La presse, en ce mois de novembre 1924, fait les gros titres avec ce meurtre, rue de la Garenne, à Vannes, non loin de la porte Prison...
L'Avenir du Morbihan relate ce fait-divers : Le drame de la Rue de la Garenne.
Dimanche dernier vers cinq heures du soir, un drame sanglant vint troubler la quiétude des habitants de la rue de la Garrenne. Dieu merci, ces tragédies sont rares dans notre ville dont on se plait chaque fois, en évoquant son nom, à décrire le calme de ses rues et la tranquilité de ses habitants.
Dans ces conditions il n'est pas difficile d'imaginer l'émotion qui s'empare de tous lorsque, au hasard de la vie et des rencontres, le revolver ou le couteau entrent en jeu et lorsque, surtout, ils laissent des traces sanglantes qui, comme dimanche, mettent le point final à de jeunes existences arrivées presque, au seuil du bonheur.
La reconstitution du drame
Dans l'après-midi de Lundi, le juge d'instruction, M. Le Meur, accompagné de M. le commissaire de police Bourdon, s'est rendu rue de la Garenne, pour reconnaître les endroits où le drame s'est déroulé.
C'est près des magasins de M. Josse, à deux pas de la grille d'entrée de l'habitation de Mme Normand, chez qui était en service Désirée Rolland, que les coups de revolver furent tirés.
Désirée Rolland arrivait chez sa patronne venant de la rue des Vierges. Joseph Allanioux, sachant sa rentrée imminente, arrivait à sa rencontre par la rue de la Garenne. Quelques paroles furent prononcées; puis, trois détonations retentirent successivement et les deux corps s'affaissèrent sur le trottoir.
L'autopsie de la victime
L'autopsie de Désirée Rolland a été faire dans l'après-midi à l'amphithéâtre de l'hôpital mixte. Les deux coups de revolver qu'elle a reçus lui avaient traversé le corps de part en part et l'un avait atteint le coeur. La mort a donc été foudroyante. Dans la soirée, la mise en bière du cadavre eut lieu après de nombreuses visites que reçut une dernière fois la malheureuse domestique.
L'enquête
D'après les premières déclarations du meurtrier, il se serait agit d'un drame passionnel; les deux fiancés ne pouvant être unis, la tante de la jeune fille s'y opposant. Mais on ne pouvait se défendre d'un certain scepticisme quant à leur exactitude et nous étions finalement conduits à nous demander s'il disait réellement la vérité et si, plutôt, il ne s'agissait pas non d'un double suicide mais d'un crime. Nous le laissons entendre en écrivant qu'il y avait eu des propos assez vifs échangés entre les deux jeune sgens, ce qui n'est pas le fait d'amoureux qui ont l'intention de se donner leur suprême baiser dans la mort. Nous le laissons également entendre en nous étonnant du lieu choisi: la voie publique.
Nous étions dans le vrai et , hier, Joseph Allanioux devant le magistrat instructeur a reconnu qu'il n'était plus l'amoureux rêvant aux étoiles, ni le romanesque fascinateur de sa fiancée qu'il aurait décidé d'accompagner dans la mort, mais bien le vif assassin d'une fiancée que sa famille se refusait à marier. Alors il a raconté sa journée et celle de la victime.
Désirée Rolland ayant obtenu un congé de la journée, s'en fut le passer à Bellevue chez sa tante. Allanioux vraisemblablement, devait être au courant de ce congé. Il se rendit dans ces parages. Il fut un peu désappointé en voyant sa fiancée en compagnie de quelques jeunes filles des villages voisins. Il la croyait seule et comptait probablement obtenir d'elle des promesses relatives à un mariage que sa tante ne voulait pas.
