors du bourg. M.GUYOT, JOMARD et moi avons relevé dans le sol autour de l'église neuve, près de ses murs, principalement des côtés sud et est, de grands et de menus fragments de tuiles romaines ayant leur rebord. Il était impossible de les confondre avec d'autres fragments de briques modernes qui parsèment aussi le sol et proviennent de la construction récente. Le presbytère touche à l'église; le jardin qui y attient et en dépend, et surtout sa partie Est contient une grande quantité de fragments de tuiles à rebord, de tuiles de recouvrement et de briques romaines. On les rejette hors du jardin dans un terrain vague ou chemin. Nous avons remarqué des briques de même origine et des pierres brûlées dans le mur Sud de ce jardin, le long d'une venelle.
Il paraît donc certain que la chapelle primitive de Séné a été construite sur les ruines d'une habitation romaine et que les chapelles qui lui ont succédé ont été édifiées sur le même emplacement.
Nous avons observé, à quelques pas du cimetière nouveau, dans un chemin et au bord de la route du Bourg à Vannes, un monolithe qui nous a paru être un ancien menhir et dont la partie supérieure a été taillée en forme de croix. Sa hauteur est de 1,80 m. La largeur aux bras de la croix est de 55 centimètres. Cette croix romane est toujours à sa place ( voir Photo ci-contre)
b/ à KERLEGUEN et KERARDEN
A Kerléguen, village situé sur le sommet d'une colline et siège d'une ancienne seigneurie, nous avons trouvé dans le sol rocheux d'une cour de ferme et devant la maison de Marie Jeanne LE DUC, des fragments de "teguloe" (tuiles) avec rebord et quelques autres de briques romaines. Les débris de teguloe avaient encore le crochet caractéristique prouvant leur authenticité. Là aussi, il y a eu un habitat romain, mais il en reste à peine quelques vestiges.
A l'entrée Nord du village de KERARDEN, situé à 500 m de KERLEGUEN au sommet d'un grand plateau, nous avons constaté la présence de nombreux fragments de tuiles à rebord et de briques romaines. Il y en a dans le sol, parmi les pierres, devant la maison de M. NOBLANC et celle voisine de M. DORIOL.
Il s'en trouve davantage encore à l'autre extrémité du village dans le sol devant l'habitation de François QUESTER. On en voit aussi dans les chemins de ce village qui s'étend en longueur. M. QUESTER, en labourant un champ nonmé OVERTIN, à plusieurs centaines de mètres au Sud-Est du village, près d'un marais et d'un bras de mer et compris dans une grande pièce appelée PENAVAL, y a trouvé et ramené à la surface plusieurs fragments de tuiles à rebord et de briques. Il les a conservés et ramenés chez lui alors qu'il avait beaucoup d'autres pareils qui rougissent le sol devant sa porte.
Cette butte dominant le fond du golfe a dû être occupée par des postes romains et même par des villa et constructions importantes.
c) à MOUSTERIAN.
Les lieux nommés Moustoir, en breton MOUSTOER, sont nombreux dans le Morbihan. Ces noms indiquent qu'il y a eu dans ces lieux des monastères détruits probablement par les Nonnands au IXe ou Xème siècle.
Celui de MUSTERIAN (Moustér-Yann) a vraisemblablement occupé la place d'un établissement romain. En effet, dans un endroit nonmé "LEUR-GUER: aire du village", cadastré Section G n° 633, joignant au Nord le village de MOUSTERIAN, ancienne seigneurie, et dont une partie s'appelle CALAFRE, on a extrait des tuiles à rebord et des briques romaines mêlées à de la cendre. On sait qu'au départ de l'armée romaine d'occupation, au Ve siècle, leurs établissements ont été brûlés.
d) à CANIVARC'H.
En juillet 1885, on démolissait dans ce village un très vieux mur menaçant ruine et formant le côté Est d'une maison habitée par M.ROZO, cultivateur ; On trouva dans ce mur, une hache préhistorique en pierre, appelée "CELTOE", que les habitants gardèrent quelques jours. Elle était posée à plat à l'intérieur du jambage de la seule fenêtre de la chambre principale, au rez-de-chaussée, à environ I m de hauteur au-dessus du sol, 20 cm au-dessus de l'appui de la fenêtre et 20 c:m dans l'épaisseur du mur.
Ce celtoe de 12 cm de long, 4 cm 3/4 de largeur au tranchant et d'un peu plus de 30 cm d'épaisseur, était en diorite, de forme régulière, un peu massive, et avait reçu un beau poli. Il était assez bien conservé. Seuls, le bout de la pointe était cassé et le tranchant très émoussé comme par percussion.
Evidemment, ce "mèn-gurun : pierre de tonnerre" comne l'appellent les paysans, avait été placé dans ce mur avec intention, sans doute comne préservatif de la maison et de ses habitants, gens et bêtes, contre une foule de malheurs : maladies, fléaux du ciel, surtout la foudre, maléfices de tout genre.
Cambry, dans son ouvrage "Voyage dans le Finistère", rapporte que les Bretons enchâssent un silex dans les murailles de leur maison pour la préserver du tonnerre ; et J. Miln, dans ""Fouilles à CARNAC", dit qu'on avait coutume à CARNAC, à la fin du siècle dernier encore, de mettre une hache en pierre dans la cheminée pour la même raison.
On n'avait pas encore trouvé, dans nos campagnes, de celtoe placé et maçonné dans le mur même d'une habitation et près de la fenêtre par où beaucoup de mauvaises choses peuvent entrer. Le fait de la découverte de CANIVARC'H paraît avoir été le premier de ce genre constaté dans la contrée.
N.B. A propos de la présence des Romains à SENE, il est bon de noter qu'un encroit du bourg se nomme encore COR-CASTEL ou le Vieux Château et qu'une partie de la voie romaine de VANNES à NANTES passe au VERSA et à SAINT-LEONARD.
LE MYSTERE DES FOURS A AUGETS ET DES DEPOTS D'AUGETS
Cette question dont on parle depuis la fin du siècle dernier a fait couler beaucoup d'encre et de salive. Nous résumons ici ce qui en a été dit, espérant intéresser les habitants de SENE qui possèdent, sur le territoire de leur comnune, plusieurs gisements d'augets inventoriés par différents spécialistes.
Ces fours rudimentaires et très anciens que l'on a trouvés en grand nombre sur le littoral atlantique depuis la Vendée jusqu'aux rives de l'Odet et particulièrement dans le Morbihan: pourtour des îles du Golfe, BELLE-ILE, GROIX, côtes de QUIBERON, d'ERDEVEN, de PLOEMEUR (environs de KERROCH et du FORT-BLOQUE), toujours en bordure de la mer, servaient à la cuisson de petites auges d'argile travaillées à la main, des augets, dont l'usage pose une énigme, de même que l'identité des utilisateurs.
Creusés dans les dunes, les fours présentent une forme rectangulaire de dimensions variables, allant de 1,5O m à 3 m de longueur, de O,5O m à 1,50 m de largeur, de 80 cm à lm de profondeur. Leurs parois sont verticales et constituées d'argile enveloppant souvent des galets. Des voûtures et des entretoises d'argile cuite portatit des encoches ou parfois des barres, permettant le soutien des augets pendant la cuisson.
Les augets, de dimensions et de formes également variables (cylindriques, tronc-prismatiques dans le Morbihan) résultent du pli.age d'une galet.te très fine. Certains fours pouvaient en contenir jusqu'à 150.
Les débris de ces petites poteries, examinés au carbone 14, font remonter les dates de leur fabrication de l'an 300 à l'an 50 avant Jésus-Christ. Les lieux d'implantation des fours se situent toujours en bordure du litt~ral dans les terrains sabtonneux. Des endroits de stockage d'augets ont été repêr ês entre les fours et la mer. On n'a relevé aucune trace d'habitations à proximité des gisements, sauf en un seul endroit, mais la preuve n'a pas été faite d'une concordance des dates, les ruines retrouvées pouvant .être très postérieures à la fabrication des fours à augets. Le combustible utilisé dans les fours était le goémon séché.
Disons tout de suite que la thèse retenue jusqu'à preuve du contraire est la fabrication ou le transport du sel marin par les habitants de nos côtes. On sait qu'avec la pêche à bord des sinagots, la grande ressource de SENE au temps jadis fut l''industrie du sel, bien avant la culture maraîchère, surtout celle du chou-pomne.
Ces augets ont-ils été des salines primitives?...
A la suite de ces généralités, voyons quelles ont été les. découvertes faites successivement sur le territoire de SENE.
Dès 1886, M. RIALAN signalait le four à augets de MONTSARAC, situé sur la lande appelé "er Bill".
En 1902, M. H. QUILGARS, un spécialiste de la presqu'île guérandaise, relevait celui de MOUSTERIAN en même temps que de nombreux autres. découverts dans les parages : à ARRADON, BADEN (île longue), CRACH (Rosnarho), l'ILE AUX MOINES (près Kergonan) , au HEZO, à PENESTIN, à SAINT JACQUES en SARZEAU, sur l'îlot de MOUCHIOUSSE ...
Le Commandant BAUDRE découvrait lui-même trois petits foyers dans l'anse de MORIAC près de CONLEAU, en 1939, à la pointe de BROUEL en l'ILE AUX MOINES en 1938, à ILUR en 1948.
Etudiée et débattue depuis le début du siècle, la question des fours à augets fut posée en 190:! devant la société polymathique du Morbihan par M. QUILGARS, Divers savants et chercheurs se sont intéressés à ce problème dans notre dépattement.
En 1948, le Docteur LE PONTOIS de VANNES mettait au jour à la pointe Nord-Ouest de l'ancienne île du PESCHIT (Pesked?) près de MONTSARAC en SENE, un ancien four à augets assez bien conservé.
"Ce gisement, êcrit-il, mis à jour par un progrès récent de l'érosion marine, occupe la tranche d'une minuscule falaise de quelques décimètres de hauteur et est découvert sur une tranche presque horizontale. Les augets sont très fragiles pour être extraits autrement qu'en délitant avec un filet d'eau la terre végétale qui les englobe. Les fragments constituent presque la totalité du gisement, mais l'érosion horizontale montre en coupe, une pile, couchée sur le côté, d'augets emboîtés les uns dans les autres. De plus, le rocher mis à nu, au voisinage et au contact du gisement, a été soumis à l'action du feu, et ce rocher se prolonge , au-dessous du niveau des hautes mers des grandes marées actuelles".
Le commandant BAUDRE et M. Yves ROLLANDO qui ont reconnu ce gisement donnent quelques explications sur la question des augets et de leur emplacement. M. ROLLANDO fait remarquer qu'au point de vue géologique, l'ancienne île du PECHIT est constituée dans sa régidn sud-ouest par une crête de gneiss, adaptée à la structure armoricaine. Elle se prolonge en direction nord-ouest par une plate-forme rocheuse située presqÜe au niveau des hautes mers actuelles (0,40 m),
Cette situation a permis aux tempêtes de suroît de regagner temporairement l'ancienne plature et de déblayer la mince couche argilo-terreuse du gisement, A l'Est, dans une 'petite anse, les gneiss passent à des mécachistes très délités, tandis que le sol s'abaisse graduellement vers les marais septentrionnaux. Il ajoute que la hauteur de ces vestiges gallo-romains découverts : Le Péchit ,0,40m; Ilur 1,40 m; au dessus des hautes marées permet d'affirmer que pendant une partie de la période gallo-romaine et au IVème siècle, la mer n'avait guère dépassé son niveau actuel.
Au sujet de l'utilisation des augets, les deux savants admettent sans toutefois s'y rallier absolument, l'hypothèse admise par M. QUILGARS, à savoir qu'ils avaient pu servir à la récolte du sel. Ils constatent qu'il n'a pas été trouvé d'augets ni de fours en dehors du littoral, au contact de la mer et que si les augets ne servaient pas à récolter le sel, ils étaient pour le moins fabriqués et utilisés par une population maritime vivant des produits de la mer.
En ce qui concerne leur âge, bien qu'au voisinage on ait parfois relevé des silex néolithiques, des briques à rebords et des poteries grises, on peut admettre qu ils datent de l'époque gallo-romaine ...Il y a lieu de noter le nombre reospectable de briquettes à gros éléments qui accompagnent les dépôts de MOUSTERIAN.
Les constatations faites à MOUSTERIAN, à ILUR aussi bien qu'à MONTSARRAC paraissent indiquer que le mode de cuisson suivant a été utilisé : four en plein air, c'est-à-dire à ciel ouvert, les augets étant déposés sur un lit de briquettes reposant elles-mêmes directement sur le sol rocheux qui a conservé des traces de l'action du feu. Le gisement de MONTSARAC est particulièrement intéressant en ce qu'il recèle d'assez !:>eaux spécimens d'augets.
Dans le bulletin mensuel ce la société polymathique du Morbihan de juillet 1964, le Docteur J. LEJARDS qui habitait SENE a résumé, en reprenant le titre de l'importante communication d'Henri QüILGARS en 1902, les découvertes et l'étude faites sur ce sujet. Yves COPPENS avait déjà dressé, en 1954, l'inventaire de ces installations industrieiles proto-historiques, mais, en l''espace de dix ans, l'inventaire de ces instatiations s'était enrichi de deux nouvelles stations sur le territoire de SENE :
-une de 6 fours, à la pointe sud de l'île de Boëd ;
-l'autre, simple dépôt, à CADOUARNE.
En outre, les installations de MOUSTERIAN qui, à l'époque, ne relevaient que 3 fours, en comptaient en 1964, neuf dans la tranche de la falaise, sans compter trois autres mises à jour sur le dessus de cette falaise et une treizième découverte en 1964.
