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mercredi, 19 juin 2019 20:39

Le temps des premiers instituteurs (1)

L’histoire des écoles de Séné est indissociable des différentes lois sur l’enseignement qui nous serviront de fil directeur. La principale source sera la série T des archives départementales, complétée par les dénombrements de la population de Séné de 1841 à 1962. Les vieilles cartes postales, les vieux cadastres, des articles de presse ancienne et la mémoire de nos anciens complèteront les sources de cet article. Le livret sur l'histoire de l'école Sainte-Anne et le livre de Yannick_ROME ont été également des sources précieuses. Le service des archives des Filles du Saint-Esprit (FSE) à Saint-Brieuc et celui des Frères de Ploërmel ont été également consultés.

L'histoire des écoles à Séné est présentée en 4 volets :

Le temps des premiers instituteurs : 1800-1888

La guerre scolaire à Séné : 1888-1914

Les écoles de Séné dans l'entre-deux guerres : 1918-1939

Les écoles de Séné depuis la Libération : 1945 à aujourd'hui.


Pour une meilleure compréhension, le lecteur est invité à lire préalablement les articles sur la salle des fêtes et la mairie.


La première loi sur l’enseignement voit le jour pendant la période révolutionnaire.
La loi Dauniou adoptée par la Convention le 3 brumaire de l’An IV (25/10/1795) institut une école par canton avec une section de garçon et une section de fille. La rétribution scolaire des familles permet de payer les instituteurs, l’école est payante. Cette même loi est à l’origine des premières Grandes Ecoles dont l’Ecole Polytechnique.

Les familles privilégiées de Séné doivent amener leurs enfants dans les écoles de Vannes. On peut penser à des enfants de maître de cabotage, de chatelains ou de riches propriétaires fonciers.

L'installation des premières écoles :

1825 Morbihan ecoles

En 1825, lors du recencement des écoles du département de Morbihan, Séné ne dispose pas d'école. Le Morbihan compte alors 427.000 hab pour plus de 250 communes. Cette liste d'écoles, au total de 24, représente un ensemble de 96.788 hab soit environ 23% de la ppopulation. 1 enfant sur 4 a accès à une école en 1825, sous le règne de Charles X.

1828 Sene Enquete Ecole 1

En 1828, l'administration établit le recensement des écoles dans les communes du Morbihan. L'adjoint du maire, Coléno, inscrit sur la fiche qu'il n'y a pas d'école à Séné mais que 7 élèves sont scolarisés dont 5 au Collège Royal de Vannes.

La loi Guizot du 28 juin 1833, nous sommes sous la Monarchie de Juillet, établit une instruction pour les garçons (étendue aux filles par la loi du 23/6/1836). L’école n’est ni gratuite, ni obligatoire et s’organise sur deux niveaux de compétences. Les communes de plus de 300 habitants doivent se doter d’une école primaire (pour garçons) et d’un instituteur, qu’elle soit publique ou bien privée (confessionnelle). Les parents d'élèves doivent payer une retribution aux instituteurs.

1835 Anne DANET institutrice

7 juillet 1835 Anne DANET "native de cette commune"ouvre la première école de filles au bourg de Séné. Elle est titulaire d'un brevet de capacité. Elle est répertoriée par l'enquête départementale de 1836-37. Ce document montre les matières enseignées par les premiers instituteurs : 

Instruction de la jeunesse - morale en action - bible de Sacy - grammaire de Lhormont et cathéchisme.

Morale en action; syllabique; histoire sainte; cantiques et cathéchisme
Devoirs du chrétien; syllabique et cathéchisme.

Syllabaire; histoire sainte cantiques devoir du chrétien; géographie de Gautier; grammaire de Chapsel, cathéchisme.

Devoir du chrétien, instruction de la jeunesse; syllabaire et cathéchisme.

Civilité chrétienne, ....., syllabaire et cathéchisme.

1835 Louise DANET

Où était située l'école de Mlle Anne DANET?

1822 Maison leg Paroisse

Dans son testament olographe en date du 18 septembre 1817, Pierre COLENO [Billiers 16/5/1755 - Séné 15/02/1822] recteur de Séné depuis 1789, léguait à la Fabrique de Séné, c'est à dire à l'instance qui gère les biens de la paroisse, des terrains au bourg, à Moustérian, à Cantizac et une maison située au bourg.

1822 leg instit

Il ajoute une clause :"le marguilliers conjointement avec M. Le Recteur auront soin de pourvoir cette maison d'une personne sage, fille non engagée avec un mari, pour instruire des enfants, leur apprendre à lire, leurs prières et le catéchisme jusqu'à la première communion, les rentes des dépendances seront pour aider à la nourriture et à l'entretien de l'institutrice saine et malade, celle qui y sera à ma mort, sera celle que j'aurai choisie pour cette fin.

