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samedi, 21 octobre 2023 16:31

Sages femmes au temps de Pierre Le Nevé

La naissance d'un enfant n'a pas toujours eu lieu au sein d'une maternité et sous l'encadrement de chirurgiens obstétriciens et de sages-femmes. Qui s'est intéressé à la généalogie de sa famille a certainement découvert parmi ses aiêux, des enfants morts en bas âge ou décédés lors de l'accouchement. Parfois la mère décédait également des suites d'un accouchement difficile.

Si la vie de nos villages était rythmé par les baptêmes, les mariages ou les fêtes religieuses. Les enterrements et les enterrements d'enfants morts en bas âge ou le jour de leur naissance, rappelaient aux Sinagots leur dure condition humaine. La vie continuait et on oubliait vite la courte existante d'un enfant ...

A Séné comme dans tous nos villages, l'accouchement d'une femme enceinte était un évènement difficile et dangereux pour la mère et l'enfant à naître. Dans nos villages, des femmes accompagnaient les futures mères à cette épreuve: donner la vie. Ventrières, matrones, accoucheuses, leur désignation évolua vers le nom de sage-femme et depuis que cette profession s'est ouverte aux hommes, maïeuticien. Cet article tente de retracer l'histoire des ces femmes sinagotes dont la tâche était d'aider d'autres femmes enceintes à donner la vie à leur enfant.

Où rechercher des informations sur les sages-femmes en exercice à Séné?

Ondoiement BIUSanté

Ondoyement fait à l'enfant aussitost sa naissance quand on le trouve en danger de mort, gravure du XVIIIe siècle. 
A droite, une femme verse de l'eau sur la tête de l'enfant à l'aide d'une aiguière.

La consultation des actes des registres des décès antérieurs à la Révolution Française est à ce titre riche d'enseignements. En effet, aux premières loges lors d'un accouchement, elle procédaient à un ondoiment ou un rapide baptême de l'enfant né quand sa vie semblait chancelante. Pour peu que l'homme d'église en charge de rédiger l'acte de décès de l'enfant ait bien écrit et renseigné l'acte, on peut trouver des informations intéressantes. Tel est le cas sur la période du magistère du recteur Pierre Le Nevé

1723 LE FUR anonyme par Perrine LE CERF

Ainsi sur cet acte de décès peut-on lire: Ce jour treizième de juin mil sept cens vingt et trois a été enterré dans le cimetière de Séné, le corps d'une petite fille née le matin du jour du légitime mariage de Vincent Le Fur et de Guillemette Nicolas du village de Langle et décédée aussitôt après avoir été baptisée à la maison par une femme nommée Perrine Le Cerf qui a assisté reconnais avec Vincent Le Fur son père et Allain Nicolas qui ne signent. Pierre Le Névé, recteur de Séné

On pressent que la fillette est peut-être morte-née ou bien les témoins jugeront qu'elle cria afin que l'être vivant fut baptisé avant sa mort. Il était important dans le rite chrétien que le baptême fut donné du vivant du nouveau né. Dans le cas contraire, son âme n'accédait pas au Paradis mais errait dans les Limbes. Cet acte montre que le Recteur de Séné, acceptait que le baptême fut donné par un laïc en cas de force majeure.

1725 Benois anonyme Recteur Le Neve

Dans cet acte de 1725, le recteur en personne fut convié à l'accouchement, pour lequel on avait de mauvais pressentiments, et il put lui-même baptiser l'enfant né avant son décès: "Ce jour neuvième de mars mil sept cens ving cinq a été enterré dans le cimetière de Séné le corps d'une fille née la nuit dernière du légitime mariage de Guillaume Benoit et Anne Marin au village de Kerdavy décédée après avoir été baptisée par nous, soussigné recteur; on assisté au convois Michel Marin, femme Perrine Yvonne Marin et Vincent Laudrin qui ne savent signer. P. Le Névé recteur de Séné."

1725 Benoit anonyme sage femme ANIET Nicole

Cet autre acte de 1725 nous apporte un élément intéressant: Le second jour de décembre mil sept cens vingt cinq a été enterré dans le cimetière de Séné, le corps d'une fille née hier au soir du légitime mariage de Joseph Benoit et Marie Le Doriol du village de Monsarac et décédée aussitôt après avoir été baptisée à la maison par une sage femme nommée Nicole Daniel. ont assité au convois Jospeh Benoit son père, Pierre Danet et Jean Benoit qui ne savent signer. P. Le Névé Recteur de Séné

1732 Benoit anonyme sage femme

Sur cet autre acte de décès d'un enfant du village de Monsarac daté de 1732, on lit que la sage-femme était de Vannes, laissant entendre que les habitants de Séné pouvaient bénéficier de compétences existant dans la ville du diocèse. D'autres actes mentionnent plusieurs fois la sage-femme, Olive Le Didrouc. 

