Il y en a des marins de Séné disparus en mer ou morts pour la France, à toutes les époques. Les familles de pêcheurs de Séné, les fils de maîtres de cabotage établis à Séné, étaient des recrues prédestinées à servir dans la "Royale" avant de rentrer au pays.
Il a est ainsi de Vincent Marie NOBLANC [17/12/1842-5/12/1863]. Son acte de décès est plus long que les autres dans le registre des décès de l'année 1864. On s'y attarde, on a envie d'en savoir plus sur les circonstances de sa mort.
On apprend à la lecture de l'acte de décès, que Vincent Marie NOBLANC est décédé dans le naufrage de la chaloupe de la frégate La Couronne à Cherbourg le 5 décembre 1863. L'administration de Napoléon III fonctionne bien. L'acte a été transcrit le 14 janvier 1864 à Séné. Que s'est-il passé ce jour là à Cherbourg ?
Vincent Marie NOBLANC était né à Moustérian le 17 décembre 1842 dans une famille de pêcheurs. En 1855, à l'âge de 13 ans, il commence le métier de pêcheur comme nous l'indique sa fiche d'incrit maritime. En 1863 il passe sous les drapeaux d'abord à Lorient puis sur Brest et Cherbourg. Il embarque quelque temps sur le Saône puis il est affecté le 18/09/1863 sur la frégrate La Couronne, vaisseau école des canonniers et timoniers.
La Couronne est le premier Trois Mâts dont la coque est cuirassé de fer. Il fonctionne à la voile et à la vapeur, une chaudière à charbon alimentant un moteur.
Dimensions 80.85 x 16.70 x 7.80 x 9.70 (C) m
Déplacement 6.428 T
Vitesse12.77 n
Effectif 570 h - en école de canonnage : 1.200 h
Propulsion :
Vapeur : machine horizontale à bielles renversées Mazeline (2 cylindres : d = 2,08 m ; c = 1,27) - chaudière Indret 8 corps 32 foyers950 chn, 2900 chi - 1 hélice à 6 ailes de 5.80 mcharbon : 650/1000 t
Voilure : 1621 m² (3 mâts carré)
La poursuite des recherches sur la presse numérisée par les Archives du Morbihan permet de retrouver un article de presse d'époque qui éclaire sur les circonstances du naufrage. Le nom de Vincent Marie NOBLANC apparait bien dans la liste des marins noyés et inhumés à Cherbourg.
Journal de Vannes du 12 décembre 1863 : "Un évènement affreux vient d'attrister la ville de Cherbourg. Le mercredi 2 décembre, à trois heures du matin, l'Argus, navire du commerce de Granville, s'échoua à l apointe N.O. de l'île Pelée. Le temps était horrible. En entendant les cris de désespoir de l'équipage, le commandant de la frégate cuirassée la Couronne, mouillée dans le nord de l arade, fit mettre à la mer le grand canot du bord monté de dix-huit hommes et commandé par M. Fernand de Besplas, lieutenant de vaisseau. No sbraves marins se portèrent avec un dévouement admirable au secours de l'Argus, et, après des efforts inouïs, parvinrent à le relever.
Pendant qu'ils en opéraient le sauvetage, le drirecteur des mouvements du port envoya sur les lieux le petit vapeur de rade la Navette, qui donna la remaoruqe à l'Argus et au canot de la Couronne. Il était huit heures du matin, lorsqu'un coup de vent furieux et instantané se déclara, cassa les remorques et rejeta au large le navire de commerce et le canot de La Couronne. La mer était terrible, acune force humaine ne pouvait lutter contre elle. Le canot, emporté par le vent et par le courant près du Cap Levi, se brisa sur les rochers de Fermanville; M. le lieutenant de vaisseu de Besplas, qui commandait, et les marins qui le montaient ont péri, à lexception de trois d'entre eux qui avaient été mis à bord de l'Argus. L'équipage de ce navire a été sauvé; M. Deslandes, son capitaine a seuil péri.
En apprenant cet événement, S. Exc. le ministre de la marine a envoyé l'un de ses aides de camp, M. Dumas, auprès de M. de Besplas, père du jeune officier, qui habite les environs de Mantes, pou rlui exprimer toute la part qu'il prend à sopn malheur. M. le contre-amiral de La Roncière le Noury, chef d'état-major du ministre, est parti hier au soir pour Cherbourg.
Cet événement affreux a produit la plus profonde impression, et la ville entière doit assister aux obsèques de l'officeir et des marins victimes de leur courage et de leur dévouement. M.le lieutenent de vaisseua de Besplas était un officier d'un grand mérite et d'un coeur excellent. Sa mort excitera, dans la marine, les regrets le splus vifs et le splus profonds -- A. Renauld."
On apprend que le 2 décembre 1863, le navire de commerce, L'Argus, s'est échoué sur l'ïle Pelée, en baie de Cherbourg à cause du temps exécrable qui régnait sur la Manche. Afin de sauver son équipage, le commandant du navire de la marine impériale, La Couronne, qui se trouve au mouillage en baie de Cherbourg, donne l'ordre à une chaloupe de porter secours.