Le recteur COLENO lègue également un appartement pour y loger conjointement sa servante Marguerite Le Calonnec et l'institutrice choisie. Enfin, le fruit de l'hyopthèque d'une terrain est réservé pour payer une bourse à un enfant de Séné qui devrait aller au collège étudier. Le 12 mars 1823, le Roi par la main de son ministre autorise la mairie et la fabrique à hériter des biens du recteur COLENO. 

Le recteur COLENO  décéda en 1822. Combien de temps dura la succession ? Une institutrice a-t-elle précédé Mlle DANET avant son arrivée en 1835?

Quant à la maison léguée par le recteur, tout porte à penser qu'elle était située - comme nous le verrons plus tard - à l'emplacement actuel de l'Ecomusée. [Consulter les archives du notaire Hervieu de Vannes qui rédigea l'acte]

Qui était Anne DANET ?

On comprend qu'elle était native de Séné. On sait qu'elle prit ces fonctions (officielles) après son bvrevet de capacité le 7 juillet 1835. La consultation des actes de naissance depuis la Révolution, ne laisse apparaitre d'une seule Marie Anne DANET, née le 27 décembbre 1816 au sein d'une famille de pêcheurs à Langle. En 1935 elle a 19 ans.

 

Le 1er mars 1836, la maire Vincent ROZO, boulanger à Cariel, écrit au Prefet :"Un grand nombre d'habitants de ma commune ayant manifesté le désir d'avoir un mâitre d'école, j'ai l'honneur de vous adresser ci-joint un estimatif des dépenses à faire pour construire un local convenable.". Le 8 septembre 1842, un premier devis et un plan sont établis. Le 1er février 1843, le projet recueille l'avis favorable du Préfet. Une demande de subvention est adressée pour 2900 frs qui s'ajouteront aux 3100 Frs apportés par la commune. Le 10 novembre 1843 un devis complémentaire est établi et le 7 juillet 1844 le cahier des charges est constitué.

1844 Ecole bourg travaux

Le 13 octobre 1844, Pierre LE DOUARIN, le nouveau maire, atteste que les travaux sont en cours. 

Cependant, bien avant la livraison de l'école, des instituteurs sont en poste à Séné comme l'attestent plusieurs de leurs correspondances avec leur inspecteur.

1837 Le Corre Evaluation

Lors de l'enquete de 1838, l'agent administratif indique à propos d'un certain LE CORRE qui office comme instituteur à Séné : "M Lecorre n'est point encore breveté mais il se présentera aux examens de mars - les besoins de la commune avec... la tolerance de son école qui rend de grands services en attendant que la maison d'école soit construite auquel l'instituteur sera régularisé sa position". Dans un courrier adressé à l'inspecteur, il explique qu'il ne se présentera pas à l'examen.

Le 13 octobre 1843, l'instituteur SEVENOL souhaite régulariser sa toute récente nomination à Séné avec le certificat de moralité de son précédent poste à Pontrieux et son brevet de capacité.

Où se faisait la classe des garçons avant l'inauguration de l'école du bourg?

Celle-ci est sans doute opérationnelle fin 1844, hiver 1845. Elle abrite à l'étage un petit appartement pour l'instituteur et la toute première mairie de Séné !

1843 SENE Ecole etages

1843 Sene Ecole facade

Ces deux vues aériennes extraites de cartes postales Cim, en donne l'aspect extérieur telle que le batiment existait dans les années 1950 avant la construction de la salle des fêtes.

Sene ecole REPERE

SENE maison Gachet ECOLE mairie

 

1847 Enen Mixte Guillanton

Le 2 février 1847, l'instituteur GUILLANTON et le maire DOUARIN signent l'inventaire des matériels de l'école communale mixte. Il se compose de 10 tables, 3 bans, 4 tableaux noirs et 1 tableau de lecture, 1 crucifix, 3 petites croix, 2 grandes croix, 1 pôele, 1 registre d'élèves, 1 registre de compositions, 1 boite de crayon blanc, 1 décamètre et 1 chevalet.

En mars 1847, l'instituteur GUILLANTON écrit à son inspecteur pour se plaindre des insultes du maire de Séné, Pierre Le Douarin [1844-1848] à son égard et de ses intrusions dans sa classe :

Séné le 30 mai 1847
Monsieur l'Inspecteur
J'ai l'honneur de vous prier, dans l'intérêt de l'Institution et surtout de la considération dont doit jouir
l'instituteur, d'inviter M. Le Maire à cesser de m'insulter en classe et partout. Je crois vous avoir dit que déjà
plusieurs fois il avait envoyé avec lui des hommes pour m'insulter ..... et qu'il entrait même en classe et ......
en fermant la porte avec force. Aujourd'hui, non content d'avoir répété avec exagération tout ce que vous me ....
ce magistrat est entré pendant que j'étais monté pour prendre un livre de dictée que j'avais oublié et a commencé à
me parler de la manière suivante et avait l'accent de la colère devant mes élèves et un a-t-i garder tes élèves
fumier là-bas, va derrière la pr du Recteur etc..
Je suis avec le plus profond respect Monsieur l'Inspecteur, votre très humble serviteur.
Guillanton.