Dans son étude des stations connues en 1963 sur la commune de SENE, le Dr LEJARDS ne fait que frôler le problème de l'utilisation de ces augets. Il croit que leur appartenance à l'industrie du sel ne fait plus de doute, Il signale :
A - les stations de CARIEL et d'ER BILL ou MONTSARAC dont ~l ne reste plus aucune trace, la mer les ayant détruites.
B - la station du Peschit, découverte par le Dr LE PONTOiS en 1948, étudiée par le Commandant BAUDRE et Y. ROLLAND en 1949, puis par Y. COPPENS en 1954. Attaquée par la mer, elle était également en passe de disparaître. Voici la description que le Docteur LEJARDS en fait :
"Située sur une micro-falaise de 40 à 50 cm de hauteur, eile mesure de 5 à 6 m de développement dans le sens Nord-Ouest - Sud-Est, c'est-à-dire parallèlement à la côte. Elle paraît avoir été installée sur des terrasses à 3 niveaux différents. Le niveau inférieur, encore atteint par les hautes mrs, n'est plus représentée que par une zone circulaire de 0,60 m de diamètre, faite de gneiss fendillés e rougis par le feu avec, épars aux alentours et parmi les fissures de la roche des fragments d'augets. Environ 1,50m en arrière, une terrasse argileuse, présentant des traces nettes de cuisson, se développe à environ 30cm au¬dessus du niveau du précédent, sur cette terrasse, une couche d'environ 7 cm d'épaisseur faite de nombreux fragments d'augets mêlés de terre. Ce niveau peut être suivi sur 40 cm de largeur environ.
Une troisième terrasse argileuse lui succède qui présente sur 4 à S cm d'épaisseur de nombreux débris d'augets, intimement mélangés à de la terre végétale. La largeur moyenne de cette dernière terrasse semble d'environ 2,50 m. Les trois niveaux n'ont rien livré d'autre que des fragments d'au~ets et des morceaux informes d'argile mal cuite".
C - La station de CADOUARNE.
C'est une station de minime importance, située dans la petite falaise qui s'étend face à l'île de BOEDE, à gauche du chemin joignant le village de CADOUARNE aux installations ostréicoles, environ à 150 m vers le gué dit du moulin. La station c'est visible que comme une mince ligne de débris d'augets s'étendant sur environ 2 m de long à 25 cm sous la surface du sol cultivé et à 60 cm au-cessus de la plage actuelle. Cette station n'est fourni que des fragments d'augets, à l'exclusion de tout autre objet.
D - La pointe sud de l'île de BOEDE.
Elle est riche de 6 fours disposés en un groupe de trois et trois fours isolés : une fosse en auge avec de nombreux fragments d'augets; une fosse triangulaire remplie d'argile ; une troisième de même forme contient des briques, des plaques de schiste et des augets.
E - Le complexe industriel de MOUSTERIAN.
Il ne s'agit plus ici d'une station d'augets, ni même d'un four, mais d'une véritable usine de poterie comprenant 12 fours actuellement connus. Un treizième découvert par le Dr LEJARDS en 1964 à proximité, contenait des augets à faces parallèles n'ayant subi qu'un début de cuisson; ils étaient de teinte noire. Dans le voisinage, débris d'augets et morceaux de charbon ont été recueillis. Une superficie d'environ l a 50 ca, contigü à la zone des fours, est délimitée par les vestiges de substructions de murs en grosses pierres ! Sur le pcan cadastral, elle s'étend sur les par~ celles n•s 530, 3-1, 34 et 35 de la section G, la majeure partie se trouvant sur la parceile n° 531 appartenant à M. LE BRETON commerçant à VANNES. Les augets les plus nombreux sont tronc-prismatiques, en terre cuite très fine.
Quelques fragments appartiennent à des augets parallélépipédiques en forme de cornets d'après Y. COPPENS, dans les "annales de Bretagne 1 953", p. 360). Deux exemplaires existent intacts au musée de CARNAC. Ce sont des augets à faces parallèles. Enfin, deux fragments d'augets à fond semi¬circulaire. On a trouvé dans le même lieu des vases.
Comparaison des différentes stations entre elles.
Il est probable que les stations aujourd'hui disparues de CARIEL et d'ER BILL étaient comparables sinon identiques à celles du PESCHIT et de C.ADOUARNE. Le Dr LEJARDS voit dans ces stations, les lieux d'utilisation des augets fabriqués dans les installations plus complexes de MOUSTERIAN et de la pointe de l'île de BOEDE. Ces deux dernières comportent en effet un grand nombre de fours qui semblent avoir eu des spécialisations diverses pour la fabrication de tel ou tel type de poterie. La zone qui entoure les fours serait le premier dépôt de ces produits à leur sortie des fours.
Les stations plus modestes de CADOUARNE et du PESCHIT ne donnent que des augets tronc-prismatiques. Au PESCHIT, ces augets semblent avoir été disposés sur trois terrasses bien nivelées, se présentant en gradins et recouvertes d'argile plus ou moins cuite.
Problème de datation exacte de la civilisation industrielle des augets de terre.
On n'a jusqu'à ce jour que trois certitudes :
1° Il n'y a dans ces stations absolument rien de gallo-romain...
Aucun vestige de cette période n'existe dans cette partie de la commune de SENE. Par contre, le dolmen ruiné de GORNEVEZE, voisin d'ER BILL et l'ensemble mégalithique de la côte.
2° La poterie assez jolie a été faite sans le seccours du tour et est d'origine indigène, faite pour un usage local. Sa grossièreté contraste avec la finesse et la bonne qualité des augets qui durent servir à L'exploitation comme emballages des pains de sel.
3° Tous ces fours ont été abandonnés précipitamnent, en catéstrophe pourrait-on dire. Tous les fours de MOUSTERIAN étaient encore plein de leur charge...A BOEDE-sud, un seul des 6 fours était vide, les 4 autres étaient dans le même état que ceux de MOUSTERIAN. Il a falluu un grand cataclysme naturel ou social pour provoquer un tel abandon précipité.
Trois hypothèses ont été émises :
a) Celles du Dr FROMOLS et RAKOWSKI = installation gallo-romaine. Abandon précipité du aux premières invasions saxo-normandes datant de ia fin du IIIème siècle de notre ère ... Mais, une poterie si abondante, industrielle et commerciale aurait été faite au tour et surtout dans une "usine" si importante que celle de MOUSTERIAN. De plus, les poteries gallo-romaines auraient utilisé, après trois siècles d'occupation (-56 à +450), la technique romaine comportant l'emploi de la brique pilée.
b) Si nous datons l'abandon de ces fours de la fin du Ier siècle avant l'ère chrétienne, le cataclysme social l'ayant provoqué nous paraît ne pouvoir être que l'invasion des "civilisateurs" de CESAR, l'orgueilleux pro-consul qui devait difficilement tolérer dans la "Pax Romana : la paix romaine", la survivance d'une civilisation indigène aussi peu "barbare" que celle des Vénètes.
c) Reste à envisager l''hypothèse du cataclysme naturel : séisme ayant entraîné l'effondrement de ces points du golfe et ayant si gravement endomnagé ces installations qu'elles furent totalement et définitivement abandonnées, A quelle époque fixer cette catastrophe naturelle? Sûrement avant la fin du IIIème siècle puisqu'en certain6 points des constructions gallo-romaines sont sous-jacentes à certaines installations d'augets.
A l'occasion d'une conférence faite le vendredi 22 mai 1970 au Palais des Congrès de LORIENT, par M. GOULETQUER de RENNES, docteur ès-sciences, attaché au Centre National de la Recherche scientifique et au laboratoire d'Anthropologie préhistorique sur le thème" des fours à augets du littoral", M, MANSION a avancé une autre hypothèse sur les hommes constructeurs de ces fours et sur l'usage possible des augets. Il a en effet relevé des coïncidences curieuses dans les dates et les faits rapportés par le conférencier.
1 - Une hypothèse sur les hommes.
Les lieux d'implantation des fours et des stocks d'augets, l'absence de traces d'habitations à leurs abords laissent planer peu
de doutes sur l'état des hommes qui ont construit et utilisé ces ouvrages. Ces hommes n'étaient pas des indigènes ou habitants du pays ; vraisemblablement ils venaient de la mer. C'étaient des marins qui vivaient sur leurs pateaux, ne descendant sans doute à terre que pour la recherche de l'argile et sa cuisson. Il est même possible qu'ils n'aient pas pris contact avec les populations vivant en ces lieux. Les fours retrouvés sont éloignés des lieux habités et le combustible qu'ils utilisaient semble indiquer qu'ils ne se sont pas enfoncés dans les terres, même à quelques kilomètres, y ramasser le bois pouvant alimenter leurs foyers.
Quels peuvent donc être ces marins qui ont fréquenté nos côtes entre les années -300 et - 50 ? On sait de façon certaine que les Carthaginois et les Tyriens sont descendus sur nos rivages à ces époques reculées, Ils allaient chercher en Grande-Bretagne, en longeant les côtes atlantiques, l'étain absolument indispensable à la fabrication du bronze. Rien d'étonnant donc à ce qu'ils fassent escale sur notre littoral qu'ils avaient exploré dès 460 avant J.Christ (flotte d'HANNON), Le fait que la construction et l'utilisation des fours aient cessé vers l'an -50 apporte un élément favorab le à cette hypocnese. C'est en l'an -56 que les Romains s'installèrent en Armorique, après leur victoire navale sur les Vénètes au large du Golfe. Les Romains étaient les ennemis des Carthaginois et des Tyriens, et ceux-ci cessèrent alors de fréquenter nos côtes.
2 - Une hypothèse sur l'usage des augets.
Les augets ou débris d'augets recueillis ne présentent aucune trace d'utilisation sur place, fait qui vient à l'appui d'une idée lancée par M. MANSION dé leur usage dans un autre lieu et pour une autre denrée que le sel. Ces petits récipients d'argile cuite étaient de dimensions et de formes variables n'excédant pas les suivantes: longueur et largeur de l'ouverture 140mm x 76; longueur et largeur du fonds: 100 rmn x 43 - hauteur environ :38 mm pour la forme rectangulaire.
Ces ustensiles de forme réduite étaient-ils bien destinés à la fabrication et au transport du sel marin ? De toute évidence, si la thèse des honnnes venant de la mer est retenue, celle du sel est à êliminer. Ils en avaient à profusion à leur disposition dans leur pays d'origine car ils n'étaient pas sans avoir observé le phénomène nàturel de l'évaporation de l'eau de mer. Et puis, le sel s'obtient sur de grandes surfaces et se transporte dans des récipients plus grands que des centaines de petits godets d'argile.
Mais pourquoi ces navigateurs qui se rendaient en Grande Bretagne, à des milliers de kilomètres de leurs ports pour y trouver un métal qui leur était indispensable : l'étain, ne se seraient-ils pas arrêtés sur nos côtes où ils savaient trouver l'argile à l'état presque pur, pour y fabriquer les augets qu'ils stockaient tout près de la mer et pour les embarquer dès la fabrication terminée?
Arrivés sur la côte Sud de la Grande Bretagne , où l'on a aussi trouvé quelques fours à augets, ils auraient fondu le produit
de leurs prospections et versé l'étain en fusion dans les augets, L'étain fond à 228°C, température que ces récipients d'argile pouvaient facilement supporter. Il est très facile à démouler, n'adhérant pas aux parois du récipient qui le contient. Obtenant ainsi des lingots d'étain, ils les auraient transportés avec ou sans les augets laissés sur place, à TYR ou à CARTHAGE ... Quant aux augets retrouvés sur les lieux de stockage ou dans les fours, ils auraient été abandonnés là peut-être parce qu'il s'agissait d'une mauvaise fabrication, peut-être aussi parce qu'une tempête ou un ennemi avait poussé les marins à un départ précipité.
En dépit des nombreuses et diverses hypothèses qui ont été formulées, on pense généralement que les augets et fours à augets de SENE et d'ailleurs sont en rapport avec l'industrie du sel (fabrication ou préparation au transport). M. Yves COPPENS considère l'industrie des augets comme une industrie gauloise ou vénète qui a dûse poursuivre sous l'occupation romaine, mais qui n'a aucun rapport avec cete civilisation.
Cependant, le De J. FROMOLS écrivait à ce sujet le 28 avril 1953: "la tecnnique de la fabrication des augets, leur forme rectangulaire, l'extrême minceur des parois qui se joignent à angle aigu et indiquent la fabrication au moule, leur cuisson à haute température, tout cela est typiquement romain et conforme à la technique gallo-romaine des 1er et 2ème siècles de notre ère". (Bulletin Société Polymathique du Morbihan 1953-54 - Procès-verbal p.32).
La voie reste ouverte aux recherches et aux discussions et chacun est libre de se faire une opinion à propos des mystérieux augets.
1. LA PREHISTOIRE DES CELTES
Séné s'illustre par une liste impressionnante de monuments mégalithiques dans la Préhistoire, par cet insoluble problèrne des augets dans la période celtique.
Cinq dolmens ruinés à Boëd (découverts en 1878), entourés d'une enceinte de gros blocs, et qui furent sans doute couverts d'un tumulus ; un lech abîmé à Michotte ; un lech en forme de pyramide, de 1,15 m de haut, près de Bindre
un lech hémisphérique à Balgan ; quatre dolmens à Auzon (déjà disparus en 1884) ; un dolmen à Gornevéze; Voilà un bilan dont toute commune ne peut se vanter!
Plus intéressants, ont été découverts, à la suite de fouilles dans une butte, une hache en fibrelithe, des éclats de silex, des fragments de poteries, et, d'un autre côté, deux blocs de terre cuite dont l'un percé de deux trous parallèles; on y a encore trouvé des tessons de poteries néolithiques, gauloises et gallo-romaines.
Ainsi, malgré de mauvais entretiens et la perte de plusieurs vestiges, on constate une vie assez intense sur le territoire de Séné, pendant la Préhistoire : c'est encore confirmé par la question des augets.