Avec d'autres personnes, le canot qui assure le passage, les transporta à Conleau et il y aurait eu, parait-il, des propos assez vifs échangés, ceux auxquels nous faisons allusion et - pour y couper court - Désiré Rolland prit rapidmeent le chemin de Vannes, suivie d'Allanioux. Pour arriver chez sa patronne, la jeune fille passa directment par la place des Lices et la rue des Vierges. Le jeune homme monta la rue de la Garenne. Tous deux se retrouvèrent où nous l'avons dit. On sait le reste.
Allanioux a ajouté que sa fiancée ne l'avait jamais abandonné; que c'était seulement sa tante qui s'opposait au mariage. Ceci est contredit par plusieurs amies de la jeune fille.
La victime
Originaire de l'Ile aux Moines, Désirée Rolland était une belle et forte fille, éprouvée de bonnes heures par la mort de ses parents, survenue au cours de la guerre, dans un torpillage de bateau. Elle jouissait de l'estime de tous ceux qui la connaissaient.
La préméditaioin
M. Thiphaigne, oncle de la victime, a fait des déclarations très graves, qui démontrèrent nettement que l'assassin avait prémédtié son crime; "Ma nièce, a déclaré Mathurin Thiphaigne, retraité des Douanes, s'était fiancée il y a trois semaines à Joseph Allanioux, employé des chemins de fer dans la Ruhr, puis affecté au Bourget. Le jour des fiançailles, il s'est montré d'un caractère jaloux et emporté avec sa fiancée, lui cherchant dispute et lui disant qu'elle n'était qu'une imbécile comme son oncle et sa tante. Il ajouta qu'une fois mariée, il l'empêcherait d'écrire à sa tante et à moi-même.
Craignant que leur nièce ne soit malheureuse avec Allanioux, M. et Mme Thiphaigne lui conseillèrent de reompre les fiançailles. Désiré Rolland se montra affectée, puis par la suite, elle prit son parti de rompre.
Lorque Allanioux a connu la rupture, a déclaré M. Thiphaigne, il a déclaré devant lui, sa femme et sa soeur Eugnéie, qu'elle ne vivrait pas longtemps.
TERRIBLE DRAME A VANNES
Il l'aimait, il la tua !
Un drame terrible et odieux 'est déroulé dimanche dernier à Vannes.
Un jeune homme, Joseph Allanioux, 25 ans, a tué une jeune fille, Désirée Rolland, âgée de 17 ans dans les circonstances suivantes :
Allanioux s'était fiancé il y a trois semaines avec Désirée Rolland, à Séné.
Le jour même sa tenue inconvenante et grossière révolta la jeune fille qui déclara que tout était rompu.
Depuis, il poursuivait Désirée de ses assuidités et essayait de la faire revenir sur sa décision. Dimanche, le jour du crime, Désirée Rolland était allée seule rendre visite à son oncle et à sa tante. M. et Mme Thiphaigne à Bellevue en Séné. Le soir venu vers cinq heures, elle repris le chemin de Vannes, accompagnée de sa tante qui s'embarqua avec elle sur le bateau du passeur de l'Angle à Conleau et la conduisit jusq'ua bois.
Des amies parmi lesquelles Mlle Marie Doridor, l'ayant aperçue l'attendirent pour faire route avec elle. Elle spartirnet donc ensemble. Toutes étannt en place, elles se hâtèrent pour rentrer chez leurs maître. En une demi-heure, elles firent le trajet, de 4 kilomètres. Pour s'entrainer, elles chantaient gaiement.
Désirée avait aperçu, au moment de quitter Conleau, son ex-fiancé Allanioux qui montait dans l'autocar pour venir à Vannes. Elle en fit la remarque à ses camarades. Arrivée à Vannes, Désirée quitta sa cousine qui l'accompagnait à la hauteur de lla Porte-Prison. C'est à ce moment que le drame s'est produit. Le meurtrier attendait sa victime. Des témoins ont entendu le bruit d'une discussion et, aussitôt après, les coups de revolver.
Un portrait de Désirée
La maîtresse de Désirée a déclaré que la jeune fille avait une conduite parfaite: "C'était une fleur d'une délicatesse rare. Education excellente. Certainement Allanioux n'était pas le mari qui lui convneait. Elle l'aurait cependant agréé, sans la scène qui se passa le jour des fiançailles".