1849 MORIO signature


Le 24 décembre 1849, l'instituteur Jean Vincent MORIO, né le 20/9/1810 à Bangor, établi à Séné depuis 1846 après 10 ans passés à Belle-Ile, se plaint en ces termes de la concurrence des écoles publiques de Vannes :

Monsieur l'Inspecteur
J'ai l'honneur de porter à votre connaissance un fait dont les conséquences me sont préjudiciables et inquiétantes,
s'il ne plait à l'administration d'y obérer.
Plusieurs enfants de cette localité fréquentent journalièrement les écoles primaires publiques de la ville de Vannes, contrairement à un arrêté de l'autorité municipale de cette ville, par lequel l'entrée de ses écoles publiques était interdite aux enfants des communes voisines. il parait que cet arrêté n'est plus en vigueur, puisque le contraire a lieu; les écoles de Vannes sont gratuites, dans cette ville de Séné il est perçu une petite rétribution mensuelle de 50 ou 75 centimes. Puisqu'à cette époque les enfants de Séné vont librement à Vannes, il est évident qu'à la belle saison il en ira bien davantage si cela, pour éviter la modique rétribution qu'on paie ici. Je n'ai point la prétention de gêner la liberté de l'enseignement mais il me parait équitable de réclamer pour les travaux de ma profession, les moyens d'existence à ma nombreuse famille (six enfants en bas âges)....

1849 7 MORIO enfant
En effet, Jean Vincent MORIO, vient d'avoir une petite fille, Marie Julie Eloïse de son épouse Amélie CLAVERY.
En 1847, l'école de garçons d de Séné compte alors 37 élèves en hiver et 20 en été. pour 25 payant leur rétribution et 12 gratuits.

La loi Falloux du 15/3/1850, édictée sous le II° République, le Président élu au suffrage universel fut Louis Napoléon Bonaparte, privilégie la liberté de l’enseignement. Elle distingue l’enseignement public et l’enseignement libre. Les écoles sont surveillées par le maire et le curé. Elle oblige les communes de plus de 800 habitants à se doter d’une école pour filles. Le 2 décembre 1852, Napoléon III est Empereur des Français.

1852 LOISEAU signature

Le 14 janvier 1852, LOISEAU, instituteur à Séné, se plaint de la concurrence déloyale des Frères de Vannes qui lui enlèvent des élèves de Séné :

Séné, le 14 janvier 1852
Monsieur l'Inspecteur,
J'ai l'honneur de vous transmettre ci-joint la liste des élèves de Séné qui fréquentent les écoles des Frères à Vannes. Je pense qu'il y en a d'autres qui y vont, mais malgré les informations que j'ai pu prendre, je n'ai pu encore connaître leurs noms, et même je n'ai pu savoir ceux des trois derniers de la présente liste; ce sont des enfants de douaniers de la caserne de Kerbiscon. Les parents de tous ces enfants sont à même de payer la rétribution scolaire. Les Frères n'ignorent pas d'où ils sont et je sais qu'ils engagent souvent des poissonniers de Séné à leur envoyer leurs enfants; mais M. le maire de Vannes n'a pas connaissance de ces faits car les personnes de Séné qui envoient leurs enfants chez les Frères, en se présentant d'abord à la mairie, disent qu'elles habitent Vannes, soit la ville, soit la campagne. Je puis vous affirmer, Monsieur l'Inspecteur que ces renseignements sont conformes à la plus exate vérité, et je vous supplie instamment de vouloir bien avoir la bonté d'user de votre influence pour faire cesser cet état de chose, nuisible tant à la considération de l'Instituteur qu'aux intérêts de l'état puisqu'il est vrai que, moins l'instituteur aura d'élèves, plus sera considérable la somme que l'état devra lui fournir pour compléter les 600 Frs que lui accorde la loi.
Agréer, Monsieur l'Inspecteur, l'assurance de mon profond respect.
Loiseau, Instituteur à Séné."


On comprend de cette lettre que l'école n'est pas gratuite et qu'une concurrence se met en place entre les congrégations et les instituteurs nommés par l'administration de l'Etat. On comprend encore mieux son courrier, quand on apprend que son épouse a mis au monde en début d'année 1852 une petite fille.