On a découvert des fours à augets et des piles d'augets à fleur de terre, en plusieurs endroits de la commune. L'auget est une petite poterie de terre très fine (remarquable pour l'époque), de forme cubique, évasé vers le haut. De quelle époque sont-ils? A quoi servaient-ils? D'où venait cette technique?
On a pensé que les augets étaient gallo-romains : Mr le Dr Lejards soutient au contraire qu'ils sont antérieurs à l'invasion romaine, ce qui serait plus vraisemblable. La question reste ouverte.
On a trouvé des augets dans le Finistère, dans le Morbihan, en Loire¬Atlantique, en Vendée même, et toujours près de la côte. Ils sont donc liés à une activité maritime. On a avancé qu'ils servaient à ramasser le sel, ou, moins probable, à conserver le saumon. La question est encore posée.
Problème complexe, d'autant plus qu'on en a découvert une quantité importante un peu partout ; d'autant plus qu'on parle d'augets à cornets, qui ne sont pas précisément des augets ; d'autant plus qu'on trouve des fours où la dernière cuisson n'a pas été otée : pourquoi? L'invasion romaine aurait-elle arrêté la fabrication?
La lumière n'est pas encore faite!
Pour nous, une certitude : la présence de l'homme dans ce fond du golfe de nombreux siècles avant Jésus-Christ.
DOCUMENTS : LA PREHISTOIRE A SENE
Nous reproduisons dans ce bulletin, un document presque centenaire tiré du Bulletin de la Société Polymathique de Vannes et relatif aux monuments anciens de la commune de Séné :
FOUILLES EXECUTEES LES 12, 13 et 14 DECEMBRE 1878 à
L'!LE DE BOED et au DOLMEN DE GORNEVEZE en Séné
A/ ILE DE BOED
1. Le premier monument visité se trouvait dans le pré dit Le Fozic, cadastré sous le numéro 730 de la Section H de Cadouarn en Séné et appartenant à l'époque au Capitaine Allain. Le monument placé à 3,65 m du rivage et orienté du Sud au Nord, avait une longueur de 12 m sur 7,50 m de large ; son point culminant s'élevait à 1 ,20 m au-dessus de la surface de la prairie. C'était un monument préhistorique bouleversé, dont les débris reposaient sur le roc et le sol naturel. Dans cet amas de terre, de pierres, les chercheurs firent malgré tout une petite récolte d'objets variés : un "celtae" ou hache préhistorique en fibrolithe, des éclats de silex et des fragments de poterie, des morceaux de briques romaines, deux blocs de terre cuite, un quartz, des morceaux de charbon avec traces de l'action du feu sur plusieurs pierres, C'était une tombelle d'assez grandes dimensions, dont la destruction devait être assez récente,
2. Dans une lande située à l'est de la maison neuve de l'île, portant le numero 639 de la même Section H du cadastre et appartenant à M. du Bodan, on voyait un groupe de DOLMENS ruinés dont un encore recouvert de sa table et muni d'une partie de sa galerie ; un autre, à 10 m du premier, qui laissait apparaître les sormnets des supports de sa chambre.
Dans le premier, les fouilleurs eurent la bonne fortune de trouver : deux monnaies romaines, des fragments de briques et de poteries romaines. Le second présentait une chambre rectangulaire de 3,50 m sur 2 m, parfaitement dallée de pierres plates de moyenne dimension. Son exploration procura : des éclats de silex, des fragments de poterie gauloise et de briques romaines.
B/- DOLMEN DE GORNEVEZE
Entre le village de Gornevez et le bord de la mer qui en est très rapprochée, dans la propriété de M. et Mme Penvern, se trouve un dolmen ruiné qui dut être de très grande dimension à en juger par sa partie postérieure qui subsistait seule vers -1845. Il était recouvert d'une table de 4 m. de longueur sur 2,30 m. de largeur. Ce monument a été remis en valeur il y a quelques années. Il se voit du bord de de la route du village. Ce dolmen, au siècle dernier, se trouvait dans un pré dit"Boh-Iliz" (=bois de l'église), portant le numéro 495 de la section H de Cadouarn et appartenant, en 1878, à Mr Charles du Bodan.
Le Dolmen en question est une chambre carrée, recouverte d'une grande table et dont les supports qui restent ne montrent aucune trace de signes gravés. La chambre fut vidée par les chercheurs jusqu'au sol naturel, mais ils n'y rencontrèrent que des débris d'objets modernes. Elle avait déjà été fouillée par une foule de curieux. D'après les gens du village, le dolmen avait même servi, au corrnnencement du XIXème siècle, d'habitation à un pauvre tailleur étranger qu'un vieillard affirmait y avoir vu pendant de longues années et qui dut y mourir. Pour donner à sa chambre une hauteur suffisante, le tailleur se vit obligé de vider le monument.
Malgré tout, les spécialistes purent recueillir, au milieu des débris, des fragments de briques et de poteries romaines, des morceaux de chaux, et même deux pièces métalliques en fonte provenant sans doute de la marmite brisée du pauvre tailleur.
NOTE.- Les tumulus à l'Est de l'île de Boëd avaient déjà été fouillés en 1867 par MM. de Cussé et Louis Galles et avaient donné:
un silex taillé, ébauche d'une pointe de flèche un petit anneau en verre
des fragments d'un grand vase en terre brune
tous objets exposés au Musée de la Société Polymathique de Vannes.
I. ASPECT GEOGRAPHIQUE : SENE ECARTELE
Au fond du Golfe du Morbihan, voici Séné, ou plutôt le PAYS SINAGOT. Vannes n'est pas bien loin, à peine 4 kms du bourg. L'histoire de Séné est celle d'une lutte qui devint amitié et s'achève à présent en lassitude ; une rencontre entre la terre et l'eau dont le pêcheur sinagot fut le fruit.
Déjà depuis plusieurs millénaires l'homme s'est interessé à ce coin de terre ; les traces de son implantation en font foi ; mais il s'y est fixé.pour y entendre l'appel de la mer comme à un renoncement de son sol. Ailleurs, l'homme fils de la terre, s'est lancé à la conquête des eaux. Et si le pêcheur breton estime la mer, c'est en vieil adversaire implacable.
A Séné, les deux lutteurs se sont vite pris d'amitié. La Nature le veut ainsi ; car l'Océan ici, c'est le Golfe, et le Golfe, c'est l'Océan se faisant terre ; surgissement de dizaines de petites îles comme un fruit de la mer elle-même.
Intime compénétration ; la terre à son tour se veut mer, et le Pays Sinagot s'achève en Boëde et Boëdic que les eaux, à mi-temps, environnent, échange de l'amitié, don éternellement restitué, au rythme même des marées.
L'alliance est dans le sang mêlé ; les eaux pénètrent profondément à l'intérieur des terres ; les rivières de Vannes et de Noyalo sont l'étreinte de la mer. Où commence la terre? Où finissent les eaux? Nul ne saurait le dire. La vie bouscule les barrières, la côte joue avec les eaux, et avec l'aide de l'homme, la terre reprend parfois quelques hectares, non comme un droit, ni même comme une nécessité, Mais comme une réponse à un amical défi ; sans insister d'ailleurs lorsque la mer franchit l'obstacle avec un sourire.
Pourtant ce jeu de l'amitié a souvent été rude. Le Sinagot a mené son destin à celui du Golfe ; mais le drame éclate parfois lorsque sous l'impulsion du vent, la mer perd son contrôle. Ses terribles accès sont alors redoutés. Le coup de vent de Noël est pour le marin du XVIIIème siècle, l'épreuve de l'amitié. Ses compagnons sont morts en mer, mais il n'en accuse pas sa vieille amie ; l'ennemi, c'est le mauvais temps qui rend les eaux malades ; c'est le ciel jalloux, jalloux de cette alliance entre la terre et l'eau. Et c'est le ciel que le marin implore.
Mais la crise passée, l'homme de la terre se retrouve l'homme des eaux...
Il en a été longtemps ainsi. Le Sinagot a labouré le Golfe. A Séné, on était marin, même si parfois l'on cultivait la terre. Mais pour beaucoup, la tentation fut forte ; face à l'insécurité de la mer, la terre inspirait confiance.
Et un beau jour de nombreux hommes se réveillèrent surpris; la mer leur paraissait étrangère, ils sont devenus paysans.
Ce fut une nouvelle étape. Le coeur de Séné était divisé. La terre lui offrait ses légumes et la mer son poisson. Tant bien que mal, on prit son parti de l'existence de ces deux Séné. Une cohabitation pacifique s'établit entre la ligne des villages côtiers : Bellevue, Langle, Cadouarn, Moustérian...et les fermes de l'intérieur que le bourg regroupait tant bien que mal. La fusion ne fut jamais complète et maintenant encore le Paysan Sinagot, bien que profondément attaché à son sol et à ses traditions, est un frère étranger.
Un troisième appel est dernièrement venu remettre en question cet équilibre de compromis : Vannes, la puissante voisine, qui jusque là avait gardé ses distances, fait maintenant entendre sa voix, et, comme pour être sûre d'être mieux entendue, elle vient à la rencontre de Séné. Lentement une nouvelle fusion s'amorce. La mer, jadis, s'était mêlée au sol sinagot ; la ville maintenant s'y essaie à son tour. Nouvelle étreinte, mais qui n'est plus celle de l'amitié. Séné commence à étouffer, la respiration se fait courte ; déjà, de Vannes, on envisage des réalisations communes. L'usine Michelin touche au nord du territoire sinagot, les faubourgs de Vannes gagnent sur la commune. La ville est là, et ce qu'elle représente de notre monde moderne, bousculant la tradition.
Forces contradictoires d'un Séné, qu'un petit bourg actif essaie de maintenir dans l'unité. Mutation entreprise dont on ignore le terme.
La terre et l'océan, l'agriculture et la pêche, face aux poussées des villes porteuses de nouvelles valeurs, cet affrontement tourne parfois en Bretagne à la tragédie.
Séné n'a pas attendu le XIX° siècle pour prendre place dans l'histoire des hommes. L'homme se manifeste dans ce coin du Morbihan avant même la période historique. De multiples signes permettent de l'affirmer ; puis en sautillant comme par jeu, Séné avance dans l'histoire. Nous relevons les traces de ces bons : menhirs, dolmens, vestiges de voies romaines, restes d'augets et de poteries, bulle du pape, supplique des marins, saint non canonisé, prêtre réfractaire, refus de livrer des otages au Directoire... Bilan luxueux pour le chercheur ; mais aussi que d'incertitudes entre deux bonds.
C'est une histoire en pointillés. Les grandes lignes d'une silhouette se dégagent, mais pas encore l'expression d'un visage.
Joseph LE ROCH
30/06/1923 Baud - 18/01/1988 Vannes
Recteur de Séné 1968-1980
Joseph Albert LE ROCH était natif de Baud. Il fut ordonné prêtre le 30 juin 1947 à Vannes par Monseigneur Le Bellec. Il était titulaire d'un baccalauréat Lettres & Philisophie. Il débute sa vie d'écclésiastique comme vicaire instituteur à Plescop où il est nommé dès le 18/10/1947. Il devient recteur de l'ïle d'Arz, le 28 août 1966, avant de de prendre la tête de la paroisse de Séné le 20 septembre 1968.
En 1976, sous son magistère, fut entrepris la restauration des vitraux de l'église Saint-Patern (lire article). Le 25 juillet 1980, après 12 ans passés à Séné, il est muté à Le Tour du Parc. Il décède à Vannes le 18 janvier 1988, à l'âge de 65 ans.
Joseph LE ROCH a laissé un fort souvenir dans notre parroisse. La commune disposait d'un bulletin paroissial dont le tout premier exemplaire date de de janvier 1908.
Dès sa prise de foncion il relance le bulletin paroissial. En janvier 1971, il refait une nouvelle maquette, d'abord au format A4 paysage puis sous un format portrait. Chaque année, il prenait soin de changer la couverture du mensuel.Fort d'un atelier de photocopies au sein même du presbytère, il était devenu, en marge de son activité de prêtre, "imprimeur, rédacteur, gérant" un 'auto-entrepreneur', rédacteur en chef du mensuel "Le Sinagot", véritable "organe de presse local".
A côté de pages consacrées à la vie religieuse de la paroisse, il faisait vivre le carnet paroissial avec de belles photos de baptêmes et de mariages et ne manquait pas d'insérer des pages consacrées aux activités sportives à Séné, aux associations, AVLEJ de Mousérian, Club Vermeil et aux multiples pélérinages ou excursions de ses paroissiens. Il "couvrait" les événement locaux tels les kermesses ou les courses à Cano. Il voulait toucher, tel un bon pasteur, un grand nombre des habitants de Séné au travers de sa publication. Il savait aussi écrire des "petites nouvelles brèves de chez nous", petites anecdotes sur la vie sinagotes. "Page rétro", mots-croisées et dessins humoristiques "à la Jacques Faisant" agrémentaient son bulletin. A l'écoute de la population, il savait réaliser des articles sur des personnalités locales, sur la sociologie des Sinagots, notamment les marins qu'il affectionnait et pour lesquels il "baptisait"' leur bateau. Il réalisa un très beau portrait de Jean Marie LE GUIL, dit P'tit Jean ou de l'institutrice Mlle Marguerite. L'abbé Le Roch mettait à la porté de tous, la richesse de l'histoire de notre commune. Ces articles sur la "Bataille des Vénètes" et sur l'histoire de Séné furent réunis dans un seul polycopié. Wiki-sene reproduit dans ces pages leur contenu.