18 marins courageux prennent la mer avec une chaloupe qui parvient à hauteur de L'Argus. La Navette, un vapeur du port de Cherbourg, (la SNSM de l'époque), se porte également à sa hauteur. Le vapeur met à la remorque la chaloupe et L'Argus. On comprend que l'équipage de L'Argus, à l'exception du capitaine Deslandes, monte sur le vapeur ainsi que 3 des marins de la chaloupe. Le sauvetage semble réussi, quand la tempête fait céder les remorques et la chaloupe comme L'Argus sont rejetés au large. Entre temps, le capitaine Deslandes est monté sur la chaloupe avec 15 autres marins. Ils luttent contre une mer en furie, dérivent et leur chaloupe finit par se briser sur les rochers du cap Levi.
Les archives du département de La Manche ont retrouvé dans le fonds du Tribunal de Commerce et maritime de Cherbourg, un rapport du nommé Lubert, second du sloop "L' Argus".
La lecture de cet acte nous apprend que 'L'Argus était parti du Havre à destination de Granville avec diverses marchandises dans sa cale. Le 1er décembre, il atteint Barfleur puis dans la nuit, il tente de gagner le port de Cherbourg. Vers 11 H du soir, un épais brouillard l'empêche de voir les feux et à 1 H du matin, il s'échoue sur l'île Pelée où il reste accroché jusqu'à 9 heures du matin (2 décembre).
Les secours viendront; l'équipage sera sauvé; le capitaine de L'Argus a participé au sauvetage de son équipage et est monté sur la chaloupe, liant son sort à celui de la chaloupe dans la tempete...
15 des marins dépêchés par La Couronne perdront leur vie au large du cap Levi, dans la chaloupe qui portait secours à L'Argus. Parmi ces marins, Vincent Marie NOBLANC, marin de Séné âgé de 21 ans. Comme l'indique son acte de décès à Cherbourg, son corps ne sera retrouvé que le 5 décembre, date officielle de son décès.
Le Petit Journal 9 décembre 1863 : Nous avons annoncé avant-hier, d'après une dpêche particulière de Cherbourg, que les obsèques des courageux naufragés de la Couronne avaient eu lieu samedi avec une grande solennité. Les journaux de Cherbourg nous apportent des détails sur cette triste cérémonie.
Les corps avaient été déposés dans une des alles de l'hôpital de la Marine transformée en chapelle ardente. Le cortège parti de l'hôpital à onze heures et demie, est arrvié à midi à l'église de la Sainte-Trinité. Il se composait des clairons de l'infanterie de marine, d'un peloton de gendarmerie maritime; d'une section d'artillerie maritime, d'une compagnie des équipages de la flotte, d'un demi-bataillon d'infanterie de marine avec le drapeau etla musique du régiment; de M. de Barmon, capitaine de frégate, second de la Couronne, et M. Boucher-Rivière, aide-major général; du clergé de toutes les paroisses de la ville.
Puis venaient les dix-huit cercueils, recouverts du pavillon tricolore et portés par des marins de la flotte et parmi eux le cercueil du lieutenant de vaisseau de Besplat, sur lequel étaient déposés les insignes de son grade et se décorations;
Un clergé de deuil, composé des aumôniers de la flotte et de la marine; M. le capitaine de vaisseau Penhoat, commandant la Couroone, et son état-major; M. l'amiral Roze, majoir général, préfet maritime par interim; M. Bordez, sous-préfet; M. Asserlin, président du tribunal; M. Ludé; maire, précédant un immense cortège d'officiers appartenant aux différents corps de la marine; l'état-major du navire confédéré le Georgia; M. Théologue, colonel du 18° de ligne, et tous les offciers de son régiument, etc..
Des détachements d'artillerie et d'infanterie de marine et des équipages de la flotte, sans armes. La marche était terminée par un demi-bataillon d'infanterie de marine. des troupes de toutes armes formaeinr la haie, et sur tout le parcours du cortège se pressait une foule silencieuse, tête nue, les larmes aux yeux. Depuis huit heures du matin, la frégate cuirassée la Couronne tirait un coup de canon de demi-heure en demi-heure. Tous les navires de l'Etat et les bâtiments de commerce, en rade et dans le port, avaient leur pavillon en berne et leurs vergues en pantenne.
Après le service funèbre, le cortège s'est remis en marche dans l'ordre qeu nous venons d'indiquer jusqu'au cimetière. La population en rangs serrés témoignait de sa douleur par son attitude consternée. Au moment où les cercueils ont été déposés dans la terre, M. le contre-amiral Roze, majour général de la marine, qui remplissait les fonctions de prefet maritime par interim, a prononcé le dicsours suivant:"
Deux autres discours ont été prononcés; l'un par M. Barlez, sous-préfet, l'autre par M. le capitaine de vaisseau Penhoat. Après les dernirs honneurs militaires rendus aux victimes inhumées côte à côte, la foule vivement impressionnée s'est retirée silencieusement.
Voici, d'après la Vigie de Cherbourg, les noms des victimes du naufrage de l'embarcation de la frégate la Couronne, dont les cadavres ont été retourvés et inhumés le samedi 5 décembre.|[figure Noblanc Vincent Marie]. Il rste encore à retrouver les corps de treize marins, dont voici les noms. [ ]. Deux matelors seuls ont échappé au désastre, le snommés Olivier et Rebillard, qui après avoir trouvé les meilleurs soins chez les habitant du hameau de Percy, où ils avaient été d'abord recueillis, ont pu être transportés à Cherbourg. Ces matelots sont maintenant hors de danger. La population de Cherbourg, vivmeent émue du triste spectacle de ces obsèques, a spontanément ouvert une souscription pour venir en aid eaux familles des malheureuses victimes du devoir accompli.