1852 Loiseau enfant

Classe des filles par Théophile Emmanuel Duverger

Classe des filles par Théophile Emmanuel Duverger [1821-1898]


Le 27 juillet 1853, Anne DANET écrit à son inspecteur pour se plaindre des agissements du recteur de Séné, Jean Louis Toumelin [1822-1868] :

Séné, le 27 juillet 1853,
A Monsieur l'Inspecteur des écoles primaires à Vannes
Monsieur,
Le onze du mois de mai dernier, j'ai été nommée institutrice primaire publique de la commune de Séné canton est de Vannes où j'étais déjà établie depuis le 7 juillet 1835. Je puis dire que 'a'i su me concilier l'estime de tous les habitants de la commune et le conseil municipal m'a toujours prêté un concours, un appui beinveillant en raison de mes soins envers les jeunes enfants qui me sont confiés pour les instruire.
Depuis quelques temps, le recteur de la commune de Séné a formé le projet de me renvoyer de la commune pour avoir des soeurs. Il m'a enjoint de déguerpir de la maison que j'occupe et qui a été donnée à la commune pour y établir une masion d'école. Sur mon refus de quitter la maison d'école et d'abandonner le poste qu'on m'a confié et que j'occupe; je crois avoir toujours tenu une conduite sans reproche et rempli mes fonctions à la satisfaction générale.
Monsieur le recteur de Séné me fait une guerre ouverte et par des moyens que notre sainte religion dont il est le ministre, réprouve. Il refuse la confession dans le but, édivemment d'indisposer l'opinion publique contre moi et de me descriditer dans les esprits de toute la population. Je n'ose même pas m'approcher de la table sainte car je crains qu'il me refuse la sainte hostie comme il me la déjà fait le dimanche même à la grand messe. : quoi de plus humiliant dans ce monde ! quoi de plus outrageant !
C'est évidemment dans le but d'indisposer l'opinion publique contre moi et de me discréditer dans l'esprit de toute la population au point de me forcer à déguerpir je ne reçois aucune retribution c'est une position affligente.
En vue de la bienveillance que vous m'avez témoignée et de l'intérêt que vous portez aux institutrices en général, je prends la liberté de vous exposer ces choses. Monsieur l'inspecteur quoi qu'il me soit infiniment pénible de le faire; mais vous apprécirez combien j'ai de peine d'être obligée de supporter tant d'humiliation et combien j'éprouve d'inquiétude en me voyant réduite à la mendicité après que je me suis donnée tant de peine que j'ai usé ma vie pour instruire les enfants;
Je vous supplie Monsieur l'Inspecteur de prendre en considération ma malheureuse position; de prier Monsieur le Recteur de l'Académie, ainsi que Monsieur le Préfet de vouloir bien avoir la bonté de jeter un regard de commisération sur moi. Je mets toute ma confiance en vous, ainsi qu'en ces Messieurs qui j'en ai l'espérance son trop justes pour me laisser enlever mon seul moyen d'existence.
J'ai bien l'honneur d'être Monsieur l'Inspecteur votre très humble et très obéissante servante.
Anne DANET


Le 18 juillet 1854, dans un autre courrier, Anne DANET supplie son inspecteur : "
Monsieur l'Inspecteur,
ne m'abandonnez pas dans ma triste position, vous la connaissez, le courage, la bonne volonté, ne me manquent pas pour l'instruction, si vous me trouvez capable je me trouverai heureuse d'être utile vous le savez je s'il ne le suis pas ce qui est pénible et dur pour moi; Bon Inspecteur ne m'abandonnez pas même auprès de Monsieur le Préfet s'il le faut; Monsieur l'Inspecteur ma reconnaissance toute entière est à vous.
Bon Inspecteur, je suis pour la vie votre très humble et obéissante servante.
Anne DANET.

Anne DANET est institutrice et tient ses cours dans un local qui appartient à la Fabrique. Dans son testament du 18 septembre 1819, Le recteur de Séné, Pierre COLENO, léguait à la Fabrique une maison et des terrains afin d'y accueillir une "institutrice des pauvres". Plaidant le fait que la Fabrique n'a de compétence que sur les affaires cultuelles, la Mairie essai de maintenir l'institutrice en poste mais ne semble pas encline à payer un loyer...Ainsi le recteur fait valoir son droit de propriété sur la maison et Anne DANET doit lacher son poste et son emploi. Un courrier adressé à l'inspecteur indiquerait que Mlle Danet obtint un poste en Arzal.

La Congrégation des Filles du Saint-Esprit vont arriver à Séné pour s'occuper de l'instruction des enfants mais également apporter de soins infirmiers à la population, "visiter les malades".

