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lundi, 24 avril 2017 19:19

Séné et ses moulins

Pendant de nombreuses années les Sinagots étaient pour beaucoup des paysans qui élevaient des animaux et cultivaient les champs. La production de céréales était nécessaire pour alimenter les bêtes et produire de la farine.  Il fallait moudre ces céréales pour produire des aliments pour le bétail et des farines alimentaires comme la farine de blé, la farine de seigle ou de sarrasin (blé noir).

Pour moudre le grain il faut un moulin, une meule et une force motrice pour l'actionner. L'histoire montre que l'activité meunière s'est souvent développé le long des cours d'eau pour tirer avantage de la force du courant régulier.

Cet extrait du cadastre de 1844 montre qu'il existait le moulin du Prat sans doute situé sur la rivé gauche du Liziec à Vannes. Près de la chapelle de Saint Léonard à Theix, existait un autre moulin à vent sur la butte.

1844 moulin du Prat et St Léonard

En France, les moulins sont le troisième patrimoine bati après les églises/chapelles et les châteaux.Notre commune atteste de la présence de 2 moulins à vent à Cadouarn et Cano dont aucune trace ne subsiste et de 2 moulins à marée, le moulin de Bilherbon aujourd'hui disparu et celui de Cantizac.

Et peut-être un moulin bateau à Barrarach ?

Un internaute m'a fait remarqué que la carte de Cassini positionne le symbole d'un moulin en bas de la butte de Barrarach.

Cassini Séné Barrach

Sous l'ancien régime, il était fréquent que des meuniers installent un ponton ou une barque sur la rive d'une rivière pour tirer avantage de la force motrice du courant. Au goulet de Conleau, aux heures des marées, le Golfe du Morbihan développe un courant suffisamment puissant pour qu'un meunier ait installé une machine pour moudre le grain. Il faudrait trouver trace du-dit meunier dans les actes d'état civil d'avant la Réolution pour confirmer cette hypothèse.

moulin bateaux fleuve

Le meunier banal jusqu'à la Révolution

Les seigneurs exercent un véritable monopole en instaurant l'obligation d'utiliser le moulin banal pour toutes les personnes qui habitent dans l'aire du moulin. Fixée approximativement à une lieue.
Les paysans ont recours au moulin banal moyennant un prélèvement sur le grain appelé "émolument". Le meunier, lui, touche à titre de salaire, une rétribution en nature, "la mouture". Il travaille la plupart du temps avec un apprenti et quelquefois avec un chasse-pochée, qui va chercher le grain dans les fermes et livrer la mouture.

A partir du XIVè siècle, pour éviter au meunier de prendre trop d'importance dans la filière du pain, la profession de boulanger lui est interdite. Dès le XVIIè siècle, pour se diversifier, le meunier essaie d'assurer le transport de la marchandise de sa clientèle boulangère et de faire le commerce des grains et de la farine.

La prolifération des moulins en 1789

Au fil des siècles, le droit de moulin est de plus en plus remis en question. Le moulin du seigneur ne suffit pas toujours à la demande, les temps d'attente sont trop longs, et faute de concurrence, la qualité de la mouture s'en ressent.
Les révoltes des Moulinets se multiplient.
La Révolution met fin aux banalités en mars 1790, ce qui entraîne la multiplication des moulins qui deviennent alors des entreprises privées. Posséder un moulin est alors un signe d'indépendance, de richesse, et de symbole de prospérité.

Les grands changements dans la profession

Ces changements interviennent sous le Second Empire, vers le milieu du XIX ème siècle.
La meunerie traditionnelle laisse la place à la minoterie moderne avec l'arrivée des manufactures, et l'introduction des évolutions techniques. La machine à vapeur libère les usines des contraintes des énergies naturelles et les meules sont remplacées par des cribles cylindriques en "bluteau" , ce qui permet un meilleur nettoyage des grains.
Les moulins à vent et les petits moulins à eau sont les premiers à disparaître par milliers vers 1860.

Sans titre411

Le moulin de Cadouarn...

Une vielle carte de Séné datant de la fin du XVIII siècle mentionne déjà le moulin de Cadouarn que l'on retrouve également sur plusieurs cartes le long du XIX°s.