En introduction à ce polycopié voilà ce qu'écrivait Joseph LE ROCH " Sous le titre, "LE SINAGOT" va reprendre durant toute cette année et les années suivantes, l'étude du Pays Sinagot parue dans les bulletins paroissiaux à partir du mois de novembre 1968...en tenant compte autant que possible des modifications survenues depuis ces 8 dernières années...Cela permettra aux 720 abonnées (410 en 1968) de connaître Séné - son Histoire et ses histoires, sa population, sa vie...Merci à tous ceux qui pourraient nous fournir documents et photos (même anciennes) sur notre pays sinagot !"
Quelques mois avant sa mutation pour la paroisse de Le Tour du Parc, il réussit l'exploit de convier la télévision régionale en juin 1980, à l'époque FR3 et Antenne 2 pour un reportage en couleur, et en version originale breton, - qu'il parlait parfaitement - sur les derniers pêcheurs sinagots.
Ethnologue, journaliste, prêtre, il avait gardé de ses études de lettres et de philosphie une "bonne plume", utile à la rédaction de ses homélies et de ses articles de presse. Il était le premier historien local de Séné, une référence et une source d'inspiration pour les suivants.
Au printemps de 1980, le dynamique abbé Joseph LE ROCH réussit à faire venir la télévision à Séné pour réaliser un reportage sur les derniers sinagos. Le film de 23 mn, intitulé, SINAGO BOTEU PLAD E LAK E VERH DE RUANNAD", réalisé par Franco Calafuri et Alain Bienvenu, fut diffusé deux fois sur les chaines nationales Antenne2 et FR3 e, juin 1980. Il annonça l'événement dans le bulletins paroissial et fit après sa diffusion un débreiffing de cet diffusion. Le reportage comportait des prises de vues extérieures sur la Golfe du Morbihan et des interviews au café de Bellevue de vieux marins de Séné auxquels s'était jointe Ernestine MORICE.
SENE au petit écran
Dans le dernier Bulletin, nous vous annoncions une prochaine émission, sur FR3, devant relater en 23 minutes un aperçu sur la vie des marins sinagots ... Les prises de vue sont terminées. A vous, chers lecteurs, d'être à vos postes un de ces samedis sur FR3, à 13 H 30 ... Titre de l'émission : "BREIZ O VEVA" ... Cette même émission sera retransmise sur ANTENNE 2 , mais à une date que nous ne pouvons vous donner aujourd'hui. Consultez donc les programmes sur les journaux de fin Avril ou début Mai ... Voici le texte que vous entendrez (nous y avons mis en regard sa traduction).
Ni zo aman è Siné, anuèt Sénac én amzer goh; chetu perag é vé groeit "Sinagiz" ag en dud e chom énni; hag er gir-se en des reit "Sinagots" è galleg er hornad.
Nous sommes ici à Séné, qui s'appelait autrefois Sénac. Les habitants se sont donc appelés les "Sénageu", mot qui a donné les "Sinagots".
A viskoah, Sinagiz e zo bet "tud¬er mor" , én arbenn ag o hornad douar boud gozig gronnet ged en deur é penn pellan er Mor Bihan étré stér Gwéned hag hani Noaleù. Boud int bet a viskoah MORAERION ha PESKETERION, rag aveid biùein ha desaù liéz mat ur famill stank, é vezé red grons kavouid àr en tachad er bouéd rekiz. Ha mor Gwéned ( anùet breman er Mor Bihan) e oé sanset tad magér en dud-man. Betaf nandeg kant daou ha hanterkant (1952), Sinagiz o doé bageu-pesketa dishanval braz doh ré ar mor braz, hag e vezé anùet "sinagot" é galleg. Ur bamm o gwélet ken plomm àr en deur ! Groeit e oent ged koed derù, liùet liésan ged goultron du ; ha ged bihan deur édanté, é hellent heb riskl erbed douarein mem àr er lizeù. O gouélieù e oé karré a getan; met goudé, éh es bet chanjet er blein anehé, hag er stumm kaèr-sé on-es ni anaùet. Gwéharall, éh oé groeid er gouélieu ged krohen-loned tenaù, hag arlerh ged liénkrenn tiù, a liù ru. Hag er besketerion en-em anaué étrézé a ziabell àr èr mor doh liù en daboneù gouriet arnehé.
Les Sinagots, de tous temps, se sont tournés vers la mer : le découpage des côtes, la situation de Séné au fond du Golfe, entre la Rivière de Vannes et celle de Noyalo l'y prédestinaient. Toujours, les Sinagots ont été un peuple de marins, de pêcheurs. Pour vivre, bien souvent pour survivre, pour nourrir une famille nombreuse, il fallait bien tirer sa nourriture de ce que l'on trouvait sur place. Et ici, c'est la mer, la petite mer, c'est-à- dire le Mor Bihan, le Golfe. Pour pêcher, on utilisait jusqu'en 1952 un bateau typique le "Sinagot". C'était un bateau qui tenait admirablement la mer. Sa coque en chêne, construite autour d'un solide carénage et peinte généralement au col tar noir, exigeait peu de profondeur dans les eaux du Golfe, et lui permettait même de s'échouer sur les vasières sans aucun risque. Leurs voiles, carrées pendant longemps ont vu leur forme modifiée au sommet, et ont pris la belle allure que nous avons connue. D'abord en peau souple, elles furent ensuite taillées dans une toile solide, teintée en rouge,...et la plupart du temps, les pêcheurs se reconnaissaient sur le Golfe aux pièces rapportées et cousues, mais de couleurs plus ou moins foncées.
Boud e oé é nandeg kant seih ha daou uigent (1947) naù bag "sinagot" ha daouuigent. Ni bé chonj anehé er "Vas-Y-Petit Mousse", er "Sans-Gêne", er "Brér¬Bras". En tri ré devéhan : "Vers le Destin", "Mon Idée", "Rouget de l'Isle" e zo bet disarmet è nan dek kant tri ha tri uigent (1963). En devéhan é labourat e zo bet er "Pauvre de nous". Ne chom mui hiniù nameit tri, gloestret d'er plaisans, ha gellein e hrér ou guélet é porh Gwened.
En 1947, on comptait 49 sinagots, et leurs noms sont encore dans nos mémoires le"Vas-y-Petit¬Mousse", le "Sans-Gêne", le "Bér¬Bras". Les trois derniers sinagots: "Vers le Destin", "Mon Idée", "Rouget de l'Isle" ont été désarmés en 1963...et le dernier armé a été le"Pauvre de nous". Actuellement, il n'en reste plus que trois, armés "en plaisance"...On peut les voir au port de Vannes.
Ha boud éma bageu sort-sé e zo bet distrujet dré en tan ged Jul Cézar ér blé huéh ha hantér kant (56) éraok Jézuz¬Krist, dirag gouriniz er Ruiz??? Perchans ya, mar krédam ataù er péh en-des éan skriuet dem a zivoud en emgann-sé én é lèvr "De bello gallico". Bageu Siné e oé bageu dré lién, a pe gerhé ré er Romaned ged ruâneu Ha chetu ma arsavas en avél én un taol. Ne oé ket bet diéz d'er Romaned dispenn ha trohein ged felhiér hir fardaj bageù gwénédiz.
Est-ce que ces bateaux sinagots ont fait partie de la flotte que les trirèmes de Jules César a exterminée par le feu en 56 avant J.C, au large de la presqu'île de Rhuys?? Sans doute que oui, si l'on en croit Jules César lui-même qui a relaté son forfait dans son livre "Commentaires sur la Guerre des Gaules". Le vent était indispensable aux bateaux sinagots pour manoeuvrer...Mais le vent tomba, et les bateaux à rames des Romains n'eurent pas beaucoup de peine à couper, à l'aide de longues faux, le gréement de nos bateaux à voiles.
En avél .... Henneh e zo bet berped en dra rekisan de vageu Siné. Met arlerh er brezel devéhan, chetu deit er rnoteurieu. Achiù geté er bageu dré lién. Ar o lerh érna deit "pinassenneu", de lared é pikol tignoleù é sturnm ur V, seih-naù metr a hirded dehé. E nandeg kant daoù ha hantér kant (1952) é en des er bag "Ca me suffit" kernéret léh er "sinagot" dré lién "Ca me va" ... Ha houdé uigent vlé, ur hant pinassen bennag e zo bet lakeit é servij àr mor bihan Gwéned ; ha mé me-unan, a houdé daouzeg vlé, m'em es benniget ur pemzeg bennag anehé.
Le vent...Il a été toujours l'élément essentiel pour le bateau à pêche sinagot. Mais quand le moteur est apparu vers les années d'après guerre, le bateau à voile a été remplacé par des "pinasses": grosses plates en V de 7 à 9 mètres de long...C'est en 1952 que le bateau à moteur "Ça me suffit" a pris la relève du sinagot à voile "Ça me va". Depuis 20 ans, une centaine de bateaux-plates, en V ont été mis en service dans le Golfe du Morbihan, et moi-même, depuis 1968, j'en ai bien "baptisé" une quinzaine.
D'er prantad-sé, ur hart ag en dud e viùé diar er pesketereh pé en istr, ha kernentrall e labouré àr er lestri-komers pé er lestri-pétrol. Bihanneit mad endes breman en nivér anehé, ha nen des mui nameid tri-huéh tri uigent (78) a dud enskrivet àr roll en "dud a vor". Memès tra aveid er besketerion: deit int ur lodenn vihan ag er barrez. Ne faot ket bout souéhet a gement-sé, pe huélam tud ag en Argoed é toned de chorn ér gumun a gandeù. Pesketerion Siné e ya dré rah er Mor bihan ha betag iniz Houad, er Gerveur, Kiberén, de dapoud er pesked ged ur roued braz anùet "chalut" e stleijant àr o lerh. Lakat e hrant hoah kavelleù a gandeù eit tap morgad d'en nevé-han, ha de gourseù zo éh ant tré betag fardell Arzal de besketa silied bihan anùet "civelle". Lod kaer hoah e cherr en istr ged ravanelleù, eid o desaù arlerh én o farkeù-istr.
A ce moment, le quart de l apopulation vivait de la pêche et de l'ostréiculture, tandis que la même proportiuon naviguait sur les bateaux de commerce et les pétroliers. Maintenant, ce pourcentage est très inférieur, et on compte 78 inscrits maritimes. Lès pêcheurs sinagots sont devenus minoritaires dans la commune, d'autant plus qu'il y a eu un très grand apport de morbihannais de l'intérieur du département. Les marins-pêcheurs parcourent tout le Golfe et vont jusqu'à Houat, Belle-Ile, Quiberon. Ils utilisent le filet droit", c'est-à-dire le chalut. Ils posent également leurs casiers par centaines pour les "morgates" au printemps. Certains mois, de nuit, ils se rendent à Arzal, à l'embouchure de la Vilaine pour pêcher la "civelle". Un grand nombre enfin font la drague de l'huître et pratiquent l'ostréiculture.
Rag é Siné, gwazd ha mouézi, rah en dud e labour. Laret e vé
"Sinago boteù plad"
"e lak é verh de ruanad".
Gwir é. Ar lehidégi, er lennvor, étré Bouéd ha Bouédig, é Billerbon, é Monsarrag, hui o gwél, mouézi Siné é toug ur ré boteù iskiz: diw blankenn staget doh o zreid ged lérenneù, chetu "boteù-planch". Grés dehé, é hellant mont ha dont a dreuz er fang-mor de cherrér bélured ha kregad a ben sort, trawalh d' ober ur pred a féson. Ha bét sur: na Jorjet, na Poled pé Mari, pe za ur benérad geté, hâni ne ankouéha ou ferson. Epad en amzér-sé, er wazed e vé àr vor ...
Car tout le monde, hommes et femmes travailent à Séné et il y a un dicton qui dit : "Le Sinaqot à sabots plats" "Met sa fille aux avirons".
Oui, sur l'immense vasière du Golfe, entre Boëde et Boëdic, à Billerbon, à Montsarrac, les femmes de Séné portent une curieuse paire de chaussures deux planchettes avec des lanières de cuir, ce sont les "boteu-planches" qui leur permettent de parcourir les vasières à la recherche des palourdes, et de faire souvent ainsi de bonnes "godailles", et aucune d'elles, ni Paulette, ni Georgette, ni Marie n'oublie leur recteur, quand elle a fait une bonne pêche. Pendant ce temps, les hommes vont au large.
Boud e oé kant peder (104) bag é nandek kant dek ha tri-uigent (1970). E nandek kant tri-huéh ha tri-uigent (1978) ne chomé mui meid hanter kant (50) . Kalz a besketerion e zo bet red dehé, ged ké, klask ur labour bennag arall é uzinieù Gwéned pé ér Prad. Ur rézon e zo de gement-sé: priz er pesked ne des ket heuliet priz er vuhé, hag er pesketour n'hell ket mui biùein ken éz él agent. 0hpenn, en artizanted¬mor o devé poén braz é kaoud ur blank bennag a berh er Stad ; henne e zisko boud berped pih eid dakor presteù argand dehé a p' o des dobér. Er lézenneù a vrenan zo groeit kentoh eid rein harp à' er vistri-pesketerion, er ré e bieù bageu brasoh eid deuzek mètr. Met chetu: ne vé ket mui kavet hâni kin a ré sort-sé é Siné ... ! ! !
Anaù e hret breman bro Siné ... ,buhé en dud a Siné. Dèit d'on gwélet pe gareet ... N'ho-po ket ké ... Un dégemér ag er gwelan e vo groeit deoh ...
En 1970, il y avait 104 bateaux de pêche à Séné... En 1978, it n'y en avait plus que 50. Vous voyez que, si dans les années 65/70 on a construit beaucoup de pinasses, leur nombre a bien baissé, et nombre de pêcheurs, à contre-coeur, ont dû prendre un travail dans les usines de Vannes ou au Prat. Ceci vient du fait que le prix du poisson n'a pas suivi la hausse du coût de la vie, ce qui a entraîné une baisse du pouvoir d'achat du Pêcheur. De plus, les pouvoirs publics ne viennent pas, ou peu, en aide aux petits pêcheurs et n'accordent des crédits qu'aux patrons-pêcheurs, propriétaires de bateaux de plus de 12mètres, que l'on ne trouve pratiquement pas à Séné. Voilà Séné...Voilà la vie des Sinagots...Venez nous voir...Vous ne le regretterez pas!!