1748 LE DIDROUC Olive

Cet acte de décès nous renseigne sur Olive Le Didrouc décédé en 1748, sage-femme qui officiait à Séné du temps du recteur Pierre Le Névé. Un site de généalogie nous en apprend un peu plus sur la vie de la sage-femme sinagote, deux fois mariée et mère d'au moins 7 enfants. 1748 LE DIDROUC Olive sage femme

Dans ces actes de décès d'enfant, rapidement baptisés, le recteur Le Névé prend soin de préciser si le baptême fut donné par une "femme" ou une "sage-femme", indiquant ainsi que la sage-femme pouvait ne pas avoir le temps d'accourrir à tous les accouchements.

Sur d'autres actes, on lit le nom de la sage-femme: Marie Lefranc (acte décès Le Floch du 5/12/1739), Vincente Rolland (acte décès Uzel, 3/3/1740), Françoise Le Du (acte décès Pierre du 22/02/1743). Tevene Loiseau (acte décès Uzel le 11/10/1748); Perrine Mollé [26/8/1695 Batz sur Mer-9/2/1767 Séné] (acte décès Le Duc 17/2/1752 , acte de baptême de Jean Landay 17/11/1757, acte de décès Trebossen le 2/12/1758); Perrine Lefranc (acte décès Noblan 28/12/1757); Jeanne Lepiniec (acte baptême Le Baro 26/3/1758); Marie Pierre (acte décès Lehellec 12/4/1769, acte décès Monfort 29/3/1770); Mme Jouannic (acte décès Laurent 9/11/1773)

1742 LE PICHON chirurgien

L'acte de décès de l'enfant Le Pichon indique que le "sieur Guilloux, maître chirurgien à Vannes" baptisa l'enfant avant son décès. Pierre Patern GUILLOUX était maître chirurgien et juré au Rapport de Vannes. Il baptisera également l'enfant mort-né de la famille Roux le 9/3/1764 et le petit Laudrein le 9/12/1775.

On arrive également à idientifier Nicole LE LOUEDEC de Moustérian [5/11/1686-10/5/1756] qui sera également sage-femme à Séné.1756 LE LOUEDEC sage femme

 1756 BENOIST anonyme Perrine Le Franc

 Cet acte de décès de 1756 ne parle plus de baptême mais d'ondoiment: Le dixhuitième jour de juin l'an de grâce mil sept cens cinquante six a été inhumé dans le cimetière de Séné, le corps d'un enfant mâle ondoyé à la maison en cas de nécessité par Perrine Lefranc qui a déclaré ne savoir signer, décédé cette nuit chez Julien Benoist de Monsarrac pescheur charpentier & Vincente Rozo son épouse légitime. Celui-là a assisté à l'enterrement avec Pierre Lefranc, Mathurin Noblan & Julien Rolland qui ont déclaré ne savoir signer. Guillaume Le Jallay Recteur de Séné.

1761 LOIZEAU Catherien Sage femme

Cet acte de baptême nous rappelle que la naissance de jumeaux était toujours à craindre. Ainsi le 1/02/1761, la sage-femme Catherine LOISEAU s'empresse de baptiser "en cas de nécessité" à leur naissance François et Renée NOUMAN de Cressignan.


1778 Leroux anonyme chirurgien

Sur cet acte dé décès de 1778, on notre que le maître chirurgien Parseitte a remplacé Pierre Patern GUILLOUX.

Mais comment expliquer une si abondante mention de nom de sage-femmes?

Il faut d'abord rendre grâce au Recteur Le NEVE, qui n'oublie aucun décès de chrétiens à Séné, même quand il s'agit d'une enfant  mort-né. Mais la principale raison réside dans les mauvaises conditions dans lesquelles avait lieu les accouchements. Les sage-femmes étaient désignées par l'ensemble des femmes et le curé de la paroisse en raison de leur moralité et de leur foi chrétienne. Elles ne disposaient d'autres formations que celles issues d'observations et des conseils d'anciennes accoucheuses. A cette époque, seuls 25% des nouveau-nés avaient une chance d'arriver à l'âge adulte.

Le siècle de Pierre LE NEVE terrible pour les enfants à naître, va prendre fin avec la Révolution. Les successeurs JALLAY et COLENO n'auront pas la même attention à inscrire toutes leurs oiailles sur les registres de décès surtout quand elle vécurent qu'un bref instant. Par la suite, l'Etat Civil sera géré par la commune et l'aspect religieux, le fait de savoir si une sage-femme avait ondoyé ou baptisé un enfant mort-né n'est plus important. Leur nom n'est plus mentionné. D'ailleurs à Séné, les actes de décès de la Révolution à l'Empire ne comportent que très peu d'actes d'enfants morts "anonymes". La période est trouble et on s'apitoie peu.

Cependant, un texte législatif sera voté en 1803 et un décret publié en 1810 pour que la profession de sage-femme soit définie et impose une formation théorique et clinique assortie d'un diplôme.

C'est avec le début de la presse à partir de 1848, et les journaux parvenus jusqu'à nous, numérisées par les Archives du Morbihan, qu'on peut trouver de nouvelles sources évoquant l'activité des sage-femmes.

 

 

 

 

 

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