1853 Toumelin Soeur Ecole Filles


Le 21 juillet 1853, l'abbé TOUMELIN écrivait à la Supérieure Générale des Filles du Saint-Esprit : "J'ai l'honneur de vous faire connaître le projet que j'ai d'avoir des Soeurs de votre ordre, une pour l'instruction des petites filles et une pour visiter les malades de la paroisse". 

1854 Sene Ecole soeur Esther

Le 21 janvier 1854,  Anne Marie JEHANNOT, en religion, soeur Esther, demande l'ouverture d'une école au bourg. Elle est épaulée par soeur Aimée de Marie. (Sources archives FSE)  Les soeurs rendent confessionnel l'enseignement qui était laïc jusque là.
Yannick_ROME précise "qu'une école privée de filles s'ouvre à Séné le 1er février 1854 dans un maison léguée à la Fabrique par l'abbé COLENO. toujours tenue pa r les Filles du Saint-Esprit." Cette nouvelle ouverture pourrait être la date de l'arrivée des religieuses au sein de cette école publique des filles déjà existante au bourg. 

1845 Bourg ecomusee

Extrait du cadastre de 1845

Le cadastre de 1845 montre rue Principale (à l'emplacement actuel de l'Ecomusée) un immeuble avec une cour au sud et un jardin au nord cloturé. Il est attesté que ce bâtiment devint l"école publique du bourg dans les années 1950 avant son transfert vers le groupe scolaire Dolto, qu'il était avant occupé par l'école libre des filles, qui remplaçait l'école des Soeurs.

Il y a fort à parier que c'était déjà l'emplacement de la première école de filles sise au bourg. L'immeuble a sans doute été plusieurs fois reconfiguré par des travaux. A quoi ressemblait cette première école catholique en 1854 ? 

Lors de l'enquête sur l'état des écoles de 1855, Pierre Marie LOISEAU écrit sur le formulaire.que la maison d'école appartient à la commune., Il répond à différentes questionq :

Sont elles est assez grandes et confortablement disposéés : OUI

   pour la tenue de l'école : OUI

   pour le logement de l'instituteur : OUI

Ont-elles besoin de réparations :  Blanchir & recrépir la salle de classe- Repeindre les fenêtres

Onservations : Il faudrait un jardin pour l'instituteur

Concernant le mobilier de classe il ajoute qu'il n'est pas complet mais en bon état. Il demande, une horloge, une collection de poids et mesures, des livres de lectures pour les enfants indigents, un tableau de système métrique, à repeindre le tableau noir, des encriers avec tables.
1855 4 Loiseau Secretaire mairie
Cette même année 1855, Pierre Marie LOISEAU, [18/8/1819 Billiers -15/5/1858 Malguénac], insituteur communal à Séné accepte le poste de secrétaire de mairie présenté par le maire Mathurin LE DOUARIN. Il quittera Séné pour un poste à Malguénac où il décède à l'âge de 39 ans. LAg l'étage de l'ecole des garçons faisait office de mairie.

1864 4 LE GOUGER livre

En 1860, LE GOUYER est en poste à Séné et ajoute à sa signature la mention " "instituteur public à Séné". L'école de garçons compte alors 3 divisions. L'instituteur se préoccupe pour l'achat des livres et veille à ce que tous les élèves "indigents" en disposent.

Courant 1860, Marie NOHE, alors âgée de 22 ans, en religion Soeur Barnabé, arrive à Séné au sein de la communauté des Filles du Saint-Esprit. En septembre 1872, lors de cette succession, elle déclare être institutrice à Séné.

Nohé Mathurine Soeur Barnabé

 

 La correspondance avec l'inspecteur montre des courriers de l'instituteur LE GOUYER sur la période 1860-1864.

Depuis 1838, avec LE CORRE, puis, SEVENOL, GUILLANTON, MORIO, LOISEAU, LE GOUYER, des instituteurs laïcs se succèdent à Séné.  La dernière correspondance de LE GOUYER retrouvée aux archives date de 1867.  Il semble qu'à partir d cette date, les instituteurs congrégationistes, à l'instar des religieuses, aient investi l'instruction publique à Séné.

1865 Ecole plan dessin

En 1866, la commune de Séné fait une demande de secours afin de faire des travaux à l'école du bourg. La maison d'école accueille au rez-de-chaussé les salles de classes, à l'étage l'appartement de l'instituteur et une salle qui sert de mairie.

 

La loi Duruy du 10/4/1867, sous le III° Empire, abaisse le seuil de population pour une école de filles à 500 hab. Elle promeut des écoles séparées en garçons et filles, que ne respectent pas les écoles libres. Les communes peuvent subventionner les écoles qui restent soumises à la rétribution scolaire.