Voici la liste des 49 sinagots qui naviguaient à Séné en 1947
"Vengeur du Trépas" - "Jeune Chanto"- Petit Vincent" - "Les Trois Frères"¬-"Ca me regarde" - "Le Coq du Village"- -"Gracieuse" - "Patrie" - "Soyons amis" - "Vas-Y-P'tit Mousse" - "Jeune Alice" - "Coureur des Côtes" - "Aviateur Le Brix" - "Jean et Janine" --"La Déesse des Flots - "Voe Victis"- -"Ca me va" - "J.M.J.P." - "Méfie-Toi" - " Sans-Gène" - "Joseph et Thérèse" - " Vainqueur des Jaloux"¬-"Fleur de Printemps" - " Renée-Marguerite" - "Saint-Jacques" - "Avenir du Pêcheur" - " Vers Le Destin" -"L'Yser" - " Léonie Ma Chère" "Jeune Odette" - "Ma Préférée" - "Marguerite" -"On les aura" -" Capricieuse" -" Léonor et Marianne" -"Jouet des Flots" -" Brér bras" -"L'Idée de mon Père" - "Souviens-Toi" -" Aventure" -" Souvenir de Jeunesse" - "Mon idée" -"Cours Après"-"Va de Bon Coeur"- "Célestin et Louis"-"Pierre et Marie"-Le Drapeau de la Mer"--"Pauvre de Nous (le dernier armé) Pierre et Louis"-- ...
Une suggestion à l 'intention de nos édiles qui réclament des propositions lorsqu'il s'agit de donner des noms aux nouvelles rues du quartier marin de Séné : Pourquoi ne pas donner à ces rues les noms de ces ancien sinagots .. Cela serait sûrement préférable à ces noms passe-partout que l 'on constate atuellement ici où là ? ?
Dernière heure : Cette émission de FR3 passera sur l'antenne début JUIN (sous toutes réserves). Nous vous tiendrons au courant
Après la diffusion de ce reportage, l'abbé Le Roch publie dans le bulletin paroissial ce texte agrémenté de capture d'écran ici reproduite avec autant de fidélité que possible et en couleur.
APRES LE PASSAGE DES SINAGOTS à L'ANTENNE
C'est le samedi 21 Juin sur FR3 à 13 Hres et le mercredi 25 Juin sur Anbtenne 2 à 11Hres30 que nous avons pu regarder l'émission "SINAGO BOTEU PLAD E LAK E VERH DE RUANNAD", émission de Franco Calafuri et d'Alain Bienvenu.
Pierre Louis CADERO
Ce passage au petit écran a plu d'emblée à tous, aux "acteurs" comme aux spectateurs. Le montage
des séquences a peut-être surpris, mais avouons que c'était parfait comme réalisation, d'autant plus que les couleurs du film (le rouge et le noir des bateaux sinagots, le bleu du ciel, l'aspect verdâtre dé l'eau, du Golfe, le jaune des cirés de nos marins, les lumineuses couleurs des vitraux de l'église, .. Etc .. ) étaient bien rendues, et que le tout était projeté sur fond musical "envoûtant" ( Eh oui ! près de 25 personnes nous ont demandé le disque il s'agit de l'Opéra Sauvage" de Frédéric Rossif, disque que l'on trouve à Vannes ).
Après un exposé fait par un marin du Bono, exposé qui nous a permis de mieux saisir les différences ( barre, tirant d'eau, roof, voiles ) entre le "forban" (bateau du Bono) et le Sinagot (bateau de Séné), nous avons pu suivre les conversations, au Café René JACOB de Bellevue, savoureusement locales entre Pierre MIRAN, René JACOB [13/8/1924-12/5/2016] , Pierre-Louis CADERO [23/05/1904-30/03/1980], Louis LE FRANC, dit"MOUSSE" (tous les deux décédés depuis ( hèlas!) Jean Marie LE GUIL [16/2/1903-20/8/1983] dit P'tit JEAN, Jean DANET, Patern GREGAM et Ernestine MORICE [9/11/1909-24/10/1999] { me garikel ! hiniù en dé !).
Joseph LE FRANC
Nous avons été les témoins des évolutions du "VAINQUEUR DES JALOUX" au large de Lerne, avec, à la barre, Henri LE FRANC, et comme matelots, Théo RIO, Emile NOBLANC, M.Georges RIDEAU des Scouts Marins. (N.B.= Le "Vainqueur des Jaloux" était gréé ce jour-là avec les voiles du Nicolas-Benoit).
Nous avons apprécié la beauté, la poésie de la complainte de ' "ER VORAERION" (LES MARINS) de Jean-
Pierre CALLOC 'H, chantée et accompagnée à la harpe celtique ( nous reproduisons plus loin cette complainte en compagnie de nos pêcheuses de palourdes déjà citèes ici en Mai, par Dominique GICQUEL, de Bézidel...
Jean-Marie-LE GUIL, dit P'tit Jean, passeur en retraite et René JACOB, patron du café La Bellevue
Puis ç'a été la scène de NINI, avec sa carte postale près de l'église, celle de Mr. le Recteur dans son "Vatican", ... tout ce monde voulant nous faire revivre les merveilleuses années de vie (ou mieux ... de"survie") des marins-pêcheurs des années - 30-40 à Séné. L'émission finissait par quelques séquences tirées du film relatant, en couleurs, les dernières régates des Sinagots en 1952 (Ah, "LI K" !, Ah, 27 Bateaux !) ... Une des photos de ce film est reproduite par la couverture de ce Bulletin ... BRAVO! Chacun a pris un grand plaisir à voir son pays ... Evidemment, on y parlait breton .. Mais ! ... mais, .. cela prouve qu'on parle encore (trop peu !) ce breton chez nous, la preuve ... ! .... cela prouve que, sur le plan culturel, nous avons un atout supplémentaire (qui voudrait nous le reprocher?)...ignoré des autres! (tant mieux pour nous! dommage pour les autres ! )... cela prouve que si la Télé, bien souvent, trop souvent! ... ,nous propose des émissions où l'on entend parler ou chanter uniquement dans une langue étrangère, ( et cela ... pendants des heures d'affilée cette Télé est aussi capable de faire du bon travail, et du TRAVAIL INTERESSANT (= c'est-à-dire qui nous intéresse ) .. et que pendant une petite demi-heure (c'est notre reproche que faisons aux responsables...Hélas .. ils n'y sont pour rien!)le "petit écran" est capable de nous redonner un moment de fierté à voir LE PAYS SINAGOT et les SINAGOTS !
Pierre MIRAN
NOUS VOULONS AJOUTER QUE:
-1-Les Eclaireurs de France de Vannes, dans le cadre de l'année du Patrimoine, ont été retenus pour reconstruire un sinagot .. La construction de ce bateau est commencée au chantier du GUIR à l'Ile-aux-Moines. Sa mise à l'eau est prévue pour fin Octobre.
-2-L' émission a été magnétoscopée ainsi, les personnes qui le désirent peuvent la revoir ... S'adresser
à M. le Recteur (2 conditions avoir un poste-télé couleurs et un appareil émetteur (qu'on peut louer) s'appelant magnétoscope.
-3-Cette émission passe oendant tout l'été dans le cadre de l'exposition sur le Golfe à la Cohue à Vannes(face à la Cathédrale
-4-Des copies du film des Régates de 1952 se trouvent au Presbytère (films en couleurs 16 m/m muet).
Cer article reprend mot pour mot et avec les illustrations d'origine, l'histoire des Vénètes telle qu'elle fut raconté par l'Abbé Jospeh LE ROCH dans le bulletin paroissial de Séné.
2.- L'ANTIQUITE
Un Génocide : L'extermination des Vénètes par Jules César,
en l'an 56 avant l'ère chrétienne.
COMMENT PERIRENT EN MASSE
LES VENETES D'ARMORIQUE....
Il est, dans l'antiquité gréco-latine, trois peuples qui ont connu le même destin tragique et se sont vus, dans les mêmes conditions rayés de la surface de la Terre et des lumières de l'Histoire. Ce sont, les Troyens, les Carthaginois et les Vénètes. Trois, sous les coups des Grecs ; Carthage et Vannes sous ceux des Romains ... Pour toutes les trois, la chute fut soulignée par le même acte des vainqueurs : la destruction à ras du sol et la dispersion des survivants sur les divers marchés d'esclaves de la Méditerranée.
Et pour les trois peuples, l'horreur de la suppression méthodique fut aggravée par un raffinement de cruauté : ce sont les vainqueurs, et les vainqueurs seuls, qui ont écrit l'histoire des vaincus.
Par conséquent, un drame sur un drame. Imaginez le compte-rendu d'un procès criminel de cour d'assises raconté par les seuls témoins à charge, voire même par les seuls auteurs et complices du crime.
Telle fut l'affreuse aventure que vécurent Troyens, Carthaginois et Vénètes et dont ils moururent à la fois de mort physique et de mort intellectuelle.
L'affaire des Vénètes est pour vous une question de famille : ces gens là étaient de notre sang, ils parlaient la langue celtique qui, aujourd'hui réfugiée en Bretagne française et en Cornouaille anglaise, était alors celle de tous les Gaulois nos aïeux, et ils sont morts pour avoir, à l'Ouest des Gaules, préféré la liberté à l'asservissement, la vie et la mystique des Celtes à l'administration, sous chaines dorées, et au polythéisme matérialiste de la Paix Romaine.
Ceci se passa voici quelque deux mille trente ans. Ces vaillants armoricains du Morbihan, descendus dans la mort collective, personne ne pleura sur leur tombe géante ni ne célébra leur sacrifice, pour cette raison tragique qu'en ce pays vaincu il ne resta personne. Ainsi le voulut le dur, le froid, le sec César.
Cette férocité eut sa cause en ceci : envahisseur du pays de la Petite Mer, Jules César, accoutumé à être toujours le Victorieux, sentit là, avec épouvante, chanceler à la fois sa fortune et celle de Rome. Il eut peur, et trop visiblement, pour son orgueil et sa sécurité. Donc, des ennemis, qui avaient vu César trembler, n'avaient plus le droit de vivre à la lumière du jour. A ce crime, une seule expiation : la mort pour tous, sans distinction d'âge, ni de sexe. Et pour mieux sceller à jamais l'immense tombe du peuple Vénète, c'est César lui-même qui, parlant en témoin oculaire à charge, s'est donné à lui-même seul le droit d'écrire, pour la postérité, l'histoire, vue à sa façon, de ces jours de terreur, de ruine et de mort.
Depuis deux mille ans, c'est dans les "Commentaires de César", intitulé: "La Guerre des Gaules", que les écoliers apprennent ce chapitre de l'histoire de France, leur pays. Chapitre jugement qui accuse et, sans aucune contrepartie, qui rend un arrêt, de partialité tout-à-fait criante.
Martyrs, le mot n'est pas trop fort. Et ce qu'il y a de plus curieux, c'est que les pièces du procès de réhabilitation de ces martyrs se trouvent dans les écrits mêmes de l'homme qui a ordonné, conduit et raconté le massacre. César a cru régler le sort sanglant du peuple qui lui avait tenu tête. Or, pour trouver la vérité et rétablir la Justice, c'est en lisant entre les lignes de cette tragique et partiale oraison funèbre, que l'on peut ressusciter le drame véritable.
Le Morbihan ou petite mer intérieure
Parmi les tribus gauloises, ce fut vraiment une des plus nobles que celle de ces Armoricains si merveilleusement logés d'une manière amphibie dans les îles, sur les côtes et dans les méandres du Morbihan. Une petite mer qui n'était peut-être pas absolument pareille à ce qu'elle est aujourd'hui ; là-dessus, archéologues, géographes et océanographes ne sont pas d'accord. Il est fort possible que la violence et la force des marées alternatives, certains séismes et des glissements de vasières aient modifié plus ou moins partiellement la physionomie de la région dans les détails. Mais, dans l'ensemble, le texte descriptif de César s'applique fort bien à ce dédale marin dont Gwen la Blanche, devenue
l'actuelle Gwened : Vannes, aurait été la capitale, régnant sur les villes de tout le pays desservi par les vaisseaux des chefs d'escadres Vénètes.
Villes et Vaisseaux Vénètes
Seulement, tout de suite, une précision s'impose. Les mots "villes" et "vaisseau" ne doivent point tromper et faire surgir dans l'imagination les cités auxquelles nous sommes accoutumés et les navires dont les silhouettes nous sont familières. Les villes Vénètes étaient de simples bourgades fortifiées, que leur installation sur les unes ou les autres des centaines de terres émergées du golfe, rendait à peu près inexpugnables. En effet, .en ces gites ressemblant aux constructions des époques lacustres, il n'y avait jamais assez de profondeur d'eau pour que des navires ennemis, surgis de la haute mer, puissent remonter jusqu'à accoster ces bourgs insulaires établis sur des promontoires. Par contre, il y avait toujours trop d'eau, remplacée à marée basse par des vases molles, pour que des envahisseurs venus de la terre puissent approcher à pied sans se noyer ou s'enliser". Quand aux vaisseaux, ces bâtiments étaient de grandes et solides hourques tenant admirablement la mer, coulant peu, très bien voilées en peaux souples et que la solidité de leurs coques en chêne permettait d'échouer sans aucun mal sur la vase. C'était un peu le genre des sinagots actuels qui sont leurs descendants.
Les habitants.
Quant aux habitants, c'étaient vraiment "les fils de la mer". Le mot signifie tout en vérité. Vivant comme les gros oiseaux marins, qui nichent sur des cailloux ou rochers semi-émergés et planent ou plongent le reste du temps pour rapporter la pêche au nid, les Vénètes ont été certainement parmi les plus admirables matelots de l'Antiquité. On peut placer leur installation dans le Morbihan vers les années 1000 ou 800 avant le Christ. Et pendant le demi-siècle qui va de l'an 600 aux années 56 et 54 avant le Christ, ils furent littéralement les Rois de la Mer.
Jusqu'où sont allés les capitaines Vénètes ?... Il est impossible de le dire, puisque les documents écrits ou graphiques n'existent pas. Mais, sans se tromper, on peut être sûr qu'ils battirent l'estrade à travers les mers septentrionales, remontèrent la Manche et la Mer du Nord, connurent la Norvège, les Détroits et la Baltique d'où ils tiraient l'ambre jaune. Certains pensent qu'ils ont fait mieux encore et prononcent le nom de l'Amérique. A ce haut-fait rien d'impossible. Les drakkars vikings qui touchaient régulièrement l'Islande, le Groenland, Terre Neuve et le Labrador vers l'an 1 000 n'étaient pas plus forts que les sinagots Vénètes des origines. Ces pêcheurs de Paimpol qui, vers 1 430 et 1 450, allaient régulièrement à Terre Neuve et Jean Coëtanlem de Saint Pol de Léon qui, subventionné par Louis XI, passa au Canada vers 1485 - 1490, un bon demi-siècle avant Jacques Cartier, n'avaient pas des bateaux plus forts non plus.
L'amitié de cordiale confiance qui unit longtemps les Vénètes aux caboteurs Carthaginois venant charger régulièrement de l'étain aux Sorlingues est caractéristique : "qui se ressemble s'assemble". Or, ils se ressemblaient beaucoup en tant que matelots finis et explorateurs hardis, les Vénètes et les gens de mer de Carthage. Ils se ressemblaient tellement que lorsque l'amiral punique Himilcon vint à mourir au comptoir carthaginois installé en l'actuel Sarzeau, il voulut être inhumé en terre Vénète ; son tombeau est encore là, à la butte 'de Thumiac qui porte témoignage de cette lointaine amitié.
Ils tenaient si peu à la terre, ces Vénètes, que les hommes n'y demeuraient que le temps d'escaler, de se ravitailler et de repartir ; si peu, que lorsque de l'Est arrivèrent des rumeurs inquiétantes concernant des soldats étrangers qui auraient pénétré sur le sol gaulois, les Vénètes n'y prêtèrent que petite attention. A ce qui se passait sur la pleine terre, ils préféraient ce qui se passait sur la pleine mer où ces envahisseurs, des terriens montés à pied de l'Italie, seraient bien incapables de les suivre.
Cette indifférence ne fut point particulière aux Vénètes. Le caractère celte est ainsi fait que l'individualisme l'emporte toujours sur le raisonnement. Si, dès la première minute, les tribus ou nations gauloises avaient fait bloc contre les légionnaires de César, la Gaule n'aurait jamais été conquise. Au lieu que le Proconsul, aussi fin diplomate que bon homme de guerre, a vaincu en détail des tribus dont chacune, par égoïsme et jalousie, se réjouissait du malheur des armes arrive a sa voisine, sans comprendre que ce serait son tour le lendemain. César dans -son ouvrage "La guerre des Gaules" constate lui-même que ces di visions lui ont livré le pays tout entier en lui permettant d'y introduire des ferments de discorde, grâce aux éléments actifs de sa "Cinquième colonne", et de créer partout l'aide adroite de nombreux "collaborateurs". Naturellement, il n'emploie pas ces mots modernes, mais il expose les faits de telle manière que nous n'avons qu'à transposer les termes pour retrouver les mêmes périls que nous avons connus en des temps plus récents.
Ce fut ainsi que le Proconsul procéda vis-à-vis des Vénètes.
Le guet-apens :
La troisième année de la campagne des Gaules au cours de leurs déplacements rapides à travers le pays les Romains arrivèrent aux frontières de l'Armorique. Et César députa auprès du Sénat de Vannes des envoyés, chargés d'une mission aux termes assez alambiqués qui se résumait finalement ainsi : le Général romain offrait aux Vénètes son amitié, à la condition que ceux-ci accueillissent des troupes romaines qui s'installeraient autour du Morbihan. C'était en fait une proposition d'occupation militaire librement acceptée. Comprenant l'astuce diplomatique, et persuadés que la grande forêt centrale de Bretagne formait sur leurs arrières une protection efficace, tandis que la flotte était toute prête à embarquer tous ceux et celles qui voudraient reculer devant l'approche des légions, les Vénètes refusèrent tranquillement cette offre vraiment un peu trop claire.
Alors, César en fit une deuxième : les troupes de Publius Crassus, campées en Anjou, avaient besoin de ravitaillement; et la récolte en Armorique avait été fort belle. Les Vénètes consentiraient-ils à recevoir des marchands romains qui viendraient acheter chez eux sur place, céréales et bestiaux? Ceci, avec un échange d'otages, dont la présence, de part et d'autre, assurerait la loyauté de la tractation. L'offre fut acceptée. Des Vénètes partirent pour le camp angevin de la septième légion, tandis que Titus Silius et Quintus Vélanius allèrent s'installer, en matière de garants chez les armoricains. Peu après, César exigea le retour de ses envoyés, tout en imposant aussi le maintien des otages armoricains d'Angers. C'était un traquenard, un piège tendu sous les pieds des Vénètes. La querelle éclata aussitôt ; c'est ce qu'escomptait César. Apprenant que leurs compatriotes, d'otages étaient devenus des prisonniers, les armoricains retinrent les deux Romains par représailles ; et le Proconsul les accusa immédiatement d'avoir violé de droit des gens. En vain, les Vénètes affirmèrent-ils qu'ils laisseraient repartir les deux Romains aussitôt qu'on leur rendrait leurs amis. César fait la sourde oreille et arrêta tous les Vénètes qui se trouvaient en Anjou pour leurs affaires et, à marches forcées, jeta son armée sur l'Armorique.
Confiant dans sa force, le Romain croyait n'avoir à faire qu'une simple promenade militaire; il fut vite détrompé. Et lui-même explique dans ses "Commentaires" que les légionnaires, empiégés dans les vasières qu'ils voulaient franchir à pied sec, se voyaient exposés sous la pluie de projectiles lancés des remparts, englués dans la boue molle où ils étaient noyés par le retour des rapides marées montantes. Arrivaient-ils par hasard à escalader un rempart? Les légionnaires voyaient toute la population sortir par la face opposée, s'embarquer sur les navires et cingler vers une Île voisine, en ne laissant aux assaillants que des maisons vides, encerclées par le flot.
La promenade militaire devenait une guerre d'usure avec des pertes cuisantes, tandis que les soldats maugréaient contre tout : les pluies, les brumes les changements de marées, les tempêtes et même les "pierres levées" qui leur semblaient des dieux inconnus et maléfiques.
Tenace cependant, César parvint juqu'à Dariorigum ou Dartoritum qui est devenu Locmariaker et y installa son camp. Véritable camp de la Misère dans la boue, le froid, le vent du large, les ouragans d'hiver ...
En fait, le Proconsul, pris au piège ne pouvait plus ni avancer, ni reculer ; il se sentit perdu. Si à ce moment, les autres tribus gauloises étaient venues à l'aide des Vénètes, César et ses troupes ne seraient pas sortis vivants de cette souricière et la Gaule eut été sauvée de la Romanisation.
Malheureusement, les intrigues romaines avaient fait tache d'huile.
Des tribus du Centre, aucune ne bouge et, au contraire, les tribus de la côte sud de la Loire, jalouses des Vénètes, commirent le crime inexpiable de se mettre au service de César pour lui fournir les seules armes capables de combattre les Vénètes : des bateaux et des marins.
Le combat maval
Pendant que lui et ses fantassins grelotaient dans la boue de Locmariaker, César avait envoyé chez ces tribus, de la Loire à la Bidassoa, Décimus Brutus avec ordre de rallier des navires, de les encadrer de galères romaines montées de la Méditerranée et de venir le délivrer, le sortir de l'impasse. Conduite par des pilotes 8antons et Pictons, cette flotte disparate arriva un beau matin en face du goulet du Morbihan, et aussitôt, manqua de périr sous les yeux de César qui, cette fois, eut réellement peur. Car, en ordre de bataille, l'escadre des plus gros navires Vénètes, hauts sur l'eau et de pesante masse, se déploya en traversant le goulet du Morbihan et se rua sur les divisions de Brutus. Devant cette sortie imprévue, l'Amiral romain, perdant la tête, commençait à jeter ses navires à la côte, aux pieds de César, préférant s'échouer que comtattre. Et l'armée romaine, serrée autour de ses aigles et de son chef, eut le sentiment qu'elle était perdue sans recours.
Mais à ce moment, la mer trahit les Vénètes marins au profit des terriens de Rome et de leurs auxiliaires, traitres à la cause gauloise. Le vent tomba il se fit calme plat. Les grosses hourques vénètes ne pouvaient manoeuvrer qu'à la voile ; elles se mirent à dériver par le flanc. Décimus Brutus alors, reprenant courage et ayant sous ses ordres dix navires contre un des Vénètes, les jeta successivement à l'abordage de chacune des citadelles flottantes immobilisées, dont, avec des faux emmanchées ; il parvint à trancher les cordages et à abattre le gréement.
A partir de ce moment, et malgré la défense enragée des équipages Vénètes qui ne pouvaient, faute de vent se porter au secours les uns des autres, ce fut un égorgement sans nom. Les légionnaires romains, embarqués sur les vaisseaux de Brutus, attaquèrent séparément chacun de ces pauvres navires comme des radeaux. Se mettant à vingt contre un, ils massacrèrent les équipages vénètes les uns après les autres, sous les yeux horrifiés des populations accourues sur la côte de Sarzeau, tandis que, de l'autre rive du goulet, montaient les acclamations et les sonneries de trompes des fantassins de César. Toute une suite d'heures atroces. Navire pris après navire pris, le feu achevait l'oeuvre des glaives ; morts, mourants, blessés et survivants brûlaient ensemble comme des torches, cependant que les égorgeurs romains, passant aux bâtiments, poursuivaient sauvagement leur atroce besogne, toujours écrasant sous le nombre chaque équipage ainsi assailli séparément.
Quand enfin le soir tomba, la grande flotte Vénète de deux cent vingt voiles, massacrée et incendiée en détail, n'existait plus et les buccins, autour de la tente de César, sonnaient le salut aux vainqueurs, cependant que les derniers des vaisseaux vénètes achevaient de brûler et de couler tas avec leurs équipages de morts et de mourants.
Le Proconsul s'était jugé perdu ; il avait eu peu. Ses soldats avaient leur Général inquiet et tremblant. Aussi César fut-il impitoyable aux survivants du peuple vaincu. Et il eut le triste courage de résumer en ces termes son verdict de vainqueur impitoyable dans ses "Commentaires", où il parle toujours de lui à la troisième personne : "César fit mourir tout le sénat et vendit le reste du peuple à l'encan".
Epouvantable vengeance à froid contre les vieillards, les femmes et les enfants de ceux qui auraient été •les vainqueurs de la Louve Romaine si le vent ne les avait pas trahis et livrés à leurs adversaires, au moment où ils allaient sauver la Gaule en abattant le conquérant, pris au piège de sa propre conquête. Et tandis que les corps des marins vénètes s'en allaient rouler aux abimes de l'Atlantique, les tristes survivants de ces familles décimées et de cette nation rayée de la vie gauloise partaient en longues colonnes lamentables vers l'Italie, où les trafiquants d'esclaves allaient les disperser aux enchères sur tous les marchés de chair humaine, épars de Rome à Babylone.
Sous le grand soleil d'été, sous les brumes froides d'hiver, le pays vénètes n'était plus qu'un désert. En fait, la Gaule, divisée contre elle-même, était dès lors perdue. Car, il ne faut pas s'y tromper, la défaite des Vénètes contenait en germe, malgré le sursaut de Gergovie la capitulation d'Alésia, de même que dix huit cents ans plus tard, la défaite de Trafalgar allait contenir en germe, malgré le soleil d'Austerlitz, la défaite de Waterloo.
Cet article reproduit mot pour mot la nécrologie de Marguerite LAYEC [ 7/2/1907 St Gildas - 2/9/1977 Vannes], parue dans le bulletin paroissial de Séné, à l'initiative de l'Abbé Jospeh LE ROCH.
2 SEPTEMBRE : DÉCÈS DE MLLE MARGUERITE LAYEC, ENSEIGNANTE A KERANNA, CATÉCHISTE ET ORGANISTE DANS LA PAROISSE DE SENE DEPUIS 1930.
Après un mois seulement de maladie, s'éteignait une figure bien chère à toutes les familles de SÉNÉ: Mlle MARGUERITE LAYEC, enseignante à l'école de KERANNA de septembre 1930 à juillet 1973, catéchiste en 1974 et 1975, organiste à l'église jusqu'au 30 juillet dernier. Très nombreux, les Sinagots, jeunes et anciens (3 générations) se sont relayés pendant près de 3 jours à l'oratoire près du presbytère, pour veiller sur celle qui les éduqua pendant de si longues années. Une foule, celle que l'on retrouve au jour de la Toussaint, a voulu l'accompagner jusqu'à sa dernière demeure, au cimetière même de SÉNÉ. Dans son homélie, Monsieur le Recteur s'est essayé de retracer la vie si remplie de Melle MARGUERITE.
Pierre disait à JESUS : "Voilà que nous avons tout quitté pour te suivre"; JESUS lui répondit : "En vérité, je vous le dis : personne n'aura quitté, à cause de moi et de l'Evangile une maison, une famille sans qu'il reçoive déjà le centuple en sa vie et, dans le monde à venir, la vie éternelle. " Mes Frères, à voir votre très nombreuse assistance autour du corps de Melle MARGUERITE, n'est-ce pas cette parole du CHRIST réalisée aujourd'hui à SÉNÉ? C'est en effet la très grande famille de ses amis, de ses anciens et anciennes élèves, réunis autour de sa famille propre, une très grande famille qui continue aujourd'hui à l'entourer, comme elle l'a toujours fait depuis tant et tant d'années, et qui est là pour demander au SEIGNEUR, que Melle MARGUERITE reçoive cette récompense, assurément méritée par tous les vrais disciples qui ont mis leur vie au service du CHRIST dans leurs frères. Cette récompense ici-bas, de vivre longtemps, ensemble, et , un jour, la Vie Eternelle.
Vous les parents de Mlle MARGUERITE, et vous, chers paroissiens de SÉNÉ, ses nombreux amis et ses anciennes élèves de l'école de Kéranna, oui c'est bien l'affection, la sympathie, la reconnaissance qui vous réunit cet après-midi comme les frères et soeurs d'une grande famille, à l'occasion des oèques d'une amie de famille.
Née en février 1907 à Saint-Gildas de Rhuys, Mlle Marguerite a passé toute sa vie au service de l'enseignement chrétien. Tout d'abord institutrice à l'école de Sérent, où elle resta 5 années, c'est ici, à Séné, qu'elle consacra pour ainsi dire toute sa vie. Arrivée à Keranna en Septembre 1930 elle ne devait quitter notre école, pour prendre une retraite bien méritée, qu'en Juillet 1973.
Le 21 octobre de cette année 1973, beaucoup d'entre vous étaient réunis autour d'elle dans cette église pour une messe d'actions de grâces, à l'occasion de ce dépàrt en retraite.
Et le Directeur de l'Enseignement Catholique, Mr. l'abbé MOULLAC,disait ceci :
" ...Malgré tous vos mérites, je ne vais pas, Mlle MARGUERITE, prononcer votre panégyrique [discours à la luange de quelqu'un] , votre simplicité naturelle, votre modestie seraient blessées si je m'attardais à vanter le bel exemple de fidélité de travail et de dévouement que vous donnez. La présence nombreuse de vos anciennes et anciens élèves, celle de leurs familles et de tous vos amis, leurs prières ferventes, adressées au Seigneur à toutes vos plus chères intentions, attestent suffisamment combien ils ont conscience de vous être redevables de leur éducation, et comment ils entendent vous en garder une profonde reconnaissance" .
Et après une réunion dans la joie, à l'école, Mlle MARGUERITE vous remerciait de votre reconnaissance, et elle terminait oar ces mots "A Séné j'ai vécu, à Séné je mourrai. .. "
Nous ne pensions pas que, quatre ans après, son souhait devait se réaliser : revenir parmi ses sinagots ... les rejoindre, mais à travers la mort ... et dans la prière ... et reposer enfin au milieu d'eux, au cimetière de Séné, près des prêtres, des religieux, des enseignants, (ici, je pense à quelqu'un qui, comme elle, donna le meilleur de sa vie à Séné, Mr. Aimé CAPPÉE).
A mon tour, je ne ferai pas le panégyrique de Melle MARGUERITE. Il y aurait tant à dire, non seulement pour ses 47 années données à l'enseignement chrétien, mais aussi pour tout son dévouement à la cause des jeunes, les Bruyères d'Arvor, du théâtre, du chant, de l'orgue (elle était encore à son poste, ici, le 30 juillet dernier), son dévouement à visiter les familles, les malades aussi bien chez eux qu'à l'hôpital ou dans les cliniques. Chacun de vos coeurs se remémore ce que Mlle Marguerite a fait pour son éducation chrétienne ... et cela durant trois générations. Restée fidèle à sa foi, à l'enthousiasme, à l'esprit de service de ses débuts, Melle Marguerite a eu le mérite non seulement d'avoir duré, mais aussi de n'avoir jamais dévié.
En hommage à Mlle. MARGUERITE, voici deux photos qui la rappelleront combien sa vie a été intimement mélée à celle des Sinagots. Ci-dessus à Lourdes en 1952, entourant: M. l'Abbé PERON, alors vicaire de Séné, et Mlle Marguerite :
Ier rang en haut, à partir de la gauche : Mme Lucienne PENRU, Mme LODEHO, Mme DORIDOUR, Mme Vve DORIDOUR, Mlle LE FRANC, Jean LE MEITOUR, Emile NOBLANC du Goanvert
2ème rang: Mme Pascaline DOUARIN, Mme LE RAY, Mlle Alphonsine NOBLANC, Mlle Philomène SAVARY, Mlle LAYEC, Mme Emile NOBLANC, Mme Léon GREGAM de Montsarrac
3ème rang : Soeur Sophie BARO, Mme PIERRE, Mlle MIRAN, Clothilde BOCHE, L'abbé PERON, Mme PIERRE, Mlle DORIDOUR, Mlle MIRAN, Soeur PIERRE.
Et c'est ensemble que nous prierons à cette messe pour elle ... que nous demanderons au Seigneur, par l'intermédiaire de Notre Dame, Saint Patern, Sainte Anne de nous guider comme elle, aux sentiers de vie, et de nous ouvrir un jour sa maison .
Un an plus tard, paraissait dans le bulletin paroissial cet autre article en souvenir de Mlle Marguerite :
SOUVENONS-NOUS ! Voici un an déjà déjà. que nous a quitté Mademoiselle LAYEC , mieux connue sous le prénon de Mlle MARGUERITE.. Parmi nous elle a vécu, connaissant et aimanttous. Son don d'elle-même aux autres dans l'enseignement, ses multiples services, ses visites aux familles sinagotes, sa présence dans le domaine musical à la paroisse lui ont valu l'estime de tous. Elle a désiré rester parmi ses Sinagots en partageant leur champ de repos éternel. Ayons parfois pour elle une pensée, une prière ou une fleur. Car, savez-vous qu'elle a dédié à tous ses amis dans les années 50, surl'air de "La Paimpolaise" ce chant, dont nous sommes les heureux héritiers, et que voici : |
Un autre article parut à son sujet :
Marguerite Layec est née en février 1907 à Saint-Gildas de Rhuys et est morte à Vannes le 2 septembre 1977. Elle est enterrée dans le cimetière de Séné.
D'abord institutrice à Sérent pendant cinq ans, elle vint ensuite à l'école Sainte-Anne en septembre 1930 où emme restera jusqu'à sa retraite en 12/9/73 soit 43 ans. Tout en étant enseignante et catéchiste à l'école, elle assumait la fonction d'organiste de la paroisse et s'occupait des loisirs des jeunes filles. En classe où elle enseignait avec tout son savoir de pédagogue, elle apprenait aussi à ses élèves à mieux connaître Dieu, le Seigneur. Elle préparait les filles à la 1ère communion, aux processions de Fête-Dieu ou l'on jonchait le sol de pétales de fleurs. Elle apprenait également le chant aux enfants et avait formé une chorale qu'elle accompagnait à l'harmonium. Avec ses anciennes élèves devenues grandes, elle préparait des séances récréatives : rondes de petits, danses rhytmiques des moyennes, ballets et pièces de théâtre pour les autres. Le dimanche, avec les jeunes filles, elle organisait des visites pour mieux connaître la Bretagne. Les jeunes filles ont formé les Bruyères d'Arvor puis la Jeunesse Agricole Chrétienne Féminine, JACF, toujours sous la conduite de Mlle Marguerite, aidée alors par l'abbé Poëzivara. Elle rendait visite aux familles sinagotes et accueillait les nouveaux arrivants. Elle a composé "la chanson de Séné" sur l'air de la Paimpolaise et a laissé un excellent souvenir dans le coeur de plusieurs générations de Sinagots.
Le complément de wiki-sene : "Nul ne guérit de son enfance" Jean Ferrat.
L'examen de son acte de naissance recèle peut-être le "secret" de Marguerite Pauline LAYEC. Lorsqu'elle nait le 7 février 1907 à Saint-Gildas de Rhuys, elle est la fille de Marie Ernestine LAYEC, sa mère et de son père, Jean Marie Eugène QUATREVAUX [5/71877-10/11/1915], capitaine au long cours.
Cependant, une mention marginale indique que par un jugement du 3 juillet 1907, le Tribunal Civil de Vannes, reconnait à M. Quatrevaux, sa non-paternité sur cet enfant, né d'un adultère, sans doute était-il en mer...
Marguerite Pauline QUATREVAUX, prend dès le nom de jeune fille de sa mère, et devient Marguerite Pauline LAYEC. Sa mère divorcera et se remariera le 21/2/1911 avec Jean Louis LE TEXIER [1880-1976] dont elle aura un fils, Jean [1912-2014]. M. Jean Marie QUATREVAUX se remariera avec Jeanne Angèle DURAND le 25/8/1913 avant de disparaitre en mer en novembre 1915. Il étati à bord du vapeur Boileau au départ de Swansea avec une cargasion de charbon et à destination de Nantes. Aucun sous-marin n'a revendiqué avoir coulé le Boileau. Jean Marie Quatrevaux ne fus pas déclaré mort poour la France.
Cette identité tourmentée est sans doute à l'origine du célibat de Mlle Marguerite et de son dévouement pour les autres.
En fouillant sur le site Gallica-BnF et avec quelques mots clefs de recherches bien choisis (on ne divulguera pas lesquels) on finit par trouver, avec un peu de chance et d'attention, les références d'un livre de l'écrivain, Eugénie-Caroline Saffray, dite Raoul de Navery [Ploërmel 21/09/1829 - La Ferté-sous-Jouarre 17/05/1885].
Ce recueil intitulé Récit consolants, publié en 1860, rasemble des nouvelles et des anecdotes, dont une, nous dresse le portrait d'un marin sinagot. Découvrons qui il était. [Texte original enrichi et illustré].
Les habitants de Dinan ont pu remarquer en se promenant dans les rues de la ville, un matelot aux allures martiales, dont la poitrine est toute constellée de décorations. Ce noble champion de nos armées navales se nomme Julien TREHONDART [12/3/1816-5/2/1859]: c'est un enfant de notre vieille Bretagne, né à Séné, près de Vannes, comptant 33 ans de navigation [mousse à l'âge de 9-10 ans], 11 au services de l'Etat, et 42 ans d'âge. [texte écrit en 1858 à son retour de Crimée]
Fils aînée d'une pauvre veuve chargée de neuf enfants, Julien TREHONDART voulut de bonne heure aider sa mère et il embrassa la carrière maritime.
Sa mère, Marie NOBLANC [16/9/1787-16/12/1848] était mariée à Julien TREONDART [12/10/1784-20/6/1832] et la famille vivait de la pêche à Montsarrac. Après son mariage en le 20/1/1814, elle eut 8 enfants, dont deux morts en bas âge.
En 1835, à 20 ans, il était reçu maitre cannonier à bord de la Jeanne d'Arc; en 1836, il passait en la même qualité à bord de Vénus, commandant Dupetit-Thouars, faisant preuve en tous lieux d'un ardent courage.
Navire Le Vénus : Une frégate de 52 canons type Vénus (1823 - 1846) construite à Lorient à partir de février 1820. Mise à flot le 12 mars 1823, elle participe la même année au blocus de Cadix. En 1824, elle fait campagne au Sénégal, en Guadeloupe et à Saint Pierre et Miquelon. En 1825, 1827 et 1828, elle est aux Antilles. En 1828, elle part de Brest à Toulon, puis est à Navarin et dans l'archipel grec, et rentre à Brest l'année suivante. En 1830, elle retrouve la Méditerranée pour l'expédition d'Alger, armée en flûte. Refondue en 1824, elle effectue du 29 décembre 1836 au 29 juin 1839 un voyage autour du monde (Valparaiso, Callao, Honolulu, Kamchatka, San Francisco, Marquises, Tahiti, Australie, Bourbon, Ste Hélène) sous le commandement du CV Abel Aubert du Petit-Thouars (1793–1864). De retour en France, elle servira comme école des apprentis canonniers à Toulon (1840-41), avant d'être condamnée en septembre 1846, elle sert alors de ponton-dépot de charbon à Gorée sous le nom d'Utile. (Caractéristiques : 52 x 13 m ; 10 nds ; XVIII.24 + XXII.caronades.24 + II.18).
[vérifier aux SHD de Lorient si Trehondart est de cette expédition]
Quand la guerre d'Orient éclata (en 1853) Julien TREHONDART était déjà décoré de trois médailles de sauvetage (deux médailles d'argent et une médaille d'or, décernées en 1845, 1846, 1851), récompenses conquises au péril de sa vie, en retirant plusieurs individus des flots et des flammes.[incendie dans des bateaux équipées de chaudières à charbon] Il s'embarqua pour la Crimée avec trois de ses frères, courageux comme lui, dont deux sont morts aux tranchées à ses côtés, devant Sébastopol.
Sur sa fiche d'inscrit maritime, on note qu'il effectue plusieurs mission sur des navires de la marine impériale. Il embarque en mars 1854 sur l'aviso vapeur Le Tonnerre; puis sur le Liamone; il est ensuite sur la corvette Le Chaptal et sa dernière mission est effectué sur Le Donawerth.
Le Donawerth
Les registres de l'état civil de Séné font apparaitre 3 garçons Trehondart : Julien, Pierre Marie [21/9/1817 - marié en 1847 - ??] et Jean Marie [6/10/1824-26/4/1859] décèdé à bord de La Sané le 11 mars 1856 sans doute de maladie et son corps jeté à la mer....(Lire l'article sur la guerre de Crimée). Pierre Marie a dû être mobilisé en Crimée ( aller véfieri au SGD de Lorient).
Julien TREHONDART s'est battu comme un lion : il a reçu onze blessures, a deux fois été prisonnier. Il est rentré il y a huit mois en France avec la croix de la Légion d'Honneur, la Croix de l'Ordre de Medjidié, la croix d'Isabelle d'Espagne, la croix de Saint-Grégoire Le Grand, une ceinture d'honneur en or et ses trois médailles. Les quatre frères Tréhondart [il ne serait que 3 selon l'état civil de Séné], nous a-t-il dit, possédaient entre eux vingt-quatre décorations. C'était une famille de héros.
Les décorations : la Légion d'Honneur est stipulée sur son acte de décès. Le sultan Abdulmécit 1er créa la Croix de Mejjidié largement isnpiré de la Légion d'Honneur Française. La croix Isabelle d'Espagne, la Catholique est un ordre institué en Espagne en 1815 par Ferdinand VII, pour récompenser ceux qui avaient défendu ses domaines d'Amérique.[rechercher ]. L’ordre de Saint-Grégoire-le-Grand est une décoration accordée par le Saint-Siège (Vatican), à titre civil ou militaire. Fondé le 1er septembre 1831 par le pape Grégoire XVI en l'honneur du pape Saint Grégoire. [rechercher] Ces deux décorations pourraient être liés aux sauvetages auxquel TREHONDART s'est illustré...
A la fin de la campagne de Crimée, il reprend la navigation sur la Victoire Rosalie avant de "rentrer au pays de Séné" où il devient pêcheur sur l'Impératrice Eugenie.
Un des regrets de TREHONDART est de ne pas savoir lire. "Ah s'écriait-il un jour en présence d'un des plus célèbres officiers de la flotte, si j'avais su lire et écrire comme vous, monsieur, j'aurais voulu devenir amiral comme vous!..."
Julien TREHONDART se maria à Séné le 20 juillet 1841 avec Julienne LE GREGAM [27/152/1819-25/9/1880] dont il eu au moins 3 enfants : Pierre Marie (1842), Jeanne (1844) et Louise (1847). L'article ci-dessus nous relate que lui et sa fille Marie Jeanne TREHONDART [5/6/1844-9/3/1859] périent en mer à cause d'un coup de vent le 31 janvier 1859 près de La Garenne et Montsarrac. Le corps du père fut retrouvé le 5 février près de la Garenne et celui de sa fille, le 9 mars près de Brouel.
Si Julien ne savait pas lire, il ne savait non plus nager comme un grand nombre de marins de cette époque.
Les géographes savent figer le temps sur leur cartes. Au temps de Cassini, on trouve sur l'île de Boëd une chapelle et sur la côte nord plusieurs oeillets de salines sont figurés.
Cependant, la présence humaine sur cette terre date du temps des mégalithes. En effet, sur l'île de Boëd, autrefois rattachée au continent, furent élevés des dolmens dont il nous reste quelques vestiges (Lire article par Archéologie). On peut voir au Musée Gaillard, une hache en fibrolite retrouvée sur Boëd.
C'est sans doute pour effacer ces rites druidiques de la mémoire des habitants, que fut érigée sur Boëd une petite chapelle. Cette carte datée de 1771-1785, le situe par un carré rouge comme elle indique l'emplacement des mégalithes par deux croix rouges, l'une sur la butte du Petit Bout et l'autre à l'ouest de l'île.
Etymologie : Le vice-amiral Antoine-Jean-Marie Thévenard [Saint-Malo 7/12/1733-Paris 9/2/1815] donne une étymologie aux mot boëd dans ses Mémoires Relatifs à la Marine Tome II édité en l'an VIII.
Voici ce que dit, dans son dernier ouvrage publié en 1847, François-Marie Cayot-Délandre (13/3/1796 Rennes-7/9/1848 Vannes) de la Société Archéologique du Morbihan, à propos de la chapelle et des vestiges de mégalithes:
De ce point de la côte du Morbihan à l'île de Boued, qui fait partie du territoire de Séné, il n'y a qu'une fort petite distance, qu'on peut franchir à marée basse en passant sur une digue ou chaussée établie pour faciliter les communications entre cette petite île et le continent. Une antique petite chapelle ogivale se voit de loin sur cette terre dépouvues d'arbres; elle n'offre aucun intérêt sous le rapport de l'art; elle est remarquable seulement par sa position au milieu des monuments druidiques, dont les vestiges, malheureusement très incomplets, suffisent cependant pour témoigner de l'importance qu'ils durent avoir.
Au nord-ouest de la chapelle et sur le sommet pierreux d'un mamelon, se voient les débris d'un dolmen placé au centre d'un cromlech, dont le cercle est encore assez bien tracé pour qu'on puisse le distinguer. La position de ce monument sur un monticule dont le pied est battu par l'océan, indiquerait seule l'importance de ce coin de terre sour le rapport de l'exercice du culte druidique; mais cette importance s'accroit encore par la présence d'autres monuments du même genre placés à l'extrémitié opposée de l'île, au sud-ouest de la chapelle, où se trouvent deux mamelons, dont le plus rapprochés présente un dolmen bouleversé, et l'autre trois monuments de même espèce, pour ainsi dire contigus, mais dans un état de ruine complète.
Le relevé du cadastre napoléonnien de 1810 montre une multitude de parcelles traduisant une longue présence humaine et des successions de propriétaires. Pourtant, l'île ne compte qu'une métairie et les ruines de l'ancienne chapelle Saint Vital. (Lire article dans Eglises é chapelles). Au nord est de l'île, plusieurs oeillets de marais salants.
Lors du dénombrement de 1841, on ne recense aucun paludier sur Boëd, indiquant que les salines sont entretenuent par quelqu'un du continent.
François LE FRANC, né à Boët, et son épouse Jeanne LE GUILLANTON, sont établis dans la 1ère métairie de l'île de Boëd.
En consultant les registres de l'état civil, on peut reconstituer la généalogie de François LE FRANC. Ainsi, son père Louis LE FRANC, natif de Cariel, s'est marié en 1781 avec sa première femme, Perrine LE FLOCH, tous deux habitant Séné sans plus de précision. Leur premier enfant, Jean LE FRANC qui nait à Boëd le 28/5/1782, permet d'éstimer que les Le Franc s'établirent sur Boëd au plus tard vers 1781-82 et que leur venue sur l'île n'est pas liée à la Révolution Française.
Son frère, Pierre Marie LEFRANC, est "arrivé au corps" le 23/11/1808 au sein du 75° Régiment d'Infanterie de Ligne de la Grande Armée de Napoléon 1er. Il moura de fièvre (typhoïde?) à Palencia en Espagne en 1810.
Le relevé cadastral de 1845, précise le contour des oeillets des marais salants et situe à nouveau la chapelle et la métairie occupée par les Le Franc. La comparaison des dates de naissances de leur deux derniers enfants morts en bas âge, Patern LE FRANC en 1848 et Patern LE FRANC en 1855, permet de dire que la famille Le Franc quitta l'île de Boed pour s'installer à Moustérian comme cultivateur.
1ère maison, métairie de cultivateurs : Louis LE FRANC [1782-1831] ->François LE FRANC [1831-1855]->
Entre 1848 et 1860, les tables annuelles des registres d'état civil incluent l'indication du village de naissance ou de décès. Ainsi est-il plus aisé de repérer la famille de Julien MONFORT [8/01/1815-1/05/1904] et Marie Vincente LE GALLIC [1817-24/6/1875], établis comme paludiers sur l'île de Boët. La naissance d'un enfant mort-né le 1/08/1839, nous apprend qu'ils étaient originaires du village du Gohavert. Leur premier enfant nait sur l'île de Boët le 13/11/1840, (après le passage de l'officier en charge du resencement), et leur septième enfant, Jeanne Marie nait à Boët le 3/5/1853. De cette époque doit dater la constructionde la 2° maison sur Boëd, occupée par des paludiers et ensuite par des cultivateurs.
On repère également l'acte de naisance de Vincent Marie RICHARD né le 13/7/1859 et dont les parents, Pierre RICHARD et Michelle LE LAN, sont paludiers à Bouet. Leur autre enfant Michelle RICHARD nait à Billerois alors que ses parents sont journaliers sur les salines. Ils reprendront donc les salines de Bouet au départ des Monfort. Michelle épouse le 10/9/1882 Pierre Marie LE RAY mais elle déclare déjà la profession de cultivatrice, confirmant l'arrêt de la saliciculture à Boëd.
2° maison : salines de Boëd : les Monfort (1840-1855) puis les Richard (1855-1880)
Le dénombrement de 1901 indique la présence de 2 familles de cultivateurs établis sur Boëd : la famille MALRY x Savary qui emploie leurs neveux, Jeanne Louise et Arsène MALRY et la famille LE RAY x Richard.
La généalogie de Vincent Marie MALRY nous renseigne sur la date d'arrivée des Malry à Boëd. Lui (16/4/1859 Boët) et son frère Jean Louis MALRY (3/06/1857 Boët) sont nés sur l'île. Leur soeur Julienne Marie, quant à elle nait à Vannes le 1/2/1854 comme l'ainé de la famille Jean Marie le 1/7/1852. Ainsi,, leurs parents, Patern MALRY [4/1/1828-14/1/1879] et sa première épouse Marie Vincente BOTHEREL [8/9/1824-17/1/1871], originaires de Vannes, s'installent comme cultivateurs sur l'île de Boëd à la suite du départ des Le Franc vers 1855.
Au décès de Vincent Marie MALRY, son neveu, Arsène Louis Marie MALRY [18/4/1882-7/10/1915] reprend l'exploitation. En 1906, lors de son mariage, il est sur Boëd et lors du dénombrement de 1911, il est pointé aec son épouse et son fils. Arsène MALRY, Mort pour la France, décèdera à Tahure pendant la guerre de 14-18. (lire page Centenaire)
1ère maison, métérairie de cultivateurs :
Louis LE FRANC [1782-1831] ->François LE FRANC [1831-1855]->Patern MALRY [1855-1879]-> Vincent Marie MALRY [1880- ca1905 ]-> Arsène MALRY [ ca1905-1914]
La généalogie de Pierre Marie LE RAY [ 9/9/1846-24/5/1911] nous renseigne sur la date de leur établissement à Boëd. Lors de son mariage, le 10/9/1882, sa future épouse, Michelle Marie RICHARD [23/8/1856 -? ]déclare être cultivatrice à Boëd. Leur 1er enfant, Ange Mathurin LE RAY [11/6/1883-31/12/1902] nait sur l'île où il décède enfant.
2° maison : les Monfort (1840-1855), paludiers puis les Richard (1855-1880), paludiers puis les Le Ray, cultivateurs.
En 1906, Frédéric GOUELLO, gardien des parc à huîtres, vit également sur l'île dans la tour de Ténéro (Lire l'histoire complète de la Tour Tenero). On retrouve ces 3 familles au dénombrement de 1911.
Après la première Guerre Mondiale, il n'y a plus de gardien sur la tour de Tenero. Edouard LACROIX, ancien paludier de Michotte et son fils, Célestin LACROIX [11/11/1891627/05/1930] cultivent les terres de Boëd, comme nous l'indiquent les dénombrements de 1921 et 1926.
Le dénombrement de 1931, montre que Mme Marie Rose GUILLEMET, après le décès de son mari Célestin, continue de cultiver des teres à Boëd. La métairie de son beau-père est quant à elle reprise par Jean Marie LE VAILLANT [8/6/1877-1934].
Les dénombrements de 1931 et 1936, nous indiquent que ce sont les LE VAILLANT qui travaillent les terres de Boëd mais aussi Boëdic. Mme DREAN veuve LE VAILLANT [2/12/1878-29/12/1962] et ses enfants Marie Thérèse, Julien Marie et Marie Josèphe sur Boëd; Joseph Julien Marie, Anne Marie sur Boëdic avec un domestique.
Le 20 octobre 1936, Mme Jeanne Marie DREAN, veuve LE VAILLANT, marie le même jour à Séné, quatre de ses quatre enfants (Lire article sur les noces).
La barque à la rame était le moyen de gagner le continent à marée haute. A marée basse, un gois réapparait sur l'estran et permet de gagner l'île à partir de Cadouarn, pour des promenades ou accéder à la plus belle plage de Séné. Avant guerre, il y avait un deuxième pasage à marée basse pour les charettes aujourdh'ui perdu dans la vase comme il existait un gois qui permettait de rleier les deux îles Boëd et Boëdic.
Gois piéton entre Cadouarn et Boëd
Franchir le passage n'était pas anodin pour une population qui ne savait pas nager et à cause des vasières où l'on pouvait s'enfoncer. Plusieur noyades en témoignent :
Ainsi le 5 juillet 1790 est inhumé à Séné, Louis PIERRE [1/01/1780-4/07/1789], noyé le jour précédent au passage de l'île de Bouëte.
Le 21 mai 1845 on retouve le corps de Jeanne PALUD [3/10/1798-21/5/1845], femme de Jopseh NIO, noyée à l'île de Bouët.
En 1939, Julien Marie LE VAILLANT |18/3/1913 -5/06/1939] qui vit sur Boëd rend visite à son frère Joseph qui demeure sur Boëdic. En rentrant, il s'envase sur un passage qui relie les deux îles à marée basse. On retrouvera son corps au Badelle lendemain.
Après guerre, l'île a accueilli d'autres constructions puisque en plus des 2 métairies agricoles, il existe aujourd'hui sur l'île 3 autres habitations (lire page Découvertes-Balades).[rechercher les dates de construction]
Dans les année 19xx, le Conseil Général du Morbihan achète 32 ha de terres sur la point du "Peti Bout" sur un total de 48 ha que compte l'île de Boëd. Cette partie orientale de l'île constitue un "espace naturel sensible" malheureusement dans un état écologique médiocre.
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