D'autres personnes qui l'ont eue à leur service, ont fait l'éloge sans réserve de la malheureuse jeune fille.
Sa tante, Mme Thiphaigen avait comme un pressentiment de la fin tragique de sa nièce.
Le père de Désirée, qui était douanier et ses deux frères snt morts noyés accidentellement. Elle était la dernière de cete famillle si éprouvée. Sa famille est de splus honoables. Deux de ses cousins sont capitaines d'infanterie; ses oncles sont officiers des douanes.
Elevés ensemble
Joseph Allanioux et Désiré Rolland aaient été élevés ensemble à Bellevue où le père Allanioux avait sa ferme et où habitait la famille Thiphaigne. Allanioux père était le fermier de Mme Normand. Il était connu dans le pays sous le nom de "Le croquant".
Désirée, à la suite de la mort de ses parents et de sa grand -mère avait été accueillie par M. et Mme Thiphaigne, voisins d'Allanioux.
La préméditation
Tous semble indiquer la préméditation. Allanioux avait voulu acheter ces jours drniers un pistolet automatique chez Daniel, armurier à Vannes, qui avait refusé de lui en vendre un. Il a dû se procurer son arme dans une autre ville. Le meurtrier passait pour un exalté, un demi-fou.
L'INSTRUCTION
Lundi à 16h15, M. Le Meur, juge d'instruction, accompagné de M. Bourdon, commissaire de policve et de M. Penfournis, commis greffier, s'est trnasporté à l'hôpital mixte pour interroger Allanioux.
Le meurtrier de Désirée Rolland avait quitté son lit et les attendait dans son cabinet. Il parraissait abattu.
Les aveux
Allanioux a avoué s'être rendu dimanche à Séné où il savait que son ex-fiancée était allée voir sa tante. Il l'a suivit et quand elle reprit le chemin de vannes, il était arrivé rue de la Garenne, quelques minutes avant elle. Après avoir échangé quelques paroles et lui avoior reproché brièvement la rupture de leurs fiançailles, il tira sur elle trois coups de révolver et aussitôt après tourna son arme contre lui-même et tomba sur le sol à côté de sa victime.
Il a reconnu en outre qu'ayant perdu son revolver, il avait essayé d'en acheter un chez M. l'armurier Daniel qui refusa de lui en livrer.
Vendredi il avait retrouvé le revolver perdu. A la fin de l'interrogatoire, Allanioux a exprimé ses regrets.
Sur les lieux du drame.
Avant de se rendre à l'hôpital, le juge d'instruction se rendit rue de la Garenne sur les lieux mêmes où le drame s'était déroulé la veille; Il a interrogé divers témoins qui ont confirmé la brève discussion qui avait eu lieu entre Désiré et son meurtrier. Quand ils sont accourus au bruit des détonations, ils ont trouvé les corps du meurtrier et de sa victime étendus côtes à côte sans mouvement. Ils ont été aussitôt chercher après avoir transporté Désirée Rolland et Allanioux au débit Guillant, le docteur Franco, médecin légiste, qui a pratiqué lundi après-mdi l'autopsie de la victime et a constaté qu'une balle de revolver l'avait frappée au thorax, sans pénétrer; une seconde balle avait perforé le poumon droit et la troisièùe traversé le coeur. La mort a dû être instantanée. L'émotion est toujours très grande à Vannes.
Tout avait pourtant bien commencé car les jeunes fiancés depuis le 12 octobre devaient se marier comme l'indique cette coupure de presse.
On y apprend que Joseph ALLANIOUX est employé des chemins de fer du Nord et vit à Bellevue, qu'il doit se marier avec Désirée ROLLAND, jeune cuisinière, dont la famille vit à Bellevue à Séné. On sait qu'elle travaille chez Mme Le Nornand à Vannes et que ce dimanche 11 novembre elle a pris sa journée pour rendre visite a ses tuteurs M et Mme Tiphaigne. Ce sont les parents de Lucien Tiphaigne, soldat mort pour la France en aout 1914.