1867 Ecole file indigents

C'est l'option retenue par le conseil municipal de Séné le 5 août 1867. Il alloue une subvention de fonctionnement à l'école privée des Soeurs pour leur permettre d'accueillir les élèves "indigents".

1868 TOUMELIN ecoles

Cet extrait de la nécrologie du recteur Jean Louis TOUMELIN, recteur à Séné de 1822 à son décès en 1868, successeur de Pierre COLENO, nous informe que Séné comptait alors une 2° école privée à Montsarrac créée à son initiative, en 1866, sans doute pour accompagner la hausse de la population dans cette partie de la commune liée à la présence d’une usine d’extraction d'iode à La Garenne et à la présence des salines (Lire article sur Montsarrac).Cette école de hameau à Montsarrac aurait existé de 1867 à 1873 [point à vérifier]. Une autre sera établie sur Cadouarn de 1869 à 1875. Des correspondances entre les soeurs et l'inspecteur l'attestent.

Le 23 juin 1867, Mathurine NOHE, en religion soeur Barnabé, ouvre une école de hameau à Montsarrac qui fermera en 1873.

1870 2 Cadouarn Keraudran

Le 20 juillet 1869, Marie Anne KERAUDRAN, en religion soeur Saint-Léonard, ouvre une école de hameau au village de Cadouarn qui durera jusqu'en 1875, date à laquelle les soeurs agrandissent l'école du bourg.

En juin 1869, le Prefet du Morbihan adressait un courrier à M. Le Douarin, maire de Séné, par lequel il lui demandait de faire voter par le conseil municipal, la construction d’une école de hameau au village à Montsarrac. Malgré la volonté du maire et du préfet, le conseil municipal rejette le projet car il souhaitait privilégier les écoles du bourg (lire article sur Montsarrac)


Le 9 juin 1871, le Recteur Toumelin écrit au Supérieur Général :
" … Veuillez aviser à nous fournir deux Frères pour la rentrée prochaine. S'il n'y en avait qu'un, il faudrait qu'il fût à même d'enseigner les mathématiques, parce que les ¾ de mes paroissiens sont marins. Les familles seraient contentes de trouver sur place quelqu'un qui les pousse avant de les présenter aux examens. Le logement est vaste et convenable ; il se trouve dans la maison commune, et en face il y a une grande place [place Coffornic] pouvant servir de cour de récréation aux enfants. La classe est très spacieuse et bien éclairée."

Le 9 juillet 1871, le conseil municipal réuni en séance ordinaire demanda à remplacer l'instituteur laïc par un Congréganiste et cela parce que les élèves diminuaient d'année en année et que ceux qui lui restaient ne faisaient aucun progrès.

Le 10 septembre 1871, M. Guyonvarc'h, vicaire à Séné, ouvrit une école libre pour faire concurrence à M. Gouyer, instituteur à Séné qui ne remplissait plus son mandat d'une façon convenable . Au commencement l'école se faisait dans l'étable actuelle du presbytère.

Le 22 juin 1873, le Conseil municipal dans une nouvelle délibération en date du 22 juin 1873 remplaçait donc le bon M. GOUYER par un Frère qui, au bout de quelques mois avait réuni 115 élèves. Il s'agit de René LE FUR, [Séglien, 15/04/1843], en religion Frère Cantien. En ce même mois, l'école libre devient école publique.

Le 1er janvier 1872, Paterne KERGAL, en religion Soeur Felix-Marie arrive à Séné.

(Lire sa biographie complète de cette soeur infirmière, institutrice et religeuse, médaillée pour son action à Séné).

1902 Kergal Sene ecole


On conpremd à la lecture de ce texte élogieux, que Paterne KERGAL [28/2/1832 Theix-12/12/1924-St-Brieuc] en religion Soeur Felix-Marie, participera activement à l'aggrandissement de l'école des filles qui après les travaux disposait de 3 classes. Elle suit le Prefet qui pousse aux travaux, l'école étant jugée insuffisante et insalubre. Le conseil municipal suit l'avis du Prefet le 15/8/1875 et vote une subvention à l'école privée.

1875 6 Kergal ecole communale

Celle-ci accepte les élèves indigents et prend le statut d'école publique ou communale. Elle compte alors 91 élèves payant et 49 indigent soit un total de 140 élèves qui fréquente l'école désormais communale des filles. L'enseignement "délocalisé" dans les hameaux est été arrêté à cette époque.

1875 Ecole fille payant indigents

 

1883 plan ecole

Ce plan daté du 3 avril 1883, fut annexé à la demande de création du poste d'institutrice adjointe à l'école publique des filles. L'école se compose de 3 classes, d'une cour et d'un préau. La partie privé compte cuisine, service, salon et 3 chambres pour les soeurs des Filles du saint-Exprit qui y logent.