Un acte notairé daté du 30 juin 1705, [AD56 6 E 768] indique que Guillaume CLERC, sieur de Coffornic en Sarzeau  éxécute en tant que tuteur de leurs enfants, des travaux au moulin de Kerdavy dont dépendait le moulin de Cadouarn. Les propriétaires de moulin de Cadouarn-Kerdavy étaient Robert LOYER et son épouse Nicole de la ROCHE décédé à Rennes le 10/2/1695, ville où ses enfants Renée Jeanne (30/1/1684), Pierre Mathieu (22/9/693) et Louis Eugène (21/12/1694) étaient nés. On pense que leur mère décède des suites de dernier accouchement...

Cette liste de travaux nous en dit plus sur les pièces qui composaient alors le mécanisme d'un moulin à vent.

"Le trentième jour de juin 1705 avant midi, par devant nous notaires royaux héréditaires gardenottes à Vannes avec soumission et prorogations de juridiction, ont comparu en personne noble homme Guillaume Le Clerc sir de Coffornic, (proucreur du Roi, avicat de la juridiction de Rhuis) avocat à la cour, tuteur des enfants mineurs de défunt noble homme Robert LOYER et de demoiselle Nicole de la Roche, demeurant dans sa masion de Cofournic ile de Rhuys, paroisse de Sarzeau et Yves Bobes charpentier amoulageur demeurant en cette ville de Vannes rue Saint-yves, paroisse de saint-Patern, d'autre-part entre lesquels s'est fait les réparations requises et nécessaires au moulin à vent de Kerdavy, situé en la paroisse de Séné, (appartenant aux dits mineurs) savoir changer le marbre du moulin et en mettre un neuf, deux branches et refaire le rouet (partie endentéee sur le pivot, en bois de pommier, entrainant les duex meules) le tout à neuf, mettre un maître guivre (queue en bois à l'arrière du moulin pour faire pivoter la tourelle). Mettre les averrons (vergues placées dans le smortaises des 2 bras des ailes) en la place de ceux qui sont cassés, réparer la couverture dudit moulin et y mettre une douzaine et demie de chevrons neufs, quatre milliers dessus de clous et lattes nécéssires, changer le dormant en place, étant remués d'environ 3 à 3 pouces, et racommoder le grand fer cassé d'environ un pouce, et rallonger d'environ trois pouces étant trop court. Mettre à neuf le palier d'ahaut qui conduit le grnad fer d'environ 8 à 9 pieds de long, mettre à neuf toutes les voiles dudit moulin, et oblige ledit Bobes à travailler incessamement et le rendre le tout en bon état (à partir) de ce jour en six semaines. Les dites réparations, ledit siuer de Coffornic en qualité de tuteur seulement convient avec ledit Bobes à la somme de 180 livres."

1774 Cadouarn ROGER meunier

Cet acte de naissance du 15/07/1774 nous indique que Guillaume ROGER [4/1/1745 Sarzeau - 12/6/18787 Kergantec-Ile aux Moines]  est meunier à Cadouarn. Il s'est marié le 4/2/1766 avec Michèle CLEQUER [4/8/1746 Séné - 26/9/1823 Baden]. Lors de la naissance de leur premier enfant, Marie Josèphe [1768-1770], il est meunier à Cadouarn. Il est encore quand nait son fils Jean en 1770, dont la marraine n'est autre que Jeanne MAGRE, femme du meunier de Cantizac. La famille ne reste pas longtemps à Cadaourn dont le rapport ne doit pas être élevé; leur enfant Marc nait à Ile aux Moine en 1786. Le moulin change alors de meunier [à identifier].

1771 1785 Moulin Canivarch

Cadouarn moulin cadastre    

cadouarn moulin napoleon 13   

Cadouarn moulin 1844

Une vieille coupure de presse permet d'attester son activité en 1851. Le récit de ce malheureux accident survenu en juin de 1851 quand le jeune Terrien âgé de 10 ans heurta les ailes du moulin.. 

1851 06 26 Séné Moulin Ranquin deces enfant

Toutefois, si le dénombrement de 1841 indique le meunier présent à Cano, les dénombrement de 1886 et 1891 ne mentionnent pas un meunier à Cadouarn. 