On retrouve bien le couple de fiancés sinagots dans les registres de l'état civil et au dénombrement de 1921.
Joseph ALLANIOUX (05/01/1899) est le fils de Marie françoise Jacob et d'Yves Louis Allanioux, cultivateur fermier sur les terres des Tiphaigne. Sa famille a été endeuillée pendant la Première Guerre Mondiale par deux fois.L'ainée des garçons, Honoré Patern Marie, est mort pour la France en héros au Mesnil les Hurlus en 1917. Son beau-frère, Armel Le Bourvelec, époux de sa soeur Honorine, atteint de tuberculose contractée en mer, est mort pour la France à Séné en mars 1920.
La fiche de matricule de Joseph Allanioux nous indique qu'il fut mobilisé en juin 1918 jusqu'en octobre 1919. Ensuite, il participa aux opérations en mer Noire avant d'être démobilisé en mai 1921. C'est de retour au pays que le jeune Allanioux fréquente sa jeune voisine, qui deviendra sa fiancée avant de devenir sa victime, tuée par 3 des balles de revolver.
Quant à Désirée ROLLAND (26/06/1907) c'est la fille d'un matelot des douanes, Louis Marie Rolland et de Anne Marie Amélie Tiphaigne. Cette famille Tiphaigne-Rolland a également été endeuillée en perdant deux jeunes gars à la guerre, Lucien Tiphaigne à Doncourt en 1914 et Louis Pierre Marie, marin, disparu lors du torpillage du Saint-Georges, navire charbonnier coulé par un U-Bolt allemand en juillet 1918.
La généalogie suivante montre leurs liens de parenté.
Les deux fiancés étaient voisins au quartier de Bellevue sur la presqu'île. Joseph à 25 ans et Désirée seulement 17 ans. Ils se connaissaient depuis l'enfance.
Le dénombrement de 1926 nous indique que la mère, Marie Françoise née Jacob, vit encore à Bellevue avec sa fille Eugénie et un petit-fils Armel Pierre. Au mois de novembre, Joseph ALLANIOUX vient de démissionner de la Compagnie de Chemin de Fer et revient à Séné sans doute chez sa mère.
Le dimanche 11 novembre 1924, Désirée rentre sur Vannes en preneur le passeur à Barrarach et ensuite gagne le centre ville de Vannes à pied. Joseph Allanioux, qui on l'apprendra vient de démissionner des chemins de fer, est arrivé à Séné. Cette fin de dimanche, il prend l'autocar de Langle jusqu'à Vannes. Il retrouve sa "Désirée" à hauteur de la porte prison le long des remparts, rue de la Garenne. Il la tue de trois coups de revolver avant de retourner l'arme contre lui. Il n'est que blessé et après sa sortie de l'hôpital mixte de Vannes il sera interrogé par la police.
Allanioux n'a pas supporté que la jeune fille change d'opinion suite à son comportement à son égard. Le jeune fiancé éconduit a préféré tuer sa promise que de la perdre !
Désirée ROLLAND sera inhumée à Séné.
L'article de presse présenté résume très bien les faits mais ne donne pas le dénoument du procès ou Joseph ALLANIOUX est défendu par Maître MARCHAIS, avocat et député de Vannes.
La consultations des comptes rendus judiciaires aux Archives du Morbihan nous indique que Allanioux Joseph échappe à l'échaffaud et est condamné le 11 juin 1925 par les Assises du Morbihan à 10 ans de travaux forcés.
Mention reprise dans sa fiche de matricule.
Il est conduit à la prison de Vannes mais on ne sait si il y a purgé toute sa peine...
A sa sortie de prison il finit par entrer dans le corps des douanes. Il décède à Vannes le 11 juin 1956.