Le 31 août 1873, le conseil municipal vote la construction d'une mairie-ecole :

"Considérant que l'école communale de garçons n'est plus suffisante pour recevoir tous les élèves qui se présentent et qu'il est urgent de construire un local pour une seconde classe; Considérant que le projet dressé par M. Maigné est convenu dans les bonnes conditions, eu  égard à la configuration du terrain; 
vote l'exécution à ce projet dont la dépense est évaluée à neuf mille francs y compris une Mairie laquelle sera indépendante de l'école il affecte à cette entreprise un crédit de pareille somme à prélever sur les fonds libres.
De plus comme il y a nécessité de faire un échange de terrain avec M. Surzur afin d'obtenir une construction régulière,
Le conseil autorise le Maire à faire avec le propriétaire un échange sans soulte."

Le 31 août se déroule l'enquete commodo incommodo. Les travaux supervisés par l'architecte départemental Maigné, commencent à l'automne 1783 et sont confiés à l'entreprise Le Normand de vanens et ses sou-traitants (Bigot, Thareau et Tortenois).

Le 10 décembre 1874 est établi le récépissé de fin des travaux : plan et devis, procès verbal d'adjudication, métré des travaux exécutés, récipissé du cautionnement del'entrepreneur.

1873 Sene Adjoint garcon 

Entre temps, le 17 août 1873, le conseil municipal de Séné demande la création d'un poste d'instituteur adjoint. L'école des garçons compte alors 120 élèves. Le Ministre de l'Instruction publique, des Cultes et des Beaux-Arts donne son accord le 13 janvier 1874. 

Selon les Annales de Quintin, en mars 1874, M. LE FUR, en religion Frère Priscien-Joseph fut appelé contre mon gré et le sien auprès de son frère de sang, Frère Cantien, à Séné." Les deux frères de sang vont se réveler d'excellents instituteurs.

Le 12 avril 1876, le Recteur de Séné se désole du départ de Frère Priscilien aupès du Supérieur Général :

 " Le départ précipité de mes deux Frères aura du retentissement dans la paroisse, car ils sont très aimés et estimés.  Depuis leur arrivée dans le pays, ils ont mérité la confiance générale et tout le monde avoue que la jeune génération  est renouvelée complètement et que d'ici quelques années la face du pays sera entièrement changée.  Les jeunes gens qui se destinent au brevet de capitaine prennent énormément de goût et viennent assidûment aux cours de l'excellent F. Priscien.  Quelle sera leur désolation en apprenant le départ de leur maître.  Les classes sont parfaitement menées et les enfants font étonnamment de progrès.  Les devoirs religieux ne le cèdent en rient à ceux de la classe.  Et c'est au moment le plus heureux que je voie mes excellents Frères me quitter.  Epargnez-moi cette peine…"

Le 22 avril 1876, la hiérarchie de la Congrégation des Frères de Ploermel donne ses instructions au remplaçant de Frère Priscilien : " Bien qu'il paraisse fort et vigoureux, le Frère Jovinien aura bien assez à faire sa classe qui ne tardera pas à arriver au 1er rang comme celle qu'il vient de quitter.  Je lui défends en conséquence de s'occuper de la mairie et de donner des leçons particulières jusqu'à nouvel ordre."

1878 sene CERTIFICAT ETUDES

Pierre NEZET et Guillaume NOBLANC sont les élève du Frère Jovinien et ils ont obtenu leur certificat d'étude.

1881 Sene LE Caillec Jovinien

Il s'agit de Gérard LE CAILLEC, [Cléguérec 07/05/1833 - Doulon (44) 9/01/1909], en religion Frère Jovinien. On note que le Frère en poste à Séné, assure un enseignement auprès des garçons et sert de secrétaire de mairie comme jadis l'institueur laïc.

Ce plan de 1920 et cette photo aérienne permettent de ce rendre compte de l'apect du "groupe" scolaire au bourg. En 1920, la maison de gauche était dédiée au rez-de-chaussées aux classes et aux appartements de l'instituteur à l'étage. La batisse d'un seul niveau proposait deux anciennes classes utilisées en débarras. En 1920, il ne reste que les classes de filles près de la mairie., les garçons sont à l'Ecomusée. A son apogée, de part et d'autre de la mairie, il y aurait eu une école publique de garçons et une école publique de filles. 

1880 Sene bourg ecoles filles

SENE bourg Mairie Ecole plan

Numériser0010

Sur cette photo, un rassemblement de Singotes et Sinagots devant l'ancienne mairie-école. On reconnait à droite le mur d'enceinte avec sa porte qui permet d'accéder à la cour. A gauche, la grnade porte de la mairie.