On retrouve pourtant au dénombrement de 1901 la famille Le Garec installée à Cadouarn et déclarant la profession de meunier. Claude Marie LE GAREC [23/10/1865 Sarzeau - 30/09/1949 Séné], dont le père était meunier à Sarzeau, s'est marié à l'ïle d'Arz le 6/11/1890 avec Pélagie Marie DALIDEC. Il déclare alors la profession de meunier.

1901 Cadouarn Meunier Le Garec

Le lieu de naissance de ses enfants permet de dater sa venue à Cadouarn. Joseph Louis nait le 4/04/1897 à Séné et un témoin à sa naissance n'est autre que Jean Marie Gachet minotier à Cantizac ! preuve d'une bonne entente entre confrères meuniers.

1873 Le Garec Joseph Louis Gachet

NB : Un des enfants du meunier GAREC sera mobilisé pendant la Première Guerre Mondiale et décèdera des suites d'une maladie pulmonaire. Son nom figure au monument au morts de Séné. Jean Marie Joseph GAREC [11/06/1895-18/10/1917].

Au dénombrement de 1906 la famille est recomposée. Veuf le 8/08/1902, Claude LE GAREC épouse le 18/06/1905, Joséphine Marie CADERO, fille de pêcheur à Cadouarn et lavandière.

1906 Cadouarn Meunier Garec

L'abbé Gachet Louis, fils de Jean Marie Gachet a livré au recteur de Séné ses souvenirs d'enfance dans le bulletin paroissial de 1975. Voir document pdf ci-joint.

"Les familles cultivaient du blé qui après moisson et battage était apporté au moulin pour en faire de la farine. Chacune reprenait sa farine qui était ensuite apportée au boulanger. La paille servait pour faire des matelas ou des couchettes sur les bateaux."

1907 09 18 Vente moulin Cadouarn

Que c'est-il passé ? Le moulin à vent de Cadouarn est-il toujours compétitif face à la nouvelle minoterie de Gachet ? Le moulin est mis en vente en octobre 1907. Il sera démolli en 1920 pour laisser aujourd'hui place plus tard à un transformateur EDF. La rue du Moulin près du Ranquin témoigne de son existence.

 Croquis Cadouarn moulin   

L'abbé Le Roch, dans le bulletin paroissial Le Sinagot, se risque à un croquis pour illustrer à quoi ressemblait le moulin à vent de Cadouarn. Etait-il construit de pierre comme ce moulin qui existait à Saint-Armel.

Moulin de Saint Armel usine ludré

Le moulin de Cano...

L'autre moulin à vent en Séné était situé sur une butte à Cano comme nous l'indique ces extraits de vieilles cartes. Aujourd'hui, dans le quartier de Kercourse les rues Er meliner et le clos Melin rapellent son existence.

1771 1785 Moulin Cano

canneau napoleon 3

    canneau moulin 1844

Carte d'Etat major 1820-1866 :

Cano moulin 1820 1866

Sur l'Etat Nominatif des Habitant de 1841, on retrouve la trace de la famille Gicquello installée à Cano. Louis GICQUELLO a épousé le 28/9/1830 Vincente JACQUES à Séné, attestant son installation à Cano à cette époque. En 1841, il est désormais veuf et s'active avec son fils Yves et ses deux filles.

1841 Cano Meunier Gicquello family

Le moulin a marée de Bilherbon...

La force des courants des marées a été utilisé sur 2 sites de la commune : le moulin de Cantizac et le moulin de Bilherbon. 

Il existait un étang à Auzon et comme le montre la carte de Cassini, une petite roue faisait actionner un moulin. Le cadastre napoléonien de 1810 montre que l'étang existe encore sans mentionner de moulin. 

 CassiniAuzon 

Etang Auzon Bilherbon 

 Le moulin est encore attesté dans la carte marine (Shom) de 1887 et disparait lors de l'assèchement de l'anse de Mancel. 

Bilherbon anse 1887

   Bilherbon cadastre 1844 5

Le site accueillera un casernement de douanier à situer sur l'île de Mancel au plus près des salines.

Avec la destruction de la digue en 1937, l'eau de mer reviendra toucher le bord de la digue de Bliherbon. Aujourd'hui le site est une propriété privée où des chevaux trottent près du ruisseau d'Auzon.

Bilherbon actuel 2  

 L'activité minotière a plus durée sur le site de Cantizac à l'entrée du bourg de Séné. (Lire article sur le sujet).