Le 24 mars 1876, Mlle Marie Pascaline Le Bourdiec, en religion Soeur Sainte Zozime, âgée de 21 ans, est nommée institutrice à l'école publique de Séné avec un traitement annuel de 600 frs.

Le 1er décembre 1876, Marie Anne KERAUDRAN, en religion Soeur Saint Léonard, est agréée en qualité d'institutrice adjointe à l'école de Séné, au traitement de 500 Frs.

Les recteurs de Séné et les Filles du Saint-Esprit ont réussi à placer les soeurs comme institutrices  mais l'école est publique.

1876 Ecoles filles soeur effectif

1876 Sene Ecole garçons effectif

Le 8 novembre 1876, Charles Le Mintier de Lehellec, Délégué pour l'Instruction Primaire, visite les écoles de Séné. L'école des filles tenue par les soeurs compte 3 classes et 134 élèves. L'école des garçons tenue par les Frères compte 151 élèves inscrits. Le Délégué d'ajouter : "le nombre n'est pas toujours le chiffre réel des élèves présents car sur les bords de leur mer, les enfants sont souvent occupés par leur parents soit à la pêche soit aux travaux de l'agriculture".

Les lois Ferry du 16/6/1881 et 28/3/1882 de la III° République, instaurent l’école gratuite pour tous et met fin à la rétribution scolaire. Elle est obligatoire de 7 à 13 ans.

1883 Le Port Soeur Agnès Séné

1884 9 Pensioonat SENE

Le 10 novembre 1883, Soeur Zozime décède à Séné à l'âge de 29 ans. En octobre 1883, Julienne LE PORT, en religion Soeur Agnès Joseph est nommée à Séné. 

1883 Sene Dagorn Frère Felix

Les instituteurs congregationistes investissent également l'école de garçons de Séné. M. Joseph DAGORN, en religion Frère Félix est nommé insituteur adjoint à Séné. Il y avait donc déjà un instituteur principal à Séné à l'école communale des garçons et sans doute est-il un écclésiastique. On comprend également qu'il y a donc deux classes de garçons dans l'école communale.

1884 soeur Séné Davigo

Courant 1884, Mlle DAVIGO, en religion soeur Sainte Valentine est nommée institutrice adjointe à Séné.

Courant 1885, deux nouvelles soeurs, Mlle KERAUDRAN et Mlle ECOUBLET prenent leur poste d'institutrices à Séné, comme l'indique ces mouvements de personnel.

1885 10 SENE religeuses instit

1894 Gravure geoffroy

Gravure de 1884 - Ecole religieuse de filles

La loi Goblet du 30/10/1886 complète les lois Ferry. Elle impose un instituteur laïc dans le public en substitution des enseignants des congrégations (religieux). C'est la laïcisation des écoles. Les salles d’asiles évoluent vers des classes maternelles. 

1886 Instit privé Kergal 

Lors du dénombrement de 1886, les sœurs des Filles du Saint-Esprit s'est organisée autour de Paterne KERGAL. 

1886 Instituteur Le caillec et dagorne

Ce même dénombrement de 1886, indique la présence de deux instituteurs hommes Gérard LE CAILLEC et Joseph DAGORN  qui vivent avec un domestique. Ils ne vivent pas au presbytère avec le desservant (recteur), Georges LE BUON. Sont-ils des instituteurs publics ou bien catholiques ? La présence de 2 hommes et d’une domestique sous le même toit plaide pour des ecclésiastiques. Les congrégations ne sont pas encore interdites dans l’enseignement. Ces deux insituteurs devaient avoir en charge l'école des garçons de l'école communale.

Mais à quel endroit? Le presbytère ? Une des 2 maisons près de la mairie place Coffornic? Une autre "maison d'école" au bourg? 

Quand les premiers enseignants écclésiastiques, à l'instar des Filles du Saint-Esprit, ont-ils commencé à s'occuper d'école à la place des instituteurs nommés par l'administration? Le dernier écrit de l'insituteur LE GOUYER date de 1864. L'école communale de garçons de Séné, à l'instar de l'école des filles a dû devenir confessionnel entre 1865-1875, amenant par la suite les "républicains" à vouloir le laïciser.

Face à cet effectif de religieuses et de "Frères", l'administration de la III° République, fais nomme à Séné, l'insituteur, Mathurin Marie BEVEN, pour procéder à la laïcisation de l'école des garçons.

1888 9 Beven nomination SENE

Les institutrices catholiques et les instituteurs publics ont pris pied à Séné pour "s'affronter" idéologiquement dans une "guerre scolaire" fait de décrets, de laïcisation et d'expulsion des Congrégations. Lire article "La Guerre Scolaire